Dans le massif des Vosges, la fronde des randonneurs contre la « privatisation » de la montagne

ENVIRONNEMENT - La montagne appartient-elle à tout le monde ? À Rimbach-prés-Masevaux (Haut-Rhin), dans le massif des Vosges, un cortège impressionnant d’un millier de randonneurs a manifesté, samedi 17 février, contre la fermeture d’un sentier de randonnée par un propriétaire privé, qui s’appuie sur une nouvelle loi qui pénalise le passage sur une propriété rurale ou forestière.

Le 11 janvier dernier, le groupement forestier du Wustkopf, acquéreur de 64 hectares dans la vallée haut-rhinoise de la Doller, a envoyé un mail expéditif au Club Vosgien de Masevaux pour lui annoncer la fermeture d’un chemin et exiger l’enlèvement du balisage. « Aucune tolérance ne sera admise », affirme le propriétaire.

Comme vous pouvez le voir dans notre reportage vidéo en tête d’article, Le HuffPost a suivi sur le terrain cette mobilisation. À notre micro, les randonneurs expliquent leur désarroi face à la fermeture de leur sentier. Des sections de ce dernier ont par ailleurs été obstruées par des arbres déracinés, des talus ou des tranchées, selon les constatations du Club Vosgien, du HuffPost et de nos confrères du journal L’Alsace. Nous avons tenté de joindre le propriétaire à plusieurs reprises, sans succès.

Une tolérance remise en cause

Le groupement forestier s’appuie sur une nouvelle loi, promulguée le 2 février 2023, qui vise à « limiter l’engrillagement des espaces naturels » pour laisser circuler la faune. Une démarche a priori vertueuse, mais le texte inclut, pour rassurer les propriétaires, cette disposition : « dans le cas où le caractère privé du lieu est matérialisé physiquement, pénétrer sans autorisation dans la propriété privée rurale ou forestière d’autrui, sauf les cas où la loi le permet, constitue une contravention de la 4e classe », à savoir un minimum de 135 euros d’amende.

Depuis un an, la loi du 2 février 2023 a mené à la fermeture d’autres sentiers, dans le massif de la Chartreuse ou encore sur la Côte d’Azur. Dans les deux cas, de grands propriétaires terriens ont fermé leur terrain aux randonneurs, avec des panneaux « propriété privée », tout en continuant d’accueillir des chasseurs moyennent un droit d’accès. Les maîtres des lieux se justifient par la surfréquentation des sentiers et les incivilités.

Dans une tribune publiée le 30 décembre dernier par Le Monde, un collectif d’élus écologistes et d’associations environnementales affirme que « se promener dans la nature n’est pas un crime ». « Dans la pratique, une certaine tolérance d’accès aux espaces de nature existe de longue date, qu’elle soit tacite ou formalisée à travers des conventions entre acteurs publics et propriétaires privés. Ce compromis fragile est aujourd’hui remis en cause », écrivent les signataires, qui invitent les parlementaires à revoir la loi.

À voir également sur Le HuffPost :

La station de Gréolières-les-Neiges change de nom pour coller à la réalité du changement climatique

Dans les Alpes, les bouquetins préfèrent affronter les loups que de subir le réchauffement