Pour l’assurance chômage, le gouvernement dégaine son bison futé de l’emploi

POLITIQUE - Bison futé, droits rabotés. Le ministre du Travail, Olivier Dussopt, a présenté les derniers détails de sa réforme de l’assurance chômage aux partenaires sociaux puis à la presse, ce lundi 21 octobre. Au programme : une météo de l’emploi et des droits qui varient en fonction du taux de chômage dans le pays, comme vous pouvez le voir dans la vidéo en tête de l’article.

« Nous considérons qu’aujourd’hui, avec la baisse du taux de chômage, de 9,5 à 7,3 %, avec les difficultés de recrutement que nous rencontrons, le marché du travail est dans un contexte favorable qui justifie une modulation à la baisse de la durée maximum d’indemnisation », a ainsi justifié le ministre, à propos de ce projet soutenu par le Medef et la CPME mais auquel s’opposent tous les syndicats.

Si le gouvernement ne touche pas à l’accès ou au niveau de l’indemnisation et a renoncé à une modulation des règles en fonction de la situation locale de l’emploi, il s’attaque ainsi à la durée des droits. Des dispositions qui concerneront les nouveaux demandeurs d’emploi à partir du 1er février, en métropole mais pas en Outre-mer. Les premiers impacts sont donc attendus à partir du 1er août.

Période verte/période rouge

Concrètement, le gouvernement retient deux cas de figure. Si le taux de chômage est en dessous des 9 % ou s’il baisse pendant trois mois consécutifs, la situation du marché du travail sera désormais considérée comme bonne. C’est le cas aujourd’hui. Une période « verte », pendant laquelle la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi (au-dessus de six mois) sera rabotée de 25 % (selon un coefficient 0,75). Un chômeur qui aurait eu droit par exemple à 12 mois d’indemnisation dans le système actuel n’aura plus droit qu’à 9 mois. Un plancher minimal de six mois sera préservé.

En revanche, l’état du marché du travail sera considéré dans le « rouge » si le taux de chômage est mesuré au-dessus de 9 % ou s’il progresse de 0,8 point sur un trimestre. Alors, la durée d’indemnisation reviendra au niveau d’aujourd’hui, selon le principe un jour travaillé, un jour indemnisé.

Objectif de ces nouvelles règles : « Entre 100 et 150.000 retours à l’emploi à l’échelle de l’année 2023 », a fait valoir Olivier Dussopt ce lundi en présentant les derniers arbitrages de ce projet très décrié par la gauche et les syndicats. Ces derniers n’ont pas caché leur colère ou leur inquiétude au sortir de leur réunion au ministère du Travail.

« Acharnement »

« Le gouvernement vient de nous annoncer une baisse généralisée des droits de 25 % », a par exemple dénoncé Michel Beaugas (FO), « un scandale », quand son collègue Denis Gravouil de la CGT fustigeait une réforme « totalement inacceptable ». « C’est encore une trappe à précarisation », a renchéri Éric Courpotin (CFTC), pour qui il aurait fallu travailler sur les frais liés au travail : déplacement, garde d’enfants, logement.

Autant de critiques relayées par plusieurs responsables politiques à gauche. Fabien Roussel, le chef de file des communistes s’est notamment ému d’un « acharnement » contre les bénéficiaires de l’assurance-chômage, sur les réseaux sociaux. « C’est une loi qui va favoriser la précarisation absolue des salariés », ajoutait son collègue, le député PCF Stéphane Peu sur BFMTV.

Les seniors « vont payer le plus cher », passant de 36 mois à 27, ajoute Denis Gravouil, craignant qu’ils ne basculent vers le RSA. Aujourd’hui, la durée d’indemnisation est appliquée selon le principe un jour travaillé, un jour indemnisé, avec un maximum de 24 mois pour les moins de 53 ans, 30 mois pour les 53-54 ans et 36 mois pour les 55 ans ou plus.

Le gouvernement va désormais prendre un décret pour instaurer ces nouvelles règles. Cela a été rendu possible par le projet de loi « marché du travail », adopté jeudi par le Parlement, qui donne la main au gouvernement pour décider des règles jusqu’à fin 2023 à la place des partenaires sociaux.

À voir également sur Le HuffPost :

Lire aussi