Lufthansa : 5 choses à savoir sur le premier groupe aérien d’Europe

Chaque semaine, Yahoo vous invite à mieux connaître une entreprise. Petits secrets, anecdotes, histoires insolites, ne manquez pas l’occasion d’épater vos amis. Pour ce 122e épisode, coup de projecteur sur une compagnie aérienne qui compte en Europe : Lufthansa.

Lufthansa : 5 choses à savoir sur le premier groupe aérien d’Europe (crédit : Getty Images)

Avril 1999. Soixante-treize ans après sa création, la Lufthansa fait l’objet d’une plainte aux États-Unis pour avoir collaboré avec le régime nazi et employé des travailleurs forcés. Un documentaire baptisé "L’histoire secrète de Lufthansa" (à retrouver en deux parties ici et ici) et diffusé sur Arte en 2010 retrace le passé trouble de la compagnie allemande.

Quand arrive cette plainte, la compagnie charge l’historien Lutz Budrass de vérifier ces allégations. "La Lufthansa employait beaucoup plus de travailleurs forcés que d’entreprises de l’industrie allemande, prévient l’historien de l’aéronautique dans le film. Quand ces faits ont été révélés par mon travail, elle a probablement pensé que cela pouvait nuire à sa réputation", poursuit-il. Sa fondation en 1926 n’est pas le fruit d’une collaboration entre pilotes ou ingénieurs mais d’un calcul de banquiers qui pressentent l’essor de l’aviation. Dès ses débuts, l’entreprise se rapproche des nazis et "met des avions à disposition d’Hitler pour ses campagnes électorales". Pendant la guerre, la Lufthansa assure l'entretien des avions militaires, réquisitionne des habitants des pays occupés par la Wehrmach pour travailler dans ses ateliers et fait travailler des Juifs contre leur gré.

Depuis cette plainte venue des États-Unis, la Lufthansa a notamment alimenté un fonds d’indemnisation pour dédommager d’anciens travailleurs forcés. Faute de pouvoir fournir les preuves suffisantes, seule une poignée d’entre eux a perçu une indemnisation. D’après les témoignages recueillis auprès des victimes et leurs familles par le documentaire, la Lufthansa ne s’est jamais excusée pour les atrocités commises. Toujours réticente à évoquer publiquement cette page sombre de son histoire, la compagnie a néanmoins mis à disposition des salariés du groupe le documentaire. Comme la Lufthansa, d’autres entreprises allemandes ont reconnu leurs liens avec le régime nazi. C’est le cas de BMW, Volkswagen, Continental ou Hugo Boss.

Le 24 mars 2015, un avion de la compagnie Germanwings, la filiale low-cost de Lufthansa, reliant Barcelone à Düsseldorf, s’écrase dans le massif des Trois-Evêchés, dans les Alpes-de-Haute-Provence. Les 144 passagers et les six membres d'équipage sont tués sur le coup. Les analyses des boites noires de l’appareil, retrouvées quelques jours après le drame, ne laissent aucune place au doute et confirment la thèse de l’acte volontaire. Profitant d’un moment seul dans le cockpit, le copilote Andreas Lubitz a sciemment enclenché la descente de l'avion jusqu'au crash. Il s'agit du troisième plus grave accident aérien en France par le nombre de victimes.

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Rapidement, la première compagnie aérienne d’Allemagne s’est défendue en insistant sur le fait qu’Andreas Lubitz était "à 100% capable de piloter" un avion malgré son état dépressif. La Lufthansa avait été mise au courant des épisodes dépressifs sévères du pilote de l’A320. En 2009, le pilote avait informé par courrier électronique ses instructeurs qu’il avait traversé "un épisode dépressif grave". Il avait malgré tout poursuivi sa formation et obtenu un certificat médial d'aptitude au vol. En arrêt maladie le jour du drame, le "pilote fou" n’aurait jamais dû se retrouver aux commandes de l’avion ce funeste jour de mars 2015. Depuis ce drame, de nombreuses compagnies aériennes ont rendu obligatoire la présence de deux personnes dans le cockpit. Entachée à tout jamais par cette tragédie, la compagnie Germanwings a définitivement tiré sa révérence le 7 avril 2020. Deux ans plus tard, la justice française a clôturé l’enquête par un non-lieu, considérant le geste "suicidaire" du copilote comme imprévisible.

Andreas Lubitz (Crédit : Getty Images)
Andreas Lubitz (Crédit : Getty Images)

En fin d’année 2021, vous avez peut-être vu passer cette information lunaire : "La compagnie Lufthansa va effectuer 18 000 vols ‘inutiles’". La raison de ces voyages à vide ? Conserver ses créneaux de vols. En effet, selon les règles de Bruxelles, 80 % des créneaux de décollage et d’atterrissage dits "slots" doivent être assurés par les compagnies aériennes. Si cette obligation - assouplie pendant le Covid - n’est pas remplie, elles perdent leurs meilleurs créneaux l’année suivante au profit de leurs concurrents. À l’époque, de nombreux observateurs ont estimé qu’il s’agissait d’un coup de bluff de la compagnie pour remettre à plat la réglementation des créneaux. Son concurrent irlandais Ryanair ne s’est d’ailleurs pas privé pour s’en prendre à Lufthansa de manière assez brutale.

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"Lufthansa adore pleurer des larmes de crocodile sur l’environnement alors qu’elle fait tout pour protéger ses créneaux horaires, tançait son truculent PDG Michael O’Leary. Les créneaux sont le moyen par lequel elle bloque la concurrence et limite le choix dans les grands aéroports", a-t-il pris soin d'ajouter. Plutôt que de programmer des vols fantômes qui sont une aberration écologique, Ryanair a proposé à la compagnie allemande de "vendre les sièges de ces vols à bas prix et récompenser les consommateurs européens, dont beaucoup ont financé les 12 milliards d’euros d’aides d’État".

Consécration pour Lufthansa en 2018. L’entreprise germanique, qui a transporté 123 millions de passagers en 2023 (181,8 millions pour Ryanair et 71,2 millions pour Air France - KLM), a été désignée première et unique compagnie cinq étoiles en Europe par Skytrax, agence de notation spécialisée dans l’aviation. Cette distinction, rarissime pour une compagnie du Vieux contient et souvent dévolue aux compagnies asiatiques, lui a en plus permis de se classer parmi les dix meilleures compagnies du monde.

Parmi les (très) nombreux critères passés au peigne fin figurent notamment le service à bord, l’offre de restauration, le confort des sièges, la sécurité, les divertissements et les services proposés. "Nous avons rattrapé notre retard parce que nous avons fait d'énormes investissements dans notre flotte, mis à jour toutes nos cabines, mis en place des services numériques, ouvert de nouveaux salons et amélioré le service à bord et au sol, énumérait son patron Carsten Spohr au moment de recevoir son prix. Je suis convaincu que le facteur le plus important pour obtenir la cinquième étoile était que nous avions les meilleurs employés de compagnie aérienne", a-t-il conclu.

S’est-elle reposée sur ses lauriers ou les experts ont-ils été trop laxistes lors de cette attribution ? Toujours est-il que Lufthansa a depuis perdu sa cinquième étoile.

Carsten Spohr, le PDG du groupe Lufthansa (Photo by Kirill KUDRYAVTSEV / AFP)
Carsten Spohr, le PDG du groupe Lufthansa (Photo by Kirill KUDRYAVTSEV / AFP)

Si vous avez déjà emprunté un avion du groupe, qui compte en plus de Lufthansa les compagnies aériennes Austrian, Swiss, Eurowings et Brussels Airlines, vous avez peut-être remarqué ce détail. Par souci d’adopter un langage non genré, le géant des airs européen a décidé d'abandonner la formule classique "Mesdames et Messieurs" au profit de formules comme "Chers passagers" ou "Bonjour" pour s’adresser aux passagers. Cette nouvelle règle imposée en 2021 n’est pas uniquement destinée aux passagers mais aussi à l’ensemble des métiers du groupe.