Paul Pogba : À quoi sert la testostérone, quels en sont les effets et où la trouve-t-on ?

In this photograph taken on December 29, 2019 France national team player Paul Pogba speaks to the spectators prior to a football match between All Star France and Guinea at the Vallee du Cher Stadium in Tours, central France, as part of the "48h for Guinea" charity event. (Photo by GUILLAUME SOUVANT / AFP)
GUILLAUME SOUVANT / AFP

SANTÉ - Souvent associée à la virilité, la testostérone est régulièrement au centre de l’attention lorsqu’il s’agit de dopage. Dernière affaire en date : Paul Pogba, contrôlé positif à la testostérone le 20 août, à l’occasion d’un match de la Juventus Turin contre Unidese. Alors que le footballeur attend un second test pour confirmer ou non la présence de « métabolites de testostérone » dans son corps, il risque une lourde suspension.

La testostérone est une hormone dite androgène, sécrétée naturellement chez l’homme au sein des cellules de Leydig, présentes dans les testicules, que l’on appelle la testostérone naturelle ou endogène. Elle est nécessaire à la production des spermatozoïdes et à l’apparition de la libido et peut être utilisée en traitement médical, dans la dysphorie de genre par exemple.

Les femmes en produisent également, mais généralement à des taux très bas. « Il y en a plus chez les femmes grasses, mais normalement une femme sportive n’est pas grasse, donc la testostérone féminine n’est pas dosée en routine », souligne auprès du HuffPost Guillaume Gerbaud, médecin du sport. Le cas de Caster Semenya, athlète sud-africaine qui présente un excès naturel de testostérone montre cependant que le taux de testostérone n’est pas un critère qui fait consensus dans le monde du sport.

Du côté des hommes, tous n’ont pas le même taux de testostérone endogène. « Il y a des variations du taux de testostérone naturel, on peut être bas ou haut, confirme le médecin. Les sportifs en endurance, souvent, sont bas. Parce que l’ultra-endurance et la maigreur extrême vont diminuer la testostérone, qui est un noyau de cholestérol. Donc quand on est en carence alimentaire de cholestérol, on en a moins. »

Un haut taux de testostérone peut-il être atteint naturellement ? « Soit c’est naturel, chez certains sportifs qui en sécrètent davantage, soit cela peut remonter lors de phases de repos, détaille le médecin. Par exemple, un sportif de haut niveau qui ne fait rien pendant trois semaines et qui remange normalement verra son taux augmenter naturellement. »

« Augmenter la masse musculaire et l’endurance »

Dans l’histoire du sport, de nombreux athlètes ont été tentés de prendre de la testostérone exogène, c’est-à-dire artificielle, pour augmenter leurs performances. « Les stéroïdes, donc tout ce qui est testostérone et corticoïdes, visent à augmenter la masse musculaire, l’endurance, explique Guillaume Gerbaud. Ce sont des psychostimulants aussi, donc ça énerve un peu et ça augmente la résistance à la douleur. »

L’autre manière de se doper étant le recours à l’érythropoïétine (EPO) ou la transfusion sanguine, qui augmentent artificiellement le taux de globules rouges dans le sang. « Plus on a de transporteurs de nutriments et d’oxygène, plus on peut faire des efforts prolongés et difficiles », souligne le médecin. Souvent, avant qu’il y ait autant de contrôles, les produits étaient pris en « package ». « Dans les années 90, ils avaient dans le package de l’EPO, de l’hormone de croissance et de la testostérone », détaille-t-il.

Or, selon le médecin, lorsqu’un sportif prend de la testostérone exogène, son taux n’augmente pas et a plutôt tendance à baisser. « On appelle cela des rétrocontrôles : le corps sécrète une valeur de testostérone, que le cerveau enregistre et régule. Et si l’on en prend de manière artificielle, le cerveau va ordonner au corps d’en produire moins voire plus du tout », souligne le médecin.

Des effets de la testo sur la libido

Il alerte sur les risques d’y avoir recours sans prescription médicale. « Les gens qui se dopent 10 ans à la testostérone, lorsqu’ils arrêtent ils n’ont plus de libido, d’érection, de force. Ils commencent à développer du gras au niveau des fesses et du torse. Leur taux naturel de testostérone ne redécollera jamais », prévient-il.

En ce qui concerne le cas de Paul Pogba, qu’il ne connaît pas spécifiquement, le médecin émet une hypothèse. « Ils ont dû trouver lors des contrôles un taux anormalement bas de testostérone naturelle et cela leur a fait chercher autre chose, suppose le médecin. Et ils ont trouvé des métabolites de testostérone ». La présence de cette testostérone exogène doit être confirmée par une contre-expertise et le joueur est passible d’une suspension de quatre ans.

Mais le médecin conseille de ne pas tirer de conclusions hâtives. « Il peut y avoir parfois, lié à certaines maladies, des problèmes d’hypophyse ou de vésicule qui font que ces personnes sont obligées de prendre de la testostérone exogène, précise-t-il. Je ne sais pas si c’est le cas de Paul Pogba, mais il peut y avoir des usages thérapeutiques autorisés et très encadrés. Évidemment, c’est toujours un peu à la limite du dopage quand même. »

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