Une Persane renaît grâce à Atiq Rahimi

Manuscrit illustré d’un recueil de poésie perse du XIIe siècle. - Credit:Credit: World History Archive / Alamy Stock Photo
Manuscrit illustré d’un recueil de poésie perse du XIIe siècle. - Credit:Credit: World History Archive / Alamy Stock Photo

Serait-ce un amoureux qui s'adresse à l'objet de sa flamme ? « Il y a quelque chose d'étrange en toi. De rare. » Un fan sous emprise ? « Sers-moi encore du vin comme tu me sers tes mots exquis ! » Un mystique, embarqué à la suite de son gourou ? « De l'au-delà du temps, j'entends ta voix. » Tout cela à la fois, sans doute. C'est un ensorcellement qu'a vécu le cinéaste et romancier franco-afghan Atiq Rahimi en rencontrant par-delà les siècles Mehstî, poétesse persane surgie des tréfonds du XIIe siècle, surprenante d'insolence et de talent… Dans Mehstî, chair des mots, l'« ex-exilé » (Prix Goncourt en 2008 pour Syngué sabour. Pierre de patience, chez POL) part à la rencontre de cette figure méconnue.

« L'art du quatrain que pratique Mehstî est très populaire en Afghanistan, en Iran et au Tadjikistan, explique Atiq Rahimi. Dans les pays arabophones, on dit que le rythme du quatrain vient des versets du Coran. Et justement Mehstî prend cette forme poétique pour parler de sexe, d'ivresse… De thèmes qui sont considérés comme du blasphème ! »

Mehstî parle avec une liberté, et une crudité, à faire rougir les rappeuses de 2023 : « Ce garçon turc que je n'ai pas vu assez/ Qu'il soit au-dessus et moi en dessous/ Pour nous réconcilier, ô Pour Khâtib/ Tu t'occupes de son cul et moi de sa queue. »« Dans ses quatrains, Mehstî se pose toujours comme actrice de son désir », explique Atiq Rahimi. Révolutionnaire au Moyen Âge, Mehstî l'est encore aujourd'hui face à un chiisme [...] Lire la suite