La France a expulsé un diplomate iranien après un attentat déjoué

La France a expulsé discrètement il y a plusieurs semaines un diplomate iranien en représailles à la tentative d'attentat contre un rassemblement d'opposants iraniens à Villepinte, près de Paris. /Photo d'archives/REUTERS/Heinz-Peter Bader

par John Irish

PARIS (Reuters) - La France a expulsé discrètement il y a plusieurs semaines un diplomate iranien en représailles à la tentative d'attentat contre un rassemblement d'opposants iraniens à Villepinte, près de Paris, a-t-on appris auprès de sources occidentales.

Le 2 octobre, Paris a accusé l'Iran d'avoir commandité ce projet, qui visait un rassemblement organisé fin juin par les Moudjahidines du peuple, et annoncé le gel pendant six mois des avoirs de deux Iraniens et de la Direction de la sécurité intérieure du ministère iranien du Renseignement.

Mais la France a également expulsé il y a environ un mois, sans que cela soit rendu public, un diplomate iranien en poste à Paris, a-t-on appris de cinq sources diplomatiques et proches des services de sécurité occidentaux.

Selon deux de ces sources, il s'agissait en fait d'un agent des services de renseignement iraniens.

Selon trois autres sources, son expulsion est liée directement au projet d'attentat contre le rassemblement de Villepinte, auquel ont participé d'anciens ministres européens et arabes, ainsi que l'avocat de Donald Trump Rudy Giuliani.

L'échec de ce projet d'attentat grâce à l'arrestation en Belgique du couple iranien qui devait, selon les enquêteurs, le commettre et à la coopération avec l'Allemagne, a tendu les relations entre Paris et Téhéran, au moment où la France tente de sauver l'accord sur le nucléaire iranien dont les Etats-Unis se sont retirés en mai.

Le gel des avoirs annoncé par le gouvernement français était relativement symbolique, dans la mesure où aucune des personnes visées n'était en poste en France ou n'y avait pas d'avoirs.

NOMINATIONS EN SUSPENS

Les dirigeants français entendaient de toute évidence signifier que l'affaire était close, ce que n'aurait pas manqué de contredire l'annonce de l'expulsion d'un membre présumé des services de renseignement iraniens sous couverture diplomatique.

La même discrétion a été observée côté iranien, pour éviter de toute évidence de nuire aux discussions en cours avec les pays encore parties à l'accord sur le nucléaire - outre la France, le Royaume-Uni, l'Allemagne, la Russie et la Chine.

Téhéran a démenti toute implication dans le projet d'attentat de Villepinte et accusé les Moudjahidines du peuple d’avoir monté toute l’affaire. Un responsable iranien a démenti l'expulsion du diplomate.

De son côté, la présidence française a renvoyé les questions à ce sujet vers le ministère français des Affaires étrangères, qui a refusé d'y répondre.

Selon une note interne du Quai d'Orsay révélée fin août par Reuters, la France a recommandé à ses diplomates et représentants de reporter tout voyage en Iran.

La nomination d'un ambassadeur français à Téhéran, poste inoccupé depuis trois mois, est toujours en suspens, de même que le remplacement de l'ambassadeur d'Iran à Paris.

Aucune nomination n'est attendue tant que Paris n'aura pas eu d'éclaircissements sur les commanditaires du projet d'attentat, ont déclaré à Reuters des diplomates français.

"On est toujours en échange avec Téhéran sur les suites de l'affaire Villepinte pour en tirer toutes les conséquences mais le dialogue politique et diplomatique entre l'Iran et la France se poursuit", a déclaré à Reuters un autre diplomate français.

(Avec Andrea Shalal à Berlin, Marine Pennetier et Emmanuel Jarry à Paris, édité par Yves Clarisse)