Michel-Edouard Leclerc accusé à l’Assemblée de « détourner l’argent des Français »

POLITIQUE - Symbole de la grande distribution, Michel-Edouard Leclerc a été la cible de plusieurs élus ce mercredi 18 janvier, à la suite des pressions exercées par le patron de l’enseigne E.Leclerc sur les députés, qui examinent depuis ce mercredi une proposition de loi visant à rééquilibrer le rapport de force entre industriels de l’agroalimentaire et grande distribution.

Après une dizaine de jours d’affrontement médiatique, c’est à l’Assemblée nationale que le député Modem du Loiret, Richard Ramos a dénoncé avec sarcasme les pratiques mises en place par Michel Edouard Leclerc pour mettre en déroute cette proposition de loi, comme vous pouvez le constater dans la vidéo en tête d’article.

L’élu s’est directement adressé à l’homme d’affaires français : « Dans un monde merveilleux imaginé par le bisounours Michel-Edouard Leclerc (MEL), une comptine pour enfants naïfs nous est contée cette semaine à grand renfort d’achats publicitaires. Dans cette belle comptine, MEL serait un roi défenseur de nos agriculteurs et de nos entreprises. Et ses sujets, qui ont fait sa fortune, seraient son seul bonheur ».

Mais après avoir filé la métaphore de cette fameuse « comptine », Richard Ramos revient rapidement au réel. « La réalité est malheureusement différente de cette comptine. Michel-Edouard Leclerc, qui a de cesse d’insulter la représentation nationale en demandant régulièrement aux députés de venir remplir les rayons de ses supermarchés, ne connaît pas la réalité des députés ici présents ».

« Lui, l’héritier avec une cuillère en argent dans la bouche, doit arrêter de s’ériger en Père la Vertu. Lui, dont le chiffre d’affaires est quasiment fait en France, pourquoi a-t-il créé une centrale d’achat à l’étranger, en Belgique ? », ajoute encore l’élu qui estime ainsi que « Michel-Edouard Leclerc détourne l’argent des Français, essaye de détourner la loi mais également les taxes et les impôts ».

Pour rappel, les enseignes achètent leurs produits à des prix fixés à l’issue de négociations tendues. En cas d’échec de ces tractations annuelles, cette proposition de loi prévoit que le tarif demandé par les fournisseurs s’impose, au lieu des prix de l’année précédente qui prévalaient jusqu’ici. Ce que la grande distribution critiquait fortement, avançant l’argument d’une répercussion sur les prix dans les rayons, en pleine période d’inflation.

Finalement, les députés ont adopté en première lecture ce texte ce mercredi. Ils ont adopté à l’unanimité des votants (111 voix pour, 37 abstentions) le texte de Frédéric Descrozaille, membre du parti Renaissance.

Aurore Bergé dénonce le harcèlement des élus

La patronne des députés Renaissance, Aurore Bergé, s’est également indignée ce mercredi de la « pression » mise par Michel-Edouard Leclerc sur les membres de l’Assemblée. Devant l’Association des journalistes parlementaires (AJP), la députée des Yvelines a pointé « la manière avec laquelle il entend faire pression sur l’Assemblée nationale ». « On ne peut fonctionner comme ça, le Parlement est souverain », a-t-elle fait valoir.

« On est harcelés de mails, de messages » et M. Leclerc a acheté des pages pour sa communication dans les journaux, a-t-elle listé.

La proposition de loi Renaissance, examinée par les députés depuis mardi soir, vise à « rétablir un minimum d’équité » entre fournisseurs et distributeurs lors des négociations sur les prix, a également rappelé Mme Bergé. Mais c’est « une folie et un scandale » aux yeux notamment du président du comité stratégique E.Leclerc, qui affirme que le texte « ajoutera de l’inflation à l’inflation ».

Michel-Edouard Leclerc « a refusé de rencontrer » l’auteur de la proposition de loi, Frédéric Descrozaille, « mais a rencontré Sébastien Chenu », député RN du Nord, a pointé Aurore Bergé : « Qu’il ne nous dise pas que le combat de sa vie est contre l’extrême droite ».

La députée Renaissance est-elle elle-même sous l’influence d’autres lobbies que Leclerc ? Son compagnon, l’ex-député Grégory Besson-Moreau, fait désormais du conseil en stratégie et a été en lien avec l’Ilec, Institut de liaisons des industries de consommation représentant de nombreux industriels. L’institut est accusé par la grande distribution d’être à l’origine du texte de Renaissance.

Aurore Bergé a toutefois récusé toute soumission aux lobbies : « Je travaille avec les parties prenantes en toute transparence » sur les textes de loi, ce qui est « plutôt sain », a-t-elle relevé. De plus, les liens d’intérêts des parlementaires sont « très contrôlés, ce qui est normal ». « J’espère que mon compagnon a encore le droit de travailler », a-t-elle ajouté, en lançant : « Je n’ai pas un tempérament à être sous influence ».

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