Pourquoi les bassines sont le nouveau combat des écologistes

This picture taken on October 7, 2022, shows a view of the water reserve SEV17, a mega-retention pond project structure which pumps water from groundwater, in Mauze-sur-le-Mignon, some 40 km from La Rochelle, southwestern France. (Photo by AFP)
- / AFP This picture taken on October 7, 2022, shows a view of the water reserve SEV17, a mega-retention pond project structure which pumps water from groundwater, in Mauze-sur-le-Mignon, some 40 km from La Rochelle, southwestern France. (Photo by AFP)

ENVIRONNEMENT - Voilà qui pourrait devenir le nouveau symbole de l’opposition entre agriculteurs et militants écologistes. Qu’on les appelle « réserves », « bassines » ou « super-bassines », ces retenues d’eau qui permettent d’arroser les cultures pendant les périodes sans pluie cristallisent l’attention. Durant l’été, au plus fort de la sécheresse, certains de ces ouvrages avaient été vandalisés, notamment en Vendée, accréditant l’idée d’une guerre de l’eau.

Ce samedi 29 octobre, c’est un peu plus au sud-est que la contestation va donner de la voix. Plusieurs milliers de personnes, dont des responsables politiques comme Yannick Jadot, sont attendues à Sainte-Soline (Deux-Sèvres), à l’initiative du collectif « Bassines Non Merci ». Appuyé par des associations environnementales, des organisations syndicales et des groupes anticapitalistes, il dénonce un « accaparement de l’eau » au profit de l’agro-industrie.

Stocker l’hiver pour irriguer l’été

Signe de la tension ambiante, la préfecture qui a pris un arrêté d’interdiction de manifestation dans 12 communes du département a annoncé la mobilisation de 1 600 à 1 700 gendarmes. Les autorités craignent en effet que les opposants aient pour objectif de créer une ZAD (zone à défendre) à cet endroit, comme il y en a eu par le passé sur le site de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique) ou sur celui du barrage de Sivens (Tarn).

Cette réserve constitue l’une des 16 prévues dans un projet élaboré il y a plusieurs années par un groupement de 400 agriculteurs du département, qui estiment pouvoir ainsi réduire de 70 % les prélèvements d’eau en été. En théorie, le principe est simple : stocker en période de fortes précipitations de l’eau qui sera ensuite utilisée pour irriguer les champs lors des périodes sèches.

À la veille de la mobilisation, le ministre de la Transition écologique a redit tout le bien qu’il pensait du projet, aussi bien sur le fond que sur la forme. « Il correspond à un principe simple : comment on évite, dans les situations de sécheresse que l’on connaît, d’aller prendre de l’eau dans les étiages, avec toutes les conséquences que ça peut avoir sur biodiversité », a expliqué Christophe Béchu sur BFMTV pour valider le principe de ces bassines.

Et l’ancien maire d’Angers d’ajouter que le projet a fait l’objet en 2018 d’une « énorme concertation » à l’issue de laquelle « presque toutes les associations et des élus de tout bord ont signé un protocole ». Mais il oublie que beaucoup d’entre eux, dont la députée écologiste des Deux-Sèvres Delphine Batho, ont justement quitté le comité de suivi.

Le changement de modèle agricole bloqué

Cette opposition grandissante aux bassines prend corps dans un triple constat. Il y a d’abord l’approche, qui révulse certains spécialistes. « C’est un contresens de créer des réservoirs d’eau en surface. L’eau récoltée dans les réservoirs, c’est de l’eau qui aurait dû se retrouver dans les sols ou dans les cours d’eau », pointe ainsi Christian Amblard, spécialiste de l’eau et des systèmes hydrobiologiques sur franceinfo.

Aussi, ces projets n’enverraient pas un bon signa. Créer des réserves d’eau de plusieurs centaines de milliers de mètres cubes – un autre bassin qui avait donné lieu à une manifestation au printemps fait environ 5 hectares de superficie – n’incite pas les agriculteurs à revoir les modèles de production gourmands en eau. C’est parce que le changement dans les pratiques n’allait pas assez vite que Delphine Batho a par exemple claqué la porte des réunions. Et c’est pour cela que la confédération paysanne s’y oppose aussi.

Enfin, la construction même de ces réserves pose problème aux militants écologistes car elle implique la pose de bâches en plastique qui peut empêcher l’eau de ruisseler dans les cours d’eau à proximité et nuit ainsi à la biodiversité. Enfin,

Dans cette impasse, le manque de données scientifiques se fait sentir. Une étude du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a établi en juillet que le débit des cours d’eau pourrait être augmenté sensiblement en été sans conséquence négative importante en hiver. Problème, la modélisation réalisée alors était « exclusivement quantitative » et ne prenait pas en compte certains phénomènes naturels comme l’évaporation potentielle des futures réserves.

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