Karl Lagerfeld, dernier héros de la littérature européenne

Karl Lagerfeld, en 2010.  - Credit:ABACA / ABACA
Karl Lagerfeld, en 2010. - Credit:ABACA / ABACA

Les interviews données par Karl Lagerfeld auront un jour la même valeur documentaire que les Mémoires du prince de Ligne (1735-1814), un témoignage sur une Europe idéale et finissante. Lagerfeld aurait pu se taire et ne rien commenter, il l'a fait pendant longtemps. Son travail aurait suffi ; le mystère fait le reste. Il s'est prêté à un jeu médiatique qui avait sa part de vanité, mais, après tout, témoigner n'est pas rien, surtout quand on a le talent pour. C'est une des conclusions à tirer de la passionnante série documentaire diffusée par Canal+, Karl Lagerfeld : révélation*.

Sur ses papiers d'identité, Karl Lagerfeld avait corrigé sa date de naissance, 1933, car il trouvait odieux d'être relié à l'année où Adolph Hitler était devenu chancelier ; il a appris à parler anglais et français avant l'âge de 10 ans parce qu'il voulait quitter l'Allemagne ; il a acheté des maisons sans y vivre, ou si peu ; il voulait lire tous les livres, tous les journaux, discuter avec tous les artistes, pour créer. Bref, il avait des manières et des désirs très XVIIIe.

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« Je suis un calviniste » : pas de cigarettes, pas d'alcool, pas de sexe, ou si peu. Mais il aimait le contraire de lui-même. Il a organisé des fêtes mémorables et fastueuses, s'entichait d'individus qui, eux, n'étaient pas sobres et parfois se détruisaient. Lagerfeld se tenait à l'écart du chaos, tout en sachant qu'il s'y passait des choses intéressantes.

Lagerf [...] Lire la suite