Olivier Véran rejoint la clinique des influenceurs (et aurait pu difficilement faire plus caricatural)

Olivier Véran photographié lors du Conseil des ministres du 6 décembre 2023 (illustration).
GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP Olivier Véran photographié lors du Conseil des ministres du 6 décembre 2023 (illustration).

POLITIQUE - Peut-on se vanter d’avoir voulu sauver l’hôpital public, et rejoindre un établissement cossu de la médecine privée ? Oui, répond Olivier Véran. Peut-on passer de la neurologie à la chirurgie esthétique pour arrondir ses fins de mois de parlementaire ? Toujours oui, pour l’ancien ministre de la Santé. Le député de l’Isère a confirmé ce mardi 19 mars une information du Figaro, selon laquelle il comptait « remettre la blouse » une fois par semaine.

L’occasion pour l’intéressé de renouer avec sa matière de prédilection, la neurologie, au service de la collectivité ? Pas vraiment. Olivier Véran va rejoindre la clinique privée des Champs-Élysées pour exercer en chirurgie esthétique. Activité pour laquelle il va reprendre ses études à la faculté de Créteil pour se former à cette discipline.

« Il m’a paru extrêmement compliqué de reprendre la neurologie au CHU, d’une part parce que la discipline a très fortement évolué sur le plan thérapeutique (...), et deux, je me suis très vite rendu compte en discutant notamment avec quelques patients que l’étiquette de ministre que j’ai sur le front perturbait la relation thérapeutique », justifie-t-il auprès de l’AFP, estimant donc que cette « étiquette » devrait disparaître à la Clinique des Champs-Élysées.

« C’est 15 % de la population adulte française qui a recours à des soins de médecine esthétique et c’est quelque chose qui ne doit pas être dénigré », insiste-t-il, avant de lister les souffrances auxquelles il entend répondre, comme « une cicatrice sur le visage », un « vieillissement accéléré lié à la ménopause » ou encore une « calvitie précoce ».

Or, comme le souligne Mediapart, l’établissement cossu est davantage connu pour faire sa promotion des augmentations mammaires ou de fessier via les influenceurs sur les réseaux sociaux comme Snapchat ou TikTok que pour sa vocation réparatrice. Sur son site, la clinique admet que la chirurgie réparatrice constitue une part (très) résiduelle de son activité. Il ne faut d’ailleurs pas naviguer bien longtemps sur celui-ci pour mesurer sur la dimension commerciale et lucrative de la structure, comme le montre la capture d’écran ci-dessous.

« Fausses raisons »

Pour autant, l’ancien ministre de la Santé assure que cette activité restera marginale en comparaison de son engagement parlementaire. Olivier Véran projette même de faire un « “Guide du Routard” des villes RN », en référence à ses déplacements réguliers en terres lepénistes.

En attendant, sa reconversion en chirurgie esthétique consterne déjà ses adversaires politiques. « L’hôpital coule, les maladies neurologiques explosent, les postes vacants faute de candidat en neurologie aussi et il part en médecine esthétique à la Clinique des Champs Élysées ! La macronie est un cynisme permanent », a taclé sur le réseau social X le vice-président du RN, Sébastien Chenu. « La conséquence de ne pas avoir de figure : se reconvertir dans la chirurgie esthétique », a renchéri le député LFI Hadrien Clouet. Même amertume exprimée par François Ruffin, qui ironise sur ce « désert médical pour stars et influenceurs, entre la Tour Eiffel et l’Arc de Triomphe ».

À noter que le choix fait également grincer quelques praticiens, à l’image de l’oncologue et président de la Commission médicale d’établissement, Jérôme Barrière. « La médecine esthétique n’est pas la chirurgie esthétique et réparatrice qui est une spécialité chirurgicale à part entière. Et dont chacun d’entre nous pourrait avoir un jour besoin. Le botox en revanche est un choix disons optionnel. Et pour le coup, effectivement associé à une connotation péjorative car renvoyant à l’argent », déplore le médecin, avant d’ajouter : « Ce dont il est question en fait, c’est qu’un ancien ministre de la santé abandonne sa spécialité (bac +11) au profit d’une formation rapide en médecine esthétique… Et en donnant de fausses raisons ».

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