LGBTphobies, accueil des migrants... Le RN a-t-il vraiment supprimé ces groupes d'études à l'Assemblée?

Le député RN Sébastien Chenu le 2 août 2022 à l'Assemblée nationale à Paris - Alain JOCARD © 2019 AFP
Le député RN Sébastien Chenu le 2 août 2022 à l'Assemblée nationale à Paris - Alain JOCARD © 2019 AFP

C'est un nouveau sujet qui enflamme les esprits entre le Rassemblement national et La France insoumise. Le groupe de Mathilde Panot a accusé ce vendredi, dans un communiqué de presse, le RN - et plus particulièrement Sébastien Chenu, vice-président de l'Assemblée - de "vouloir s'attaquer aux droits des personnes en situation de handicap, des personnes LGBT et des migrants".

"Le RN a supprimé les groupes d’études consacrés à la langue des signes, aux LGBTQIphobies dans le monde, et aux conditions d’accueil des migrants", assure LFI. "Il a préféré favoriser des groupes sur la thématique de l’industrie du luxe, ou de la chasse."

Ces groupes d'études évoqués par les insoumis sont des structures transpartisanes, des "lieux de discussions et d'échanges irremplaçables" qui permettent aux députés d'"approfondir et suivre des questions spécifiques", en assurant notamment "une veille juridique et technique", résume l'Assemblée nationale. Sous la dernière législature, les thèmes allaient de l'économie maritime à la pêche de loisir en passant par la fin de vie.

Un nombre de groupes divisé par deux

S'il existait 122 groupes d'études entre 2017 et 2022, Yaël Braun-Pivet, la présidente de l'Assemblée nationale, a fait passer la consigne en septembre: il faut réduire leur nombre à 58. "C'est un vieux sujet", explique un administrateur de l'Assemblée nationale, interrogé par BFMTV.com. "Ces groupes étaient très nombreux et leur intérêt n'était pas toujours évident."

Mission a donc été confiée au député RN Sébastien Chenu, en raison de son statut de vice-président de l'Assemblée, de plancher sur le sujet. "On a sollicité tous les présidents de groupe pour avoir des propositions", affirme le député du Nord. "On en a récolté 375. J'ai ensuite invité tous les membres du bureau de l'Assemblée nationale à venir trancher avec moi."

Mais, selon le RN, les différentes membres LFI du bureau - Clémentine Autain, Mathilde Panot, Danièle Obono et Caroline Fiat - ne sont pas venues aux trois réunions préparatoires dédiées à la question.

"Je veux bien qu'on critique mais c'est trop facile de le faire quand on n'est pas venu débattre. Ce sont des réunions transpartisanes où on cherche tous à se mettre d'accord", tance le député Modem Christophe Blanchet, également membre de cet organe.

Le RN dénonce "un procès en sorcellerie"

Interrogée, Caroline Fiat affirme n'avoir "jamais séché" une seule réunion du groupe. "Si je ne suis pas venue à l'une de ces réunions, c'est que je n'étais pas invitée", assure l'élue LFI. Les autres députées insoumises mentionnées plus haut n'ont pas répondu aux sollicitations de BFMTV.com.

Quoi qu'il en soit, le groupe LFI a tout de même fait passer des propositions à Sébastien Chenu, que nous avons pu consulter. Parmi celles-ci, on trouve notamment la demande d'un groupe d'études sur la prostitution ou sur les violences intrafamiliales. "On a accepté 79% des propositions des insoumis, 85% de Renaissance, et seulement 65% pour le RN", affirme encore le vice-président de l'Assemblée.

"Évidemment, parfois elles se rejoignent", poursuit Sébastien Chenu. "On nous fait vraiment un procès en sorcellerie, injuste et faux", juge encore le vice-président de l'Assemblée."

Les LGBTphobies regroupées dans les discriminations

Si la liste sera officiellement arrêtée en décembre prochain, le travail du bureau a déjà arrêté la création de plusieurs groupes. Celui sur la langue des signes - jugé peu actif - sera bien supprimé, comme l'annonçait La France insoumise. Il sera fusionné dans la création d'un nouveau groupe d'études baptisé "inclusion et handicap", jusqu'ici divisé entre trois groupes.

La question de l'accueil des migrants sera, elle, fusionnée dans un groupe sur les mineurs non accompagnés. "Ça n'a aucun sens", regrette Caroline Fiat. "On ne peut pas gérer de la même façon un enfant qui n'a pas de titre de séjour et un adulte. Ça ne viendrait à l'idée de personne d'hospitaliser quelqu'un de 35 ans dans un hôpital pédiatrique."

Enfin, le groupe discriminations et LGBT-phobies, crée en 2018 à l'initiative du député LFI Bastien Lachaud sera bien conservé, affirme Sébastien Chenu, mais sous le seul intitulé de "discriminations".

"On va probablement mettre LGBT-phobies entre parenthèses. Et je vais me faire un plaisir d'être dans ce groupe", avance Sébastien Chenu, ancien fondateur de Gay Lib, le mouvement LGBT de l'UMP, l'ancêtre des LR. Il n'en était jusqu'ici pas membre.

120 députés pour la chasse

Quant aux groupes d'études sur la chasse et le luxe que le député RN aurait choisi de "favoriser" d'après le groupe insoumis, la situation est plus nuancée. Celui sur la chasse est le plus actif de l'Assemblée nationale, avec pas moins de 120 députés qui en font partie.

"On ne pourra jamais fermer ce groupe qui est très puissant", répond sans ambages un député LR. "Il ne faut pas rêver, même si un jour on avait un président écologiste."

Le secteur du luxe sera étudié par deux groupes distincts: un premier spécifiquement consacré à ce secteur et un second sur le "commerce, artisanat et métiers d'arts", comme c'était déjà le cas lors de la précédente mandature.

Article original publié sur BFMTV.com