Piratages, fausses informations... Comment la Russie tente de déstabiliser la France

Cinq cercueils au pied de la tour Eiffel et des soupçons d'ingérence étrangère. Trois personnes, de nationalités bulgare, allemande et ukrainienne, ont été présentées ce lundi 3 juin à un juge d'instruction en vue de leur mise en examen à Paris. Elles sont soupçonnées d'avoir déposé samedi cinq cercueils recouverts d'un drapeau français, avec mention 'soldats français de l'Ukraine', au pied de la tour Eiffel à Paris.

Des investigations sont en cours pour "déterminer une éventuelle ingérence étrangère", a indiqué une source policière à BFMTV. Car un lien direct a été établi par les enquêteurs entre cette affaire et celle des mains rouges taguées, dans la nuit du 13 au 14 mai, sur le mémorial de la Shoah à Paris, a appris BFMTV d'une source policière, confirmant une information du Monde. Il s'agit d'un homme de nationalité bulgare, âgé de 34 ans.

La question des ingérences étrangères, et particulièrement russes, revient régulièrement depuis plusieurs mois et inquiète les autorités à quelques jours des élections européennes et à deux mois des Jeux olympiques, comme le dévoile Ingérences russes: la guerre secrète le long format Ligne Rouge de BFMTV diffusé ce lundi 3 juin à 20h50.

Une "offensive sans précédent"

En avril, des hackers russes ont piraté un moulin à Courlandon, dans la Marne. Ils ont actionné à distance une vanne, modifiant le niveau d’eau de 20 centimètres.

"C'est pour faire peur, je pense. C'est tout. C'est pour dire voilà, on est là. Faites attention. Moi, je le prends pour un avertissement", estime Vanessa, une habitante de la commune.

"Rendre public le fait d'avoir réussi à pénétrer même dans une petite installation en France" est "une forme de démonstration de force disant: 'On peut vous frapper jusque chez vous'", abonde Damien Leloup, journaliste au Monde qui a enquêté sur ce piratage.

Les attaques se font de plus en plus fréquentes, en particulier contre la France. "On a une offensive sans précédent, dans le terme où elle est très résiliente et persistante", affirme Alexandre Alaphilippe, directeur de l'ONG européenne de lutte contre la désinformation EU DisinfoLab.

Des opérations de désinformation

Ces offensives peuvent s'accompagner d'opérations de désinformation. Comme lorsque des étoiles de David bleues, peintes au pochoir, ont été découvertes sur de nombreux bâtiments de Paris fin octobre, quelques semaines après le début de la guerre entre Israël et le Hamas. Les faits, pour lesquels un couple de Moldaves a été interpellé, ont été suivis de publications massives sur les réseaux sociaux de la part de comptes liés au réseau russe Recent Reliable News, selon Viginum, le service de l’État chargé de la vigilance et de la protection contre les ingérences numériques étrangères.

En novembre, le ministère français des Affaires étrangères a condamné "l’implication du réseau russe Recent Reliable News (RRN/Doppelgänger) dans l’amplification artificielle et la primo-diffusion sur les réseaux sociaux des photos des tags représentant des étoiles de David dans le 10e arrondissement de Paris". Le ministère a dénoncé une "nouvelle ingérence numérique russe".

Doppelgänger est un réseau de désinformation pro-russe, puissant et organisé, mis au jour il y a moins de deux ans. Derrière ce réseau se trouvent deux sociétés russes de relations publiques: struktura et ASP. Les Kremlin Leaks, des fuites de données confidentielles révélées en février 2024, ont dévoilé que l'État russe "attribuait des sommes absolument considérables, plusieurs dizaines, voire centaines de millions de dollars à ces acteurs", explique à BFMTV Maxime Audinet, chercheur à l'Institut de Recherche stratégique de l'École militaire (Irsem), spécialiste de l'influence informationnelle de la Russie.

Des "observateurs"

Autre arme utilisée par la Russie dans sa guerre d'influence: le recrutement de relais d’opinions pro-russes en France. Par exemple, en invitant des personnalités politiques occidentales en tant qu'"observateurs" à ses élections. Comme Cyril Gaucher, adjoint au maire de la ville de Talant (Côte-d'Or), qui a été suspendu de cette fonction après avoir vanté l'organisation de l'élection présidentielle en Russie en mars. Devant les caméras de Ligne Rouge, il se dit "très libre" et dément toute "instrumentalisation" de la part de la Russie.

"Observateurs", désinformation, piratages: la Russie cherche à faire vaciller l’opinion publique par tous les moyens. Comment fonctionnent les procédés employés? Quel est l'objectif de la Russie derrière ces opérations? Et avec quel succès? Réponses dans le Ligne Rouge qui a enquêté sur ces offensives, diffusé ce lundi 3 juin à 20h50.

Article original publié sur BFMTV.com