Pour lutter contre le racisme dans la police, ces pistes enterrées par le gouvernement depuis deux ans

Un rapport réalisé en 2021 par la Dilcrah n’a jamais été rendu public. Il comptait 12 recommandations pour lutter contre le phénomène.

Un silence à la hauteur de celui observé sur le sujet après la mort de Nahel. Le Monde a remis en lumière ce lundi 18 juillet un document gouvernemental révélé jeudi 13 juillet par L’Humanité. Il s’agit d’une note rédigée par la délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah) en juillet 2021, dans le sillage de la mort de George Floyd aux États-Unis en mai 2020, qui a « ravivé le débat sur le racisme dans la police ».

Son titre ? « Police et racisme : 12 recommandations pour améliorer la formation des agents et la lutte contre le racisme ». Ce rapport, piloté par le conseil scientifique de la Dilcrah, n’a jamais été publié, ni même rendu public, comme c’est habituellement l’usage. Pourtant, le contenu n’a rien d’un pamphlet qui attesterait de l’existence d’un système propice aux discriminations au sein de la police. « La question sensible du “racisme systémique” de l’institution policière n’a quasiment jamais été abordée comme un enjeu central », notent les auteurs du texte.

Et d’insister : « les auditions ont montré qu’on ne peut affirmer que l’institution policière française est délibérément fondée dans son organisation, sa structure hiérarchique, ses recrutements, sa déontologie, ses règlements intérieurs et son idéologie dominante, sur un “racisme systémique” visant à persécuter systématiquement certaines populations en fonction de leur origine, de leur appartenance ethnique ou de leur confession, supposée ou réelle ».

Pour autant, le rapport note qu’il « ne fait pas l’ombre d’un doute » que des « policiers racistes » exercent « au sein de la police française, et que cela se tradui(t) par des comportements au cours de l’activité professionnelle ». Ainsi, le document liste une série de recommandations pour répondre à ce problème.

Aux oubliettes

Parmi elles, « augmenter le temps de formation initiale des gardiens de la paix », « intégrer les sessions sur la lutte contre le racisme dans le cours de la formation des gardiens de la paix et officiers et dans l’évaluation des élèves », « conditionner l’avancement de carrière au suivi de modules de formation continue sur la déontologie, l’éthique dans les pratiques policières et la lutte contre le racisme » ou encore « mieux valoriser les ressources existantes de lutte contre le racisme auprès des policiers ».

Les auteurs du rapport préconisent également d’augmenter les moyens de l’IGPN, et de l’émanciper du ministère de l’Intérieur pour la placer sous l’autorité du ministère de la Justice, afin de garantir une plus grande indépendance. Des recommandations laissées lettre morte, puisque le document n’a connu aucune suite. Smaïn Laacher, président du Conseil scientifique au pilotage de ce rapport, y décèle auprès du Monde un « probable mélange d’indifférence, de désintérêt et peut-être de suspicion à l’endroit de ce travail mené en toute indépendance par des chercheurs ».

Auprès de L’Humanité, le même souligne que le travail s’accommodait mal du Beauvau de la Sécurité lancé à la même époque par Gérald Darmanin. Une initiative qui a accouché d’une souris en la matière. « Moralement et politiquement, c’est une faute de ne pas avoir publié ce rapport », regrette-t-il. Auprès du Monde, le ministère de l’Intérieur assure n’avoir jamais eu connaissance du document. Reste à savoir pourquoi ce travail, dont le sujet est brûlant d’actualité, est tombé aux oubliettes de la République. Selon un sondage YouGov pour Le HuffPost, près de 7 Français sur 10 estiment qu’il y a du racisme dans la police.

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