Législatives 2024 : un gouvernement RN créerait « une explosion de précarité », alertent ces associations

« On a des mécènes, des bénévoles, mais jusqu’où peut aller la sphère privée pour lutter contre la misère ou la pauvreté ? » s’interroge Vincent de Lahaye, directeur de l’association Le Village
Maskot / Getty Images « On a des mécènes, des bénévoles, mais jusqu’où peut aller la sphère privée pour lutter contre la misère ou la pauvreté ? » s’interroge Vincent de Lahaye, directeur de l’association Le Village

PRÉCARITÉ - Un gouvernement aux couleurs du Rassemblement National ? « Pour le monde associatif, c’est un danger » alerte Manuel Domergues, directeur des études de la Fondation Abbé Pierre. Dans ce milieu comme dans bien d’autres, l’inquiétude se fait sentir depuis les élections européennes et la dissolution de l’Assemblée nationale.

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La lutte contre la précarité serait-elle encore possible si les élections législatives emmenaient la France vers l’extrême droite ? Le directeur des études de la Fondation Abbé Pierre, qui lutte contre le mal-logement et le directeur de l’association citoyenne de solidarité Le Village ont témoigné de leurs craintes auprès du HuffPost.

La peur du tri des bénéficiaires

« Le Rassemblement National est depuis toujours en attaque contre les étrangers, les immigrés et les autres minorités de tous genres, soupire Manuel Domergue. Si le pouvoir décide de réduire leurs droits, ça aura des conséquences directes sur la pauvreté et la violence sociale, et donc sur les associations qui viennent en aide aux personnes qui en sont victimes ».

En première ligne des craintes, la question de la « préférence nationale » régulièrement brandie par le RN et notamment par Jordan Bardella, qui a affirmé, le 18 juin dernier sur France 2 qu’il soutenait la « priorité nationale » pour les logements sociaux. Mais pour le directeur des études de la Fondation Abbé Pierre, « s’il y a des règles discriminatoires contre les étrangers, qu’ils n’ont plus le droit d’accéder aux logements sociaux, ça créera une explosion de précarité qui rejaillira sur tout le tissu associatif. »

Il fait part de sa peur d’une extension de cette priorité nationale aux espaces de solidarités. « On gère des pensions de famille, qui sont des lieux d’accueil de personnes qui ont un passé à la rue. Si on devait en exclure les personnes étrangères, ça serait très dérangeant et ça poserait des problèmes éthiques très forts, souligne-t-il. Quand les gens n’ont pas de droit, comment on fait pour les aider ? »

Il rappelle qu’en France, une grande partie de l’action sociale est menée par les associations, sur mandat de l’État. « S’il fallait faire un tri parmi les bénéficiaires d’aide d’accès au logement, aux soins, à l’aide alimentaire, il serait demandé aux associations de le faire, ce qui mettrait les travailleurs sociaux en grande souffrance, ou bien ça les obligerait à se placer en contournement de la règle ou en désobéissance civile. » Au nom de la Fondation, qui accompagne des personnes mal-logées, Manuel Domergues s’inquiète également de l’avenir du droit au logement.

« Il nous resterait quoi comme soutien ? »

Vincent de Lahaye est directeur de l’association Le Village, qui a pour mission d’accueillir et d’accompagner les personnes en grande précarité au sud du Vaucluse. Dans ce département où le Rassemblement National a reçu plus de 40 % des voix aux élections européennes, l’association propose des activités diverses, des chantiers d’insertions ou encore des maraudes. Sur le terrain, elle se heurte déjà régulièrement à ce que son directeur appelle « la droite conservatrice », sous laquelle il rassemble certains élus de droite « dure » et du Rassemblement National.

« Il y a des publics plus difficiles à accepter pour ces couleurs politiques : les personnes à la rue, les personnes qui relèvent du ministère de la Justice, les publics bénéficiaires du RSA… » souligne le directeur, qui raconte que certaines communes au sein desquelles ils agissent ont désormais coupé les subventions qu’elles leur allouaient et que lorsqu’ils tentent d’y créer des projets, ils trouvent des « portes closes », voire de l’obstruction d’après lui.

Pour maintenir leur activité, l’association compte sur le soutien de l’État - pour combien de temps ? « Si même l’État devenait d’extrême droite, il nous resterait quoi comme soutien ? s’interroge Vincent de Lahaye. On a des mécènes, des bénévoles, mais jusqu’où peut aller la sphère privée pour lutter contre la misère ou la pauvreté ? »

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