"Ils n’ont pas peur de faire jouer les jeunes": ce que l’Allemagne a apporté aux Français présents à l’Euro

Benjamin Pavard (Stuttgart 2016-2019, Bayern Munich 2019-2023)

Il fait partie de ces joueurs que le grand public n’a pas découvert en France, mais de l’autre côté de la frontière. Benjamin Pavard a quitté le LOSC à 20 ans alors qu’il avait un statut de remplaçant. Direction Stuttgart et la deuxième division allemande, pour prendre du temps de jeu. Un pari réussi puisque Pavard, champion du monde 2018, y devient un cadre et sera remarqué par Didier Deschamps. S’ensuit la folie autour de son but, sa chanson, sa popularité… Il signera dans le plus grand club d’Allemagne, le Bayern Munich, en 2019. "La première fois ici, c'était à 19-20 ans, j'ai tout de suite senti la rigueur allemande, il faut se donner à fond, se souvient-il. J'ai vécu des années magnifiques, beaucoup gagné. Ce qui m'a vraiment plu, ce sont les stades remplis. J'en garde beaucoup de positif. Les clubs allemands n'ont pas peur de lancer des jeunes. En France ils ne font pas forcément confiance, ils n'ont pas peur en Allemagne. J'ai beaucoup évolué en tant qu'homme et joueur. Il faut être à l'heure (rires), c'est de la rigueur au quotidien, il n'y a pas de jour 'off', c'est toujours au taquet."

Dayot Upamecano (RB Leipzig 2017-2021, Bayern Munich depuis 2021)

Lui aussi a quitté la France tôt, à 16 ans, d’abord direction Salzbourg, en Autriche. La maison Red Bull le transfère ensuite à Leipzig, le club étendard, avec Ralf Rangnick comme directeur sportif. "Rangnick est un entraîneur très important pour moi, il m'a ramené à Leipzig, explique l’Ebroïcien. Il m'a donné beaucoup de confiance, de liberté, il a un style de jeu qui me plaisait, défendre en avançant le pressing, je suis très reconnaissant, il m'a beaucoup aidé." Julian Nagelsmann a aussi marqué le joueur, qui a travaillé son placement, ses relances, découvert une nouvelle intensité. Upamecano y a aussi rencontré son coéquipier en Bleu Ibrahima Konaté, avec qui il peut former la charnière en sélection. Le Français, devenu l’un des meilleurs défenseurs centraux du monde malgré quelques sautes de concentration, a ensuite rejoint le FC Bayern. C’est l’un des tricolores qui connaît le mieux l’Allemagne. Cela peut-il servir ? "Un avantage non, répond-il. Même si on connaît les stades."

Ibrahima Konaté (RB Leipzig, 2017-2021)

Ibrahima Konaté avait choisi, après des débuts en pro à Sochaux, en Ligue 2, de prendre tôt la direction de l’Allemagne, ce pays qui fait plus facilement confiance aux jeunes. Pourtant, d’autres clubs prestigieux sont attentifs à lui à l’époque. Rapidement intégré à la rotation puis titulaire malgré des pépins physiques, "Ibou" a appris auprès de Rangnick et Nagelsmann. Il a été associé, une période à Dayot Upamecano (51 matchs en commun), et est devenu l’un des défenseurs centraux les plus fiables de Bundesgliga. Son départ à 18 ans lui a aussi permis de s’autonomiser en tant qu’homme, loin de sa famille parisienne. Un choix payant et Liverpool ne s’y est pas trompé en l’achetant, contre 40 millions d’euros, quatre ans après sa signature en Allemagne.

Jonathan Clauss (Linx 2013-2015, Arminia Bielefeld, 2018-2020)

Son histoire a été racontée à de nombreuses reprise. Jonathan Clauss a joué pour la première fois en Allemagne à Linx, en 5è division après avoir été recalé du centre de formation de Strasbourg et un passage à Vauban, en CFA2 à l’époque. Mais c’est surtout en Bundesliga 2, à l’Arminia Bielefeld, qu’il a explosé à partir de 2018. En deux saisons, le Français s’est imposé comme un joueur de couloir fiable, propre techniquement, cadre d’une équipe qui est remontée en première division. Avant de filer à Lens, en 2020. "Je suis content d’y retourner (en Allemagne), souriait-il avant le départ pour l’Euro. C’est là que tout a commencé. C'est l'un des clubs où j’ai repris beaucoup de plaisir à jouer au foot. Un coach, malheureusement décédé, m’a redonné ce second souffle, le goût d’être sur un terrain, d’être heureux. Le clin d’œil personnel est très beau. Retourner en Allemagne avec le coq sur le cœur, ça remue quelques souvenirs, et ça fait réfléchir, ça prend de la place. J’essaie d’éviter, il y a quelque chose de beau à faire demain. Hier, j’y repenserai plus tard. L’Allemagne est toujours un pays qui m’a énormément plus par la vie et le foot."

Kingsley Coman (Bayern Munich depuis 2015)

C’est le Français installé en Allemagne depuis le plus longtemps. Après son passage au PSG chez les jeunes, puis à la Juventus Turin, Kingsley Coman rejoint le Bayern, d’abord en prêt, puis définitivement en 2017. De quoi étoffer son impressionnant palmarès, puisque le joueur au physique fragile compte 20 trophées en Bavière. Quand il n’est pas blessé, Coman joue, dans un pays où il s’est très bien adapté. "Dans mon cas personnel, ça va faire huit, neuf ans que je suis en Allemagne. Pour moi, c’est un peu la maison. Je me sens super bien ici, je comprends la langue, je la parle, apprécie l’ex-joueur du PSG. Je vais faire en sorte que mes coéquipiers se sentent le mieux possible. Ceux qui ne connaissent pas vont découvrir une superbe ambiance. C’est un football assez ouvert avec beaucoup d’actions, de rythme. C’est un football propice pour exploser pour les jeunes Français car la concurrence est moindre que dans certains championnats donc je pense que c’est un super championnat pour exploser."

Ousmane Dembélé (Borussia Dortmund, 2016-2017)

Après une saison très réussie à Rennes, le crack Ousmane Dembélé signe à Dortmund en 2017 contre 35 millions d’Euros. Le club allemand permet à l’ailier de passer un cap, avant d’aller, dans son esprit, dans une équipe encore plus huppée. "Ça a changé un peu mon jeu car entre la façon dont je jouais à Rennes et à Dortmund n’était pas la même, se rappelle le joueur du PSG. J’ai découvert un nouveau système avec le 5-3-2, j’ai énormément appris avec Thomas Tuchel, aussi en dehors du terrain. Avec Pierre-Emerick Aubameyang également… et beaucoup de choses ont changé de Rennes à Dortmund." Il apprend la rigueur et à 19 ans, il signe 10 buts et 22 passes décisives en 50 matchs. Les fans du BVB sont alors fiers de détenir celui qui est considéré comme l’un des meilleurs joueurs du monde dans le futur. Mais après seulement une seule saison, "Dembouz" déçoit. Il force son départ vers le Barça et son image auprès des Allemands en est, depuis, détériorée.

Marcus Thuram (Borussia Monchengladbach, 2019-2022)

Marcus Thuram est devenu un joueur de classe mondiale en Allemagne après des passages à Sochaux et Guingamp. Acheté en 2019 à 22 ans par le Borussia Mönchengladbach contre 9 millions d’euros, Marcus Thuram devient un joueur fiable et régulier dans une équipe amenée à jouer la Coupe d’Europe (une campagne d’Europa League, une de Champions League). Un club à sa mesure, parfait pour se développer dans un championnat qui aime les jeunes Français. Joueur de côté, Thuram commence aussi à se réaxer. Sa première sélection, en 2020, intervient alors qu’il est à Mönchengladbach. Club que l’attaquant quitte l’Allemagne en 2023, libre, direction l’Inter Milan. "Les quatre dernières années ont été fantastiques, dit-il en partant. Je suis venu ici en tant que jeune joueur et j’ai énormément évolué. C’était exceptionnel de disputer la Ligue des champions avec le Borussia et de se frayer un chemin en sélection grâce à de bonnes performances. Je dois beaucoup à ce club et je n’oublierai jamais ce qu’ils ont fait pour moi. Le Borussia aura toujours une place spéciale dans mon cœur." L’hommage des supporteurs est beau pour le Français qui, en quatre saisons, affiche un joli bilan : 144 matchs, 44 buts, 29 passes décisives.

Randal Kolo-Muani (Francfort, 2022-2023)

Une seule saison, avec Francfort, a suffi pour que les Allemands se rendent compte que Randal Kolo Muani peut être un joueur de classe internationale. Arrivé libre du FC Nantes, où il s’est révélé et a remporté la Coupe de France, Kolo Muani impressionne en Allemagne dans un rôle d’attaquant polyvalent. Capable de couvrir tous les postes devant, Kolo Muani fait découvrir à l’Europe ses capacités dans le jeu de transition. Au point, là aussi, de se frayer un chemin en Equipe de France et à la Coupe du Monde 2022. Son bilan à l’Eintracht Francfort est assez dingue : 50 matchs, 26 buts et 17 passes décisives pour sa première expérience à l’étranger. "RKM" se montre aussi en Ligue des Champions, où son équipe atteint les huitièmes de finale. L’Europe s’affole et le PSG, contre 90 millions d’euros, finit par arracher l’international tricolore. Ce dernier, s’il a ébloui l’Allemagne, laisse une image négative auprès des supporters de Francfort : sa "grève" de l’entraînement pour rejoindre à tout prix Paris ne sera jamais digérée.

Article original publié sur RMC Sport