"L’impression qu’il s’en fichait un peu", Dembélé au Barça, le sentiment d’un gros gâchis

Comme on se retrouve... Ousmane Dembélé (26 ans) va affronter le FC Barcelone ce mercredi avec le PSG en quart de finale aller de la Ligue des champions (21h, sur RMC Sport), huit mois après son départ du club catalan. Il y avait signé en 2017 avec le double fardeau du prix de son transfert (105 millions d’euros, avec des bonus pouvant atteindre 150 millions) et de remplaçant de Neymar après son départ fracassant au PSG (222 millions d’euros).

Un statut lourd à porter pour le joueur après seulement une saison à Dortmund et six mois éclatants à Rennes, son club formateur. Entre blessures, retards à répétition et critiques sur son hygiène de vie, son passage en Catalogne ressemble à un gros gâchis malgré un talent loué de tous mais pas suffisamment étalé sous le maillot barcelonais.

Une succession de blessures

En six ans au Barça, Ousmane Dembélé s’est construit un joli palmarès avec sept titres, dont trois Liga (2018, 2019 et 2023). Mais son passage restera marqué par l’incroyable succession de blessures qui l’a privé de près de 150 matchs (144) avec les Blaugrana.

Le début de son aventure, en 2017, avait donné le ton avec une grosse blessure (rupture du tendon du biceps fémoral de la cuisse gauche) dès son troisième match à Getafe, comme se souvient Fred Hermel, spécialiste du football espagnol sur RMC Sport.

Il avait fait une talonnade à Luis Suarez, un geste pas naturel, tu sentais qu'il voulait prouver et il s'est blessé

Résultat: il avait manqué près de quatre mois de compétition avant une rechute peu de temps après sa reprise en janvier. "Dembouz" avait conclu sa première saison avec 23 petits matchs joués.

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Il en avait joué 42 la suivante (2018-2019) pour sa saison la plus aboutie de son aventure catalane (14 buts, 8 passes décisives) agrémenté d’un but fabuleux contre Tottenham. Mais il n’avait pas été épargné par un pépin à la malléole, une déchirure musculaire puis une blessure aux ischio-jambiers qui l’avait privé de la finale de la Coupe du Roi et de la traumatisante demi-finale retour de la Ligue des champions à Liverpool (4-0).

Le début d’une longue galère pour le Français, victime d’une lésion musculaire au biceps fémoral de la cuisse droite en 2019-2020, pour un bilan de neuf matchs joués. Hormis un exercice 2020-2021 plutôt plein (44), les rechutes physiques ont un peu pollué ces deux dernières saisons (genou, ischios…). En six ans, Dembélé aura seulement joué 185 des 327 matchs du Barça (56%).

"Dembélé, c’est Robert Fernandez (alors directeur sportif) qui le voulait", rappelle Sergi Solé, rédacteur en chef Barcelone à Mundo Deportivo. "Il y avait beaucoup d’attentes mais il s’est blessé dès le début, puis ça s’est enchaîné."

Les souvenirs c’est plutôt la tristesse de ses blessures. Il était tout le temps blessé…

Une hygiène de vie pointée du doigt

L’accumulation des blessures d’Ousmane Dembélé a vite interrogé les suiveurs du club sur son hygiène de vie. "Au Barça ou au Real, tout se sait, ce sont des clubs ultra médiatisés", rappelle Fred Hermel.

Le moindre petit écart prenait une ampleur dingue, il a eu du mal à se rendre compte de là où il était

Les échos dans la presse pointaient du doigt le manque de sérieux de son alimentation et son sommeil dégradé par un supposé goût prononcé pour la PlayStation à des heures avancées de la nuit. Le club avait même dépêché un cuisinier à domicile pour lui préparer des repas équilibrés plus en adéquation avec la vie d’un sportif de haut-niveau.

Dans une interview au Parisien, son ancien chef cuisinier Mickael Naya, s'était épanché sur le quotidien du joueur. "Ousmane est un gentil garçon, mais il n’a pas sa vie entre ses mains", avait-il lancé. "Je n’ai jamais vu d’alcool, mais il ne respecte pas du tout ses plages de repos, il n’y a aucune structure de haut niveau autour de lui…" Le joueur, lui, s’était amusé en 2019 de ces critiques sur son "hygiène de vie déplorable" en affichant un plat de pâtes au saumon sur ses réseaux sociaux pour prouver l’inverse. Deux ans plus tard, c'est dans une interview à beIN Sports qu'il balayait ces reproches.

Mon hygiène de vie, elle est très bonne

"Ce n'est pas ça qui a fait que je me suis souvent blessé par le passé. Les gens parlent sans savoir, c'est tout. D'ailleurs, aujourd'hui, je suis beaucoup moins blessé. Les kebabs, j'en mange uniquement quand je retourne chez moi à Évreux."

Des retards à répétition et une absence totale de communication

Ousmane Dembélé au Barça, c’est aussi une histoire de retards à répétition. Il les avait enchaînés à l’automne 2018 avec une arrivée tardive à l’entraînement avant un match de Ligue des champions contre l’Inter Milan, lors duquel il n’était pas entré en jeu. L’entraîneur Ernesto Valverde et son agent avaient démenti une sanction.

En novembre, il avait zappé l’entraînement en raison d’une gastro-entérite sans avoir pris la peine de prévenir le club. Il avait ensuite été recadré par Gerard Piqué après s’être pointé seulement quelques minutes avant le coup d’envoi d’un match contre le Real Betis. Il avait récidivé en décembre la semaine avant un match de Ligue des champions contre Tottenham. Résultat: une amende à six chiffres… et un but d’anthologie contre les Spurs. Dans un reportage sur RMC Sport, son cuisinier d’alors avait raconté la fois où le chef de sécurité du club était venu chercher Dembélé "qui était toujours en train de dormir" à l’heure d’un entraînement.

"Un grand joueur mais un mauvais footballeur"

Les retards avaient continué de régaler la presse catalane. Il y eut celui lors d’une semaine avant la finale de Coupe du Roi en 2019, ou encore ce quart d’heure en 2020 au lendemain de son grand retour à la compétition après dix mois d’absence. En 2021, il avait inauguré le système d’amende mis en place par le nouvel entraîneur Xavi, avant de récidiver quelques jours plus tard en confondant les horaires.

Un an après son départ, les suiveurs retiennent son manque de sérieux, une attitude quelque peu désinvolte et un manque de considération pour l’environnement du club avec aucune conférence de presse donnée en six ans. "Il a coûté très cher et n’a pas laissé un grand souvenir", lance Edgar Fornos, ancien de Barça TV qui a fait un documentaire avec Luis Enrique Els homes de Lucho, aujourd’hui à Radio Catalunya et Mundo Deportivo. "Il n’a pas eu une attitude très professionnelle. La sensation est que c’est un grand joueur mais il n’a jamais su jouer au football. Il jouait très tard aux jeux vidéos, dormait peu".

On avait l’impression qu’il s’en fichait un peu

"Il ne s’est pas adapté, il n’a jamais fait d’interview, jouait tard le soir, il était en retard à l’entraînement, on ne le considérait pas professionnel", abonde Jaume Marcet, ancien attaché de presse de Luis Enrique au Barça B et ancien de Barça TV.

"On attendait un rendement de crack mais il n’avait pas la forme. Il a remplacé Neymar mais les gens n’ont pas connecté avec lui. Tous les ans, on disait que c’était son année. Les gens sont convaincus qu’il va marquer contre le Barça. La sensation ici c’est qu’il est un grand joueur mais un mauvais footballeur."

Mis à l’écart, prolongé, puis transféré

Malgré les blessures à répétition et les critiques sur son hygiène de vie, Ousmane Dembélé est resté très précieux dans l’esprit des entraîneurs et dirigeants du Barça, qui s’accordaient sur les différences et déséquilibres qu’il apportait. Son avenir a rythmé la saison 2021-2022 à l’issue de laquelle il arrivait en fin de contrat.

Voir son clan faire trainer les négociations avait fait perdre patience à Joan Laporta qui avait pris la décision de l’écarter en janvier 2022. Xavi l’avait respecté pendant trois matchs avant de faire appel à lui, quitte à se mettre en porte à faux avec son président. Le dossier s’était résolu l’été suivant avec une prolongation de deux ans et l’intégration d’une clause à 50 millions d’euros pour un départ en 2023. Montant réglé par le PSG pour le recruter l’été dernier. Pas de quoi faire naître des regrets chez les supporteurs, comme l'explique Marcos, l'un d'entre eux.

Dembélé n’a pas laissé de bons souvenirs

"En tant que joueur c’est un 10, des deux pieds mais il a été trop blessé! On a perdu des matchs et du temps, on avait l’impression qu’il n’était pas très motivé. J’étais content quand il est parti." "C’est un grand joueur avec de la vitesse, débordant, très rapide mais avec un manque de précision", ajoute Alvaro, supporter. "Il n’a pas été assez attentif à ses blessures, son alimentation mais quand il jouait, c’était très bien. Il n’a pas beaucoup marqué mais des buts importants."

Messi, Suarez, Alba… Secoué mais apprécié de ses anciens coéquipiers

Ses retards à répétition et les écarts sur son hygiène de vie ont aussi fait grincer des dents ses illustres équipiers. Ceux-ci éprouvaient, dans le même temps, un certain attachement pour l’international français, réputé facile à vivre et souvent très apprécié des groupes dans lesquels il passe.

Au Barça, l’ancien Rennais avait reçu des recadrages publics de Gerard Piqué et de Luis Suarez qui étaient restés assez bienveillants. "Ousmane le sait, le football est un privilège pour chaque joueur. Il faut peut-être se concentrer davantage et être un peu plus responsable sur certains points", avait lancé l’Uruguayen.

Moi aussi quand je suis arrivé à l’Ajax ou à Liverpool, j’ai appris des plus âgés

"Et les jeunes ici font pareil. Je pense que le changement de club est très brutal en général. Un changement de club, de ville, de langue, nécessite un temps d’adaptation. Mais en tant que coéquipier, et dans le groupe, il s’est intégré dès le premier jour. L’espagnol qu’il parle se comprend. Et il s’entend très bien avec le groupe." Lionel Messi avait adoubé la signature du champion du monde en 2018 et répété à plusieurs reprises son admiration face à son talent. Lui aussi l’avait invité à vite répondre aux exigences du Barça dans un souci de compétitivité au sein de l’attaque.

Article original publié sur RMC Sport