La météo « pourrie » en juillet et en août 2023 ne signifie pas que le changement climatique a disparu

Malgré le temps maussade dans le nord de la France en juillet, le monde a connu des records de chaleur. Juillet 2023 sera « très certainement le mois le plus chaud jamais mesuré », selon l’ONU.
Malgré le temps maussade dans le nord de la France en juillet, le monde a connu des records de chaleur. Juillet 2023 sera « très certainement le mois le plus chaud jamais mesuré », selon l’ONU.

ENVIRONNEMENT - Depuis mi-juillet, Bretons et Parisiens ont ressorti leur imper, et beaucoup de Français se plaignent du temps maussade dans leur région ou sur leur lieu de vacances. Surtout, avec une telle météo et des températures qui vont chuter en août, certains se questionnent : « Il est où le changement climatique ? » Pourtant, l’ONU est formelle : juillet 2023 sera « très certainement le mois le plus chaud jamais mesuré », et même le plus chaud tous mois confondus depuis des milliers d’années.

Déjà, si l’on observe la météo de juillet France, il est faux de dire qu’il a fait moche partout. Si de nombreuses averses ont arrosé le nord du pays et le thermomètre est parfois descendu sous les 20 degrés, dans le Sud, une dizaine de départements ont été placés en vigilance orange canicule, et la météo des forêts a déclenché ses premières alertes rouge feu de forêts pour le Var et les Bouches-du-Rhône.

Un phénomène global sur le long terme

Et souvenez-vous : un puissant dôme de chaleur a provoqué, le week-end du 15 juillet, des records de température en France. Ce sont même plusieurs dômes de chaleur simultanés qui se sont abattus sur l’Europe du Sud, l’Afrique du Nord, le sud des États-Unis et une partie de la Chine. Plus de 50 °C ont été enregistrés le 16 juillet aux États-Unis dans la vallée de la Mort, ainsi que dans le nord-ouest de la Chine, 48 °C en Sardaigne, 45 °C en Catalogne. Des incendies monstres ont ravagé la Grèce, l’Italie, l’Algérie

Or ces vagues de chaleur en juillet auraient été « quasiment impossibles » sans le réchauffement climatique, ont confirmé des scientifiques dans une étude publiée le 25 juillet par le World Weather Attribution. Selon ce réseau mondial de chercheurs indépendants, le changement climatique rend les canicules en Europe 2,5 °C plus chaudes, celles en Amérique du Nord augmentent 2 °C et celles en Chine de 1 °C.

Donc, même si on note une absence de pic ou de vague de chaleur en juillet dans la partie nord de l’Hexagone, cela ne veut pas dire que la Terre ne continue pas de brûler ailleurs. Le changement climatique est un phénomène global caractérisé par une augmentation générale des températures moyennes du globe, continents et océans confondus.

Par ailleurs, le climat est une tendance sur des siècles. Il ne faut effectivement pas confondre la météo, c’est le temps qu’il fait un jour donné, avec le climat, qui est une évolution des températures sur le long terme. Les projections climatiques donnent une moyenne, et même si cette moyenne est de plus en plus chaude depuis la fin du XIXe siècle, cela n’empêche pas d’avoir ponctuellement des épisodes plus froids. Et des mois de juillet localement maussades.

Amnésie écologique

L’Hexagone va d’ailleurs connaître une première quinzaine d’août plus fraîche. Anticipant les remarques des climatodénialistes, le climatologue Robert Vautard a incité ce lundi 31 juillet su franceinfo : « Cette fraîcheur n’est absolument pas exceptionnelle. (...) Si l’on regarde un petit peu l’historique, nous avons eu déjà des températures au cœur de l’été qui pouvaient descendre jusqu’à 15, 16, 17 °C… Cela n’a rien d’exceptionnel. »

Celui qui vient d’être élu co-président du groupe 1 du Giec et qui succède donc à Valérie Masson-Delmotte, ajoute que les Français se sont « déshabitués à ces périodes humides et fraîches dans le nord de la France » et « habitués aux canicules ».

« Malgré une première décade d’août qui s’annonce fraîche, ne pas oublier que cet été est pour l’heure chaud à l’échelle nationale avec une anomalie de +1,7 °C par rapport à la période de référence 1991-2020 », abonde le météorologue Fabien Delacour sur Twitter, rappelant que l’été 2023 s’annonce comme le quatrième plus chaud depuis le début du XXe siècle.

Mais comment expliquer notre impression de froid ? Nous souffrons tout simplement d’un « syndrome du référentiel glissant », aussi appelé amnésie écologique. Ce concept, théorisé en 1995 par le biologiste Daniel Pauly, considère que notre mémoire s’adapte au réchauffement climatique en prenant pour référence des températures de plus en plus élevées.

Depuis plus de vingt ans, nous avons connu des années anormalement chaudes. De 2015 à 2022, les températures ont été les plus chaudes jamais enregistrées dans le monde, selon un récent rapport annuel du programme européen sur le changement climatique, Copernicus. L’été 2022 a été le deuxième plus chaud que la France a connu, avec un nombre record de 33 jours de vagues de chaleur enregistrées.

Preuve ultime que le climat s’emballe (et que notre corps nous trompe en s’y adaptant) : il fait de plus en plus chaud, et ce sont désormais les températures dans les normales de saison qui nous paraissent inédites.

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