Comment l'avortement a été légalisé

Manifestation des militants du Mouvement de libération des femmes pendant le procès de Bobigny, le 8 novembre 1972.

Au début des années 70, le grand public a pris conscience d’une réalité à la fois quotidienne et dramatique, la mort de centaines de femmes chaque année en France après des avortements clandestins. Ce scandale a pris fin au prix d’une lutte marquée par trois grands moments.

Le coup d’envoi a été le Manifeste des 343 salopes paru dans le Nouvel Observateur le 5 avril 1971. Les femmes signataires de ce texte proclamaient avoir avorté (dans la loi de 1920, les avortées étaient poursuivies avec les avorteurs). On trouvait parmi elles des actrices célèbres (Delphine Seyrig, Marina Vlady, Catherine Deneuve, Bernadette Lafont), des écrivaines (Colette Audry, Simone de Beauvoir, Françoise Sagan), des femmes de théâtre comme Ariane Mnouchkine ou de cinéma comme Agnès Varda, bref, du beau monde. Le retentissement fut énorme, d’une ampleur comparable à ce qu’avait provoqué dix ans auparavant le Manifeste des 121 sur l’insoumission en Algérie.

Le deuxième moment est le procès de Bobigny, tenu en octobre-novembre 1972. Marie-Claire, jeune fille de 16 ans, violée par un garçon de son lycée, s’est fait avorter. Sa mère et elle sont inculpées. La défense est assurée par Gisèle Halimi qui transforme le procès, avec l’accord des deux femmes, en tribune contre la loi de 1920. De nombreux témoins s’expriment en défense des accusées, de François Jacob à Aimé Césaire, mais l’intervention décisive est celle du professeur Milliez, catholique pratiquant, grand résistant et grand mandarin qui, avec son physique à la Boris Karloff, déclare tout uniment : «Je ne vois pas pourquoi nous, catholiques, imposerions notre morale à l’ensemble des Français.»

Travaux forcés

La fille est relaxée, la mère condamnée à 500 francs d’amende avec sursis, ce qui équivaut à un acquittement. Le procès fait la une de toute la presse et le lendemain du jugement, Milliez publie un article dans France-Soir : «J’aurais accepté d’avorter Marie-Claire.» Mais la loi est toujours là. Un groupe de jeunes médecins décident de (...) Lire la suite sur Liberation.fr

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