Jeux olympiques: serons-nous en sécurité sur les plages cet été sans les CRS nageurs-sauveteurs?

Cette année, les habitants de Vern-sur-Seiche (Ille-et-Vilaine) seront privés de baignade. Le maire de cette commune de l'agglomération rennaise vient de prendre la décision de fermer cet été la plage urbaine de la vallée de la Seiche où viennent se rafraîchir les riverains. En cause: la sécurisation des Jeux olympiques qui se dérouleront dans tout juste un mois à Paris, du 26 juillet au 11 août.

Comment l'organisation de l'événement sportif international peut avoir des conséquences sur la vie de cette petite commune bretonne? Cette année, les nageurs-sauveteurs ont été largement sollicités à pour assurer la surveillance du littoral. La raison: la réquisition des CRS nageurs-sauveteurs -comme tous les autres policiers présents à 100%- pour sécuriser les compétitions et les sites olympiques. 300 agents en moins qu'il a fallu remplacer sur les plages.

"La Société nationale de sauvetage en mer (SNSM) a informé la Ville que, en raison des activités intenses prévues pendant l'été 2024, notamment la mobilisation pour les Jeux olympiques, il leur serait impossible de mettre à disposition des sauveteurs pour la plage de Vern", écrit le maire de Vern-sur-Seiche dans un communiqué.

Des CRS nageurs-sauveteurs absents des plages

Ces impératifs pour l'été 2024 liés à la réquisition des CRS ne sont pas nouveaux, mais ils ont viré au casse-tête pour les maires de France concernés par cette mesure. En 2022, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin annonçait que les CRS nageurs-sauveteurs ne pourraient pas être déployés sur les plages lors des Jeux olympiques. "Il s'agit d'une mission supplémentaire, qui n'est pas normalement dévolue à l'État", souligne-t-on du côté de Beauvau. Cette mission fait en effet partie des prérogatives de maires qui doivent veiller à la présence suffisante de postes de surveillance et au recrutement de maître-nageurs sauveteurs.

Chaque année, c'est d'ailleurs un peu la grande interrogation. Le ministère de l'Intérieur mettra-t-il à disposition des maires les quelque 300 CRS spécialisés dans la surveillance et le sauvetage? Tous les ans, ou presque, la mission est finalement maintenue. Pour le plus grand plaisir des agents eux-mêmes. "À la fois, on sauve des vies mais on est aussi policier", relève Thierry Clair, secrétaire national du syndicat UNSA police. "Le sauvetage, la surveillance, l'aide, l'assistance, c'est un autre aspect du métier qu'on sait bien faire. C'est une vitrine pour la maison CRS."

En 2022, par exemple, uniquement dans le Sud-Ouest, ces policiers habilités ont secouru plus de 1.000 nageurs mais aussi constaté 97 infractions de droit commun, interpellé 31 personnes et dressé 464 contraventions.

"C'est un boulot prenant, nos collègues ne sont pas tranquilles sous le parasol", insiste Thierry Clair.

Une hausse des dépenses pour les communes

"C'est une mauvais année à passer pour nous", déplore Laurent Peyrondet, le maire de Lacanau (Gironde). Comme dans les autres communes, l'élu a dû plancher sur d'autres solutions pour que les plages de sa ville soient surveillées cet été 2024. "Il a fallu recruter 300 sauveteurs", note-t-il. Si l'accueil des CRS nageurs-sauveteurs à un coût pour les mairies qui prennent en charge notamment les hébergements, les frais de surveillance seront bien plus élevés cette année et s'élèveront au global à 650.000 euros pour toute la saison à Lacanau.

L'an dernier, les communes avaient dû faire dans l'urgence alors que les CRS nageurs-sauveteurs avaient été débranchés de leurs missions sur les plages pour venir soutenir leurs collègues mobilisés sur les émeutes urbaines liées à la mort du jeune Nahel.

"Cette année les maires se sont organisés, davantage de jeunes ont été formés, les élus ont fait appel aux associations de sauveteurs côtiers sur les territoires", relève la députée sortante de Gironde Sophie Panonacle.

Sur tout le littoral, des nageurs-sauveteurs de la SNSM ont été sollicités. À Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), par exemple, ils seront 42. Mais leur nombre reste insuffisant. Ils seront par exemple absents de la plage de Mers-les Bains (Somme), comme le relève France Bleu. La baignade sera toutefois surveillée grâce au concours des sapeurs-pompiers du département. À Leucate (Aude), cela fait plusieurs années qu'on ne se pose plus cette question de la sécurisation des plages, faisant appel tous les ans aux pompiers. La première ville de France à avoir fait ce choix.

Mais à Vern-sur-Seiche impossible de recourir à la même solution. "Afin d'assurer la surveillance de la plage, la Ville a entrepris plusieurs démarches. (...) Des tentatives de recrutement de sauveteurs ont été effectuées en direct. Malheureusement, malgré des offres publiées et des candidatures reçues, aucun candidat n'a été trouvé pour assumer pleinement ce rôle crucial", regrette le maire de la commune.

Qui pour gérer les actes de délinquance?

Quinze députés, dont Sophie Panonacle, ont adressé au mois de février un courrier au ministre de l'Intérieur pour réclamer "un dispositif adapté" pour l'été 2024. "On avait imaginé un dispositif adapté avec au moins un chef de poste et un adjoint appartenant aux CRS nageurs-sauveteurs. Ces derniers ont les pouvoirs de police que les nageurs-sauveteurs n'ont pas", explique la députée sortante. Aucune réponse n'a été apportée à cette lettre.

Le maire de Lacanau, comme les autres édiles, rassure: "On sera en sécurité sur les plages." En tout cas concernant la baignade. Reste les problèmes de délinquance sur les plages, comme les vols de téléphone, les altercations, les agressions sexuelles, que pouvaient gérer les CRS en plus de leurs missions de surveillance. D'autant que le littoral français devrait aussi profiter de l'affluence touristique liée aux Jeux olympiques.

Dans la commune girondine, en l'absence des CRS nageurs-sauveteurs, "il n'y aura pas de police notamment sur les plages urbaines", relève le maire Laurent Peyrondet. La police municipale sera mobilisée à 100%, comme chaque année, mais pour faire face à l'afflux de touristes dans la station balnéaire, et son lot d'incivilités et de petite délinquance.

Du côté de Beauvau, on annonce plus de 14.000 policiers et gendarmes supplémentaires par rapport à l'an dernier dans tous les départements durant l'été. "Ces policiers et gendarmes garantiront un niveau inédit de sécurité sur nos plages, lieux de villégiatures ou sites touristiques", promet-on au ministère de l'Intérieur.

Gérald Darmanin a également rassuré: en 2025, les CRS nageurs-sauveteurs seront à nouveau sur les plages.

Article original publié sur RMC Sport