John Banville : « Je déteste le cynisme de l’Église »

L'Irlandais John Banville sort Neige sur Ballyglass House, son premier polar sous son vrai nom (et plus Benjamin Black), traduit chez Robert Laffont.  - Credit:ULF ANDERSEN / Ulf Andersen / Aurimages via AFP
L'Irlandais John Banville sort Neige sur Ballyglass House, son premier polar sous son vrai nom (et plus Benjamin Black), traduit chez Robert Laffont. - Credit:ULF ANDERSEN / Ulf Andersen / Aurimages via AFP

Il y a ceux qui « bouffent du curé » et puis il y a ceux qui les émasculent, carrément. John Banville, Irlandais pure tourbe, appartient à cette seconde catégorie, moins roborative, plus saignante. L'homme de lettres le plus respecté de son île depuis James Joyce, récompensé du prestigieux Booker en 2005 pour La Mer, signe aujourd'hui un polar bulldozer sur l'exercice du pouvoir du clergé.

Dans la campagne irlandaise des années 1950, on retrouve au petit matin le vénérable père Lawless en soutane et col romain trempant dans son propre sang. L'homme d'Église, resté à Ballyglass House pour la nuit en raison des chutes de neige, a été poignardé et ses parties génitales ont été sectionnées. La maisonnée, des notables de « l'aristocratie terrienne », les Osborne, se rassemble en bonnet de nuit autour du macchabée tandis qu'on mandate de Dublin un detective inspector protestant pour le moins baroque : St John Stratfford.

C'est à travers le regard de ce personnage à contre-emploi que le lecteur ausculte les personnages, leur histoire, l'hypothèse d'un mobile. Parmi ces personnages, le rigide (et vieux) colonel Osborne, dont la première épouse se brisa les reins au pied du même escalier que le curé – on envisagera comme alternative au meurtre la « scoumoune de l'escalier ». Le docteur Hafney, dit « le Boche », au costume en tweed « de la couleur et de la texture d'un porridge », bourgeois de province et médecin de famille – mais surtout de la nouvelle madame Osborne [...] Lire la suite