Le conseiller économique de Xi Jinping promu en Chine

Liu He (photo), le conseiller économique du président Xi Jinping, a été promu lundi vice-Premier ministre tandis que le poste de gouverneur de la Banque populaire de Chine (PBOC) revient à Yi Gang, gouverneur adjoint de la banque centrale depuis 2008. /Photo prise le 19 mars 2018/REUTERS/Jason Leel

par Shu Zhang et Christian Shepherd

PEKIN (Reuters) - Liu He, le conseiller économique du président Xi Jinping, a été promu lundi vice-Premier ministre tandis que le poste de gouverneur de la Banque populaire de Chine (PBOC) revient à Yi Gang, gouverneur adjoint de la banque centrale depuis 2008.

Ces nominations, votées par le parlement, s'inscrivent dans un remaniement qui touchent certains des postes les plus importants du pouvoir à l'entame du deuxième quinquennat de Xi. A cette occasion, Pékin a également décidé de regrouper en une seule entité les autorités de régulation des banques et du secteur de l'assurance et de créer de nouveaux ministères.

Ces changements avaient été annoncés la semaine dernière dans un document parlementaire diffusé deux jours après que l'abolition par le Parlement chinois de la disposition constitutionnelle qui limitait la fonction présidentielle à deux mandats de cinq ans, permettant, en théorie, à Xi Jinping de rester chef de l'Etat à vie.

"En Chine, les ministères fonctionnent en silos géants, à l'échelle de la nation, ce sont des fiefs qui ne parlent jamais les uns aux autres. Par conséquent, afin de mener des réalisations majeures, le commandement doit être vertical, c'est la seule manière de faire travailler ensemble les ministères", souligne Cliff Tan, de la Bank of Tokyo-Mitsubishi UFJ.

Liu He, 66 ans, est un confident de Xi et une personnalité montante des cercles politiques chinois. C'est lui qui dirigeait au début de l'année la délégation chinoise au Forum économique mondial de Davos.

Le 1er mars, il était à la Maison blanche où il s'est entretenu avec le secrétaire américain au Trésor Steven Mnuchin, avec Gary Cohn, qui était encore conseiller économique de la présidence, et Robert Lighthizer, représentant fédéral au Commerce, des projets protectionnistes de Donald Trump en matière de commerce.

Il est devenu en octobre dernier l'un des 25 membres du Politburo, le deuxième cercle du pouvoir après le comité permanent.

Liu, lauréat en 2015 d'un prix de la recherche économique en Chine pour ses travaux sur la crise financière mondiale, est considéré comme un architecte des réformes engagées par Xi concernant l'appareil de production, réduisant les surcapacités et tournant le dos aux industries à faible valeur ajoutée.

Cet anglophone a obtenu en 1995 un master en administration publique de l'université de Harvard.

Sa famille comme celle du président chinois a subi les purges de la Révolution culturelle de 1966-1976. Selon une source proche du pouvoir, le nouveau vice-Premier ministre et Xi Jinping se connaissent depuis l'adolescence.

LA BANQUE CENTRALE EN SOUTIEN DE LIU HE

L'économiste Yi Gang, formé aux Etats-Unis, a parallèlement été élevé au poste de gouverneur de la Banque centrale.

L'actuel gouverneur de la PBOC, Zhou Xiaochuan, a annoncé en octobre dernier qu'il se retirerait prochainement de ses fonctions. Nommé en 2002, il a battu le record de longévité à son poste.

Son successeur, qui est âgé de 60 ans, occupe le poste de gouverneur adjoint de la Banque populaire de Chine depuis 2008. Yi Gang est diplômé en économie de l'Université de l'Illinois, aux Etats-Unis.

Mais contrairement à son prédécesseur, il n'est pas considéré comme un poids lourd au sein du pouvoir, et certains économistes estiment qu'il servira davantage de soutien à la politique économique et financière supervisé par Liu He.

"Pour parler franchement, sa nomination est un peu inattendue parce qu'il n'occupe qu'un rang politique relativement bas", note Tommy Xie, spécialiste de l'économie chinoise à la banque OCBC de Singapour. "Nous anticipons une continuité politique, puisque que Yi soutiendra Liu He pour conduire la réforme de l'économie. Tous deux sont les principaux artisans de la réforme de la Chine de ces dernières années."

Avant la confirmation de sa nomination, dévoilée dimanche par le Wall Street Journal, la banque Goldman Sachs notait que sa nomination "pourrait atténuer les craintes du marché quant à la possibilité qu'un changement de personne puisse conduire à un resserrement graduel de la politique monétaire, puisque Yi est le gouverneur adjoint chargé de la politique monétaire".

Dans ses premières déclarations à son nouveau poste, Yi a déclaré lundi que sa tâche la plus importante était de "mettre en oeuvre une politique monétaire prudente, poursuivre la réforme du secteur financier et son ouverture et maintenir la stabilité du secteur financier".

MINISTÈRES ÉLARGIS

Parmi les autres annonces faites lundi, Liu Kun, ancien vice-ministre des Finances, a été désigné pour remplacer Xiao Jie au poste de ministre des Finances.

Lu Hao, gouverneur de la province du Heilongjiang (nord) et ancien vice-maire de Pékin (2003-2008), prend la tête du ministère nouvellement créé des Ressources naturelles, tandis que les compétences de plusieurs ministres actuels sont étendues.

Li Ganjie, qui dirigeait le ministère de la Protection de l'environnement, devient ainsi ministre de l'Environnement écologique et ajoute à son portefeuille la supervision des pollutions des fleuves, des mers et des sols ainsi que la question du changement climatique.

Han Changfu, ministre de l'Agriculture depuis 2009, est reconduit dans ses fonctions mais se voit octroyer en outre les Affaires rurales.

Le ministère des Affaires étrangères reste à la charge à Wang Yi, qui est parallèlement promu conseiller d'Etat, hiérarchiquement situé au-dessus d'un ministre, cumulant de ce fait les deux plus hautes fonctions diplomatiques au sein du pouvoir chinois.

On ignore dans l'immédiat ce qu'il advient du conseiller d'Etat sortant chargé des Affaires étrangères, Yang Jiechi, que des sources diplomatiques voyaient nommé vice-Premier ministre. Son nom ne figure pas sur la liste des quatre vice-Premiers ministres dévoilée lundi. Mais il reste membre du Politburo et, à ce titre, devrait conserver une influence sur la politique extérieure de la deuxième puissance économique mondiale.

(avec Brenda Goh à Shanghai; Henri-Pierre André pour le service français)