Mathilde Panot saisit la justice au sujet d’une possible « corruption active » de Bruno Le Maire sur les retraites

Mathilde Panot saisit la justice au sujet d’une possible « corruption active » de Bruno Le Maire sur les retraites
Mathilde Panot saisit la justice au sujet d’une possible « corruption active » de Bruno Le Maire sur les retraites

POLITIQUE - Vérifications exigées. Ce jeudi 16 mars, la présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale Mathilde Panot a écrit au procureur général François Molins pour « signaler » et demander qu’il se penche sur des faits imputés à Bruno Le Maire dans le cadre de la réforme des retraites et dont elle interroge la légalité.

Mathilde Panot s’appuie sur un article du Parisien paru le 13 mars dans lequel une députée Les Républicains, non identifiée mais « plutôt opposée à la réforme des retraites », évoque une série d’appels de son camp et de la majorité pour la faire revenir sur son vote. L’un d’eux émane, selon elle, du ministre de l’Économie qui tente de la « convaincre du bien-fondé de la réforme… tout en glissant que le Gouvernement saurait être ’attentif’ à sa circonscription », écrivent nos confrères. Traduction : un coup de pouce contre un vote.

À la veille de la commission mixte paritaire prévue pour trouver un texte de compromis sur la réforme et deux jours avant le vote crucial du Parlement, cette révélation a indigné la France Insoumise. « Ça s’appelle ni plus ni moins une tentative de corruption », avait ainsi tweeté le député de l’Essonne Antoine Léaument.

Dans son courrier, Mathilde Panot demande donc la saisie de la Commission des requêtes de la cour de justice de la République afin de vérifier l’exactitude de ces faits ainsi que leur conformité ou pas avec la loi. « M. Le Maire aurait par conséquent proposé, sans droit et directement, une ’promesse’ ou un ’avantage quelconque’ à une personne investie d’un mandat électif public pour qu’elle accomplisse un acte prévu par son mandat de député », écrit-elle, en s’interrogeant sur un possible « délit de corruption active » de la part du ministre. Pour rappel, la loi punit de dix ans d’emprisonnement et d’une amende d’un million d’euros toute personne reconnue coupable de cet acte.

Mathilde Panot n’évoque que le cas précis de Bruno Le Maire. Mais d’autres députés opposés à la réforme ont rapporté des faits du même acabit, certains sous couvert d’anonymat et d’autres en assumant.

« Méthode ’House of Cards’ »

Le 9 mars, le LR Pierre Cordier a ainsi raconté sur le plateau de BFMTV une « anecdote » similaire. « J’étais dans un des salons de l’Assemblée il y a quelques jours et je dis sous forme de clin d’œil à un ministre qui était présent et que je ne citerai pas : ’Si vous voulez que je vote la réforme, vous me donnerez 35 millions d’euros pour les Ardennes, j’en ai besoin parce que sur mon territoire, il y a de grosses difficultés.’ ’Vous m’intéressez, vous m’intéressez, monsieur le député’, m’a-t-on dit en me courant légèrement après », a-t-il déclaré, précisant ne pas être un cas isolé.

Quelques jours plus tard, d’autres témoignages allaient dans le même sens. Dans les colonnes de L’Union, le député LIOT Jean-Luc Warsmann raconte ainsi avoir reçu des messages « de collaborateurs de cabinets ministériels ». Le LR Julien Dive, qui à plusieurs fois dit son opposition au projet du gouvernement, évoque-lui un autre cas de figure : « J’ai été appelé par un ministre hier matin (le 13 mars, NDLR) qui m’a expliqué que dès lors que j’avais fait adopter moi-même une réforme sur les retraites des agriculteurs il y a quelques mois, ce serait reconnaissant de renvoyer l’ascenseur », raconte-t-il sur France Bleu, précisant n’avoir pas donné suite. En pleine commission mixte paritaire mercredi 15 mars, le LR Pierre-Henri Dumont, lui aussi opposé à la réforme, a dénoncé des « méthodes d’achats de voix, méthode ’House of cards’, pas forcément très bénéfique pour le Parlement ».

Le RN se montre encore plus virulent. Si aucun des députés d’extrême droite n’a dit avoir été appelé, l’élu du Loiret Thomas Ménagé n’a pas hésité à parler « d’une sorte de République bananière ». « On a des retours depuis hier, quand même très importants, de députés Les Républicains et de LIOT qui sont achetés. Nous avons un gouvernement et des ministres qui, avec l’argent public, sont en train d’acheter des voix et des abstentions », s’est-il indigné au micro de LCP depuis la salle des Quatre Colonnes à l’Assemblée.

« On est dans le cadre strictement normal »

Comme l’ont rappelé certains élus, dont le député LIOT Jean-Luc Warsmann, ces négociations internes font partie des habitudes du monde politique. Mais à partir de quand tombent-elles sous le coup de la loi ? C’est tout l’objet de la demande de Mathilde Panot à François Molins.

Interrogé à l’issue du conseil des ministres mercredi, le porte-parole du gouvernement Olivier Véran a refusé de confirmer ces tractations. Mais, assure-t-il, « on est dans le cadre strictement normal ». « Il y a plus de tensions que d’habitude (...) mais il n’y a rien qui sorte des règles habituelles des relations entre gouvernement et parlementaires », a-t-il indiqué. À la justice maintenant de saisir, ou non, du dossier.

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