La ministre Agresti-Roubache dans « Le JDD » : Clément Beaune cite Desproges pour prendre ses distances

POLITIQUE - Pas en son nom. Clément Beaune a pris ses distances ce lundi 7 août avec sa nouvelle collègue la secrétaire d’État chargée de la Ville Sabrina Agresti-Roubache, première membre du gouvernement à avoir accordé un entretien au « Journal du Dimanche », dans sa version Geoffroy Lejeune - une version déjà polémique.

« Ce n’est pas le choix que j’ai fait », a d’abord répondu le ministre des Transports, interrogé sur RMC à ce propos, comme vous pouvez le voir dans la vidéo en tête d’article, avant d’ajouter : « vous savez, moi, je pense d’abord aux journalistes du ’JDD’, aux lecteurs qui ont parfois perdu leur ’JDD’, sa ligne historique, ses valeurs, son ADN, c’est cela que je regrette. »

Clément Beaune, pour qui « chacun fait ses choix en conscience », a toutefois convoqué Pierre Desproges pour exposer sa vision des choses, et ainsi déprécier sans trop le dire celle de sa collègue nommée en juillet dernier. « Pierre Desproges disait ’on peut rire de tout mais pas avec n’importe qui’. Je pense que c’est vrai en politique, on peut parler de tout mais pas avec n’importe qui », a-t-il ainsi soufflé.

« Ça ne donne pas envie » à Laurence Boone

Il faut dire que la présence de la secrétaire d’État dans le premier Journal du Dimanche sous la houlette de Geoffroy Lejeune a suscité un vent de critiques dans la sphère politique. À gauche, plusieurs responsables estiment que cet entretien « accélère la banalisation » du JDD dans cette version, marquée à l’extrême droite. « Le gouvernement Macron avalise le coup de force », a par exemple commenté le Premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure dimanche, sur le réseau social « X » (Twitter).

Dans ce contexte, l’initiative de la secrétaire d’État n’est pas franchement applaudie non plus dans la majorité, ni au gouvernement, comme le montre la réaction de Clément Beaune. Ou celle de sa collègue Laurence Boone. « On a eu un numéro hier, on va voir ce que l’on va voir, mais ce n’est pas ma tasse de thé à ce stade », a ainsi expliqué la secrétaire d’État chargée de l’Europe ce lundi sur LCI, interrogée, elle aussi, sur Sabrina Agresti-Roubache et sur sa présence, ou non, dans un futur numéro. « À titre personnel, (...) ça ne donne pas envie » d’y participer, a-t-elle ajouté.

Élisabeth Borne n’était pas au courant

Et à Matignon ? Cela ne semble pas mieux. Selon plusieurs médias (confirmant une information de Politico), le cabinet de la secrétaire d’État à la Ville n’a pas évoqué cette interview avec celui de la cheffe du gouvernement, ni celui de son ministre de tutelle Gérald Darmanin, avant l’étape de la « relecture ». « Matignon n’a pas été prévenu en amont de cet entretien », a confirmé à l’AFP une source au sein de l’exécutif en fin de matinée, rappelant que « les membres du gouvernement préviennent normalement avant de s’exprimer dans les médias ».

Résultat : Élisabeth Borne (et son entourage) aurait été mise devant le fait accompli vendredi, au moment de la relecture de l’interview par Matignon (un souhait de l’exécutif). De quoi provoquer un « recadrage » des communicants de Sabrina Agresti-Roubache, selon franceinfo, qui ajoute que Matignon souhaite s’entretenir avec elle à la rentrée.

La principale concernée assume, elle, sa présence dans Le JDD. « Le pluralisme, c’est accepter la confrontation », a fait valoir Sabrina Agresti-Roubache dans le journal publié dimanche pour la première fois depuis une grève historique de 40 jours. Si elle ne « peut pas être insensible à la mobilisation quasi unanime de la rédaction », elle estime qu’un responsable politique n’est pas « dans son rôle » s’il « distribue des bons ou des mauvais points à la presse. »

De quoi susciter de nouveaux débats au sein du gouvernement dans les semaines à venir, tant les lignes divergent. Dans un entretien à Ouest France samedi, la ministre de la Culture Rima Abdul Malak estimait pour sa part qu’il « y a toutes les raisons de s’inquiéter » de la vision éditoriale du nouveau JDD, tout en rappelant que « la presse d’opinion a le droit d’exister en France. » La question, pour les ministres, risque désormais de se poser chaque semaine.

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