Nahel : Face aux émeutes, le gouvernement pressé de donner des réponses politiques en plus des sécuritaires

Plusieurs voix, à gauche mais pas seulement, appellent l’exécutif à ne pas s’arrêter à la réponse sécuritaire et à envisager une grande mobilisation pour « réparer ces territoires. »

POLITIQUE - Quelles réponses aux violences ? Les émeutes et pillages continuent dans de nombreuses villes en France après la mort du jeune Nahel, tué en début de semaine dernière par un policier lors d’un refus d’obtempérer à Nanterre dans les Hauts-de-Seine. Ce samedi 1er juillet c’est Marseille et Lyon qui se sont réveillés avec le plus de stigmates, tandis qu’ailleurs la tension semblait baisser d’un petit cran.

Il faut dire que le gouvernement a considérablement gonflé les dispositifs de sécurité, vendredi, après deux premiers épisodes de chaos. Plus de 45.000 personnels des forces de l’ordre ont été mobilisés cette nuit, aidés pour certains de véhicules blindés, avec, à la clef, un total de 1300 interpellations partout sur le territoire.

Une stratégie efficace ? Dans l’urgence, peut-être. Mais pour l’après et le long terme, nombreux sont les responsables, notamment à gauche ou parmi les élus locaux concernés au premier chef par ces émeutes, à réclamer une stratégie plus large.

Plan Marshall

Alexis Corbière, le député de Seine-Saint-Denis plaide par exemple pour un « état d’urgence social. » Pour l’élu insoumis, invité de BFMTV ce samedi 1er juillet, il faut « comprendre les raisons profondes qui amènent à ce qui se passe aujourd’hui. » « Est-ce qu’en Seine-Saint-Denis il y a des moyens de santé ? Des moyens d’enseignement ? Est-ce que le logement, plus dégradé qu’ailleurs… Est-ce qu’on s’en prend à ça ? », a-t-il listé, comme autant de raisons de la colère.

D’autres, pas forcément à gauche, évoquent également « un plan Marshall » à l’attention des banlieues. Des formules différentes qui recouvrent la même ambition : une grande mobilisation, financière mais pas seulement, à l’attention des quartiers difficiles.

« Il va falloir reconstruire une quantité astronomique de mobilier urbain, de routes, de bâtiments etc. On a besoin d’un grand plan Marshall pour la banlieue, il faut que l’État nous aide à financer la reconstruction », expliquait ainsi Vincent Jeanbrun, le maire Les Républicains de L’Haÿ-les-Roses, dans le Val-de-Marne, vendredi sur franceinfo. Et d’ajouter : « il faut qu’on fasse plus que du ripolinage. Il faut démolir et reconstruire, transformer, ramener de l’emploi, des commerces, créer de la vie là où on a que des quartiers dortoirs aujourd’hui. »

Même référence du côté de Fabien Roussel. Invité de la chaîne d’information ce samedi, le chef des communistes réclame lui aussi un « Grenelle ou un Plan Marshall » pour « réparer ces territoires. » Son collègue, le maire PCF de Grigny, une ville située en Essonne cite par exemple la justice des mineurs, la formation des policiers, la santé mentale en appelant à « penser l’après » dans les colonnes de Libération. Ceci, même s’il « n’y a pas de baguette magique » et que cela « prendra des années. »

  

Une loi en débat

Un constat partagé par de nombreux spécialistes, sévères à l’égard de la politique de la ville menée dans le pays depuis plusieurs décennies. « En France, on est dans quelque chose d’assez profondément ancré qui est qu’on va régler le social par le spatial », relève par exemple la chercheuse au CNRS Stéphanie Vermeersch auprès de l’AFP. « La rénovation, elle a changé le visage de pas mal de quartiers, mais sur l’école, sur les discriminations, sur l’accès à l’emploi, sur le rapport à la police… Aux mêmes causes les mêmes effets », souffle-t-elle.

En ce sens, plusieurs élus regrettent encore aujourd’hui la fin de non-recevoir opposée, en 2018, par Emmanuel Macron au rapport qu’il avait lui-même commandé à Jean-Louis Borloo, et qui préconisait justement d’agir plus sur d’autres aspects : éducation, emploi, discriminations.

Trois ans plus tard, une autre revendication émerge dans le débat, au-delà des questions sociales : l’abrogation d’une loi de 2017, votée à la fin du quinquennat de François Hollande et accusée d’être à l’origine de la recrudescence des tirs mortels de policiers.

Les insoumis, soutenus par plusieurs écologistes, ont déjà annoncé leur intention de déposer un texte pour revenir sur ces dispositions qui ont modifié les règles d’usage de leur arme de service par les policiers. « Il faut des mesures de réponse. Si le gouvernement veut agir, il faut qu’il propose politiquement des réponses », a encore plaidé Alexis Corbière ce samedi sur BFMTV, en citant cette loi comme exemple.

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