Législatives en Pologne : Donald Tusk mène une révolte contre le populisme et pour faire tomber le PiS

Le chef de l’opposition polonaise, ancien premier ministre et chef du bloc centriste de la Coalition civique, Donald Tusk, s’adresse aux participants d’un rassemblement à Varsovie, le 1er octobre 2023.
WOJTEK RADWANSKI / AFP Le chef de l’opposition polonaise, ancien premier ministre et chef du bloc centriste de la Coalition civique, Donald Tusk, s’adresse aux participants d’un rassemblement à Varsovie, le 1er octobre 2023.

INTERNATIONAL - Il veut vaincre le populisme en Pologne pour le faire reculer en Europe. Donald Tusk, ancien Premier ministre polonais et ex-président du Conseil européen, est à la tête de la plus importante formation d’opposition, la Coalition civique (KO). Son objectif pour les élections législatives de ce dimanche 15 octobre : faire tomber le gouvernement populiste-nationaliste, le PiS, au pouvoir depuis 2015.

Preuve de son importance : depuis le début de la campagne, le nom de Tusk ne quitte jamais bien longtemps la bouche des membres du PiS. L’ancien chef du Conseil européen est traité de « traître à la nation », « lâche », « allié de Poutine » et « incarnation du mal ». Son retour serait « une catastrophe » pour la Pologne, clame encore le parti Droit et Justice, dont l’objectif est de s’assurer un troisième mandat consécutif à la tête du pays.

Combattant du retour de la démocratie

Cette haine est aussi alimentée par la rage en retour de Donald Tusk, qui montre ouvertement son animosité envers les populistes du PiS. Le candidat de 66 ans avait notamment organisé, le 1er octobre, une marche anti-gouvernementale massive dans les rues de Varsovie. Brandissant des drapeaux polonais et européens et un petit cœur blanc et rouge, symbole de la coalition centriste, collé à la poitrine, environ un million de manifestants, selon la mairie, avaient clamé à cor et à cri leur désaccord avec le pouvoir.

Pour Donald Tusk, il s’agissait de « la plus grande manifestation politique dans l’Histoire de la Pologne » et « du plus grand rassemblement politique aujourd’hui au monde ». S’en prenant au parti nationaliste au pouvoir, il avait aussi clamé que « la Pologne mérite mieux, je suis même convaincu que la Pologne mérite le meilleur ».

Si Donald Tusk tient autant à l’histoire politique de la Pologne, c’est qu’il y est né, en 1957, à Gdansk. C’est dans cette ville polonaise qu’il se battra, au côté de nombreux étudiants, pour le retour de la démocratie en Pologne dans les années 1980. « Il a été d’abord un militant de l’opposition démocratique aux communistes. Il a été un des leaders de l’Association des étudiants indépendants qui étaient proches de celui de Solidarnosc (le premier syndicat libre et autonome du Parti) dans la région de Gdansk », raconte Jérôme Heurtaux, maître de conférences à l’Université Paris-Dauphine, auprès de nos confrères de la radio RFI.

Jaroslaw Kaczynski, son ennemi politique

Tusk, historien de formation, a gravi petit à petit les échelons. Devenu successivement député, sénateur, Premier ministre polonais puis président du Conseil européen et du Parti populaire européen (la coalition des formations de droite dont est issue l’actuelle présidente de la Commission, Ursula von der Leyen), Donald Tusk est revenu sur la scène nationale il y a deux ans. Avec un objectif : affronter son ennemi politique, Jaroslaw Kaczynski, leader du PiS.

Or tout oppose les deux hommes. Tusk, marié et père de deux enfants, est à la tête du parti qu’il a créé en 2001, Plateforme civique (PO), de centre droit et pro-européen, mais aussi de la coalition civique (KO), principale formation d’opposition polonaise. Le second, Jaroslaw Kaczynski, est un célibataire solitaire qui vit avec ses chats, décrit Politico, qui dirige d’une main de fer le parti ultraconservateur et anti-européen de Droit et justice (PiS), au pouvoir depuis 2015 en Pologne. Le PiS a introduit de nombreuses réformes affaiblissant l’État de droit dans le pays, et portant atteinte aux droits des personnes LGBT, à la liberté de la presse, ou encore à l’indépendance judiciaire.

Faire reculer le populisme en Europe

Pour combattre les idées populistes du PiS, Donald Tusk n’hésite pas à jouer sur leur terrain, en dénonçant l’hypocrisie du parti ultraconservateur qui « fait entrer en Pologne des centaines de milliers de migrants d’Afrique et d’Asie », rappelle Le Monde. Mais pour se démarquer, et gagner des points auprès de son électorat, l’ex Premier ministre a décidé d’entamer un virage à gauche sur les questions sociétales. Il prône désormais la généralisation du droit à l’avortement en Pologne ou encore la gratuité de la fécondation in vitro.

Une victoire de Tusk marquerait non seulement le recul des idées populistes en Pologne, mais ce serait surtout une victoire pour les valeurs démocratiques européennes. Depuis les années 2000, le populisme et l’« illibéralisme », une idéologie qui rejette l’immigration et les minorités sexuelles dont l’autoritaire Premier ministre hongrois Viktor Orban se fait le chantre, montent dans les pays de l’Union européenne.

Mais le succès de Donald Tusk aux législatives de ce dimanche est pour l’heure loin d’être acquis. Car en dépit de nombreux conflits avec l’Union européenne et d’accusations d’atteintes à l’État de droit, le PiS de Jaroslaw Kaczynski est crédité de 33-36 % des intentions de vote, contre 26-28 % pour la Coalition civique. Mais le résultat final dépendra des scores d’autres partis et des alliances possibles.

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