"J'ai vécu avec des acteurs": le fils de Monique Olivier témoigne pour décrire "le vrai visage" de sa mère

"Je suis le fruit d’un accident, le fruit d’une rencontre commerciale, qu’elle ne dise pas qu’elle a de l’amour pour moi." Selim Fourniret vient d'achever son témoignage devant la cour d'assises des Hauts-de-Seine qui juge sa mère Monique Olivier. Pendant près de trois heures, il est revenu sur son enfance entre son père "autoritaire" et une mère "aimante", des parents qu'il n'a "jamais suspectée" des pires crimes. Une intervention qu'il a voulue surtout pour les familles "pour qu'elle puisse faire leur deuil".

Selim Fourniret, qui a changé de nom pour prendre le patronyme de sa mère, ne veut plus être associé à ses parents. Demandant un report de son audition, il lui a été accordé un témoignage par visioconférence. Selim Fourniret voulait un huis clos partiel, refusé, il apparaît donc sous une fausse perruque gris bleu, portant de fines lunettes, et arborant une fausse barbe.

"Tu ressembles beaucoup à ton père comme ça", l'invective Monique Olivier, peu encline à lui faire de déclarations de mère à fils. "Montre-le toi-même, enlève ta perruque et ta fausse barbe."

Mère "aimante", père "autoritaire"

Pendant près de trois heures, Selim Fourniret a voulu montrer le "vrai visage" de celle qu'il n'appelle plus "maman". De ses quinze années à ses côtés dans son enfance, il se souvient d'une "mère aimante". "Nous étions bien elle et moi, nous étions bien, dit le jeune homme aujourd'hui âgé de 35 ans. Pour moi c’était maman, un enfant aime sa maman. Elle était aimante, elle m’aidait."

De son père, les souvenirs sont moins positifs. Michel Fourniret était "autoritaire", jamais violent physiquement, parfois verbalement. "Il avait des paroles dures, il n'était pas aimant, il ne jouait pas avec moi. Mais pour moi, à l’époque, c’était papa", énonce-t-il, mains dans les poches, recroquevillé sur sa chaise d'une salle du tribunal judiciaire de Nice. "C’était distant, je n’avais pas d’affect pour lui. Il était autoritaire. C’est pas que j’avais peur de lui, mais je le respectais en tant que figure paternelle."

À 14 ans et demi, en 2003, Selim Fourniret voit son père partir en prison. "Monique vient me chercher à l’école, sur le retour elle me dit 'papa n’est pas là, il est parti'. Je ne pose pas de question, je me dis 'tant mieux, cool'. Quand nous arrivons devant la maison il y avait des véhicules de police, je pose pas de questions. Monique était anxieuse et stressée." Pendant un an, il va vivre seul avec sa mère, une période heureuse.

"J'ai vécu avec 15 ans avec des acteurs"

L'adolescent n'interroge pas sa mère sur les faits reprochés à son père, dit-il. Il voit des liasses de billets à leur domicile, il pense à un braquage. Il voit sa mère enchaîner les convocations devant les enquêteurs - Monique Olivier sera entendue 120 fois en un an - Selim Fourniret ne dit pas plus s'interroger. Puis en 2004, elle implique Michel Fourniret dans six meurtres. Selim Fourniret a 15 ans.

"Tout ce que je sais, c’est qu’un jour elle est partie à une convocation, qu’elle n’est pas rentrée. Que je suis resté seul à la maison pendant deux jours peut-être. Mon oncle est venu me chercher et il m’a expliqué. Je la voyais en tant que maman, je la voyais pas en tant que complice, qu'aide de Michel Fourniret", regrette-t-il.

Lorsque Selim Fourniret découvre les crimes de ses parents, il est "écœuré" par le "vrai visage" de sa mère qu'il qualifie désormais de "manipulatrice". "Pour moi c’était pas une victime, une complice", insiste-t-il devant la cour d'assises, évoquant "le pacte" conclut entre Michel Fourniret et Monique Olivier lors de leurs échanges épistolaires au début de leur rencontre. "Elle avait conscience de ce qui se passait, elle a signé", déplore-t-il. Depuis, il n'a plus pris contact avec elle.

Selim Fourniret a été utilisé comme appât à son insu par Michel Fourniret et Monique Olivier. "Pendant 15 ans, j'ai vécu avec des acteurs, devant moi ils ne parlaient pas de ce qu’ils avaient fait, c’était acteur papa, acteur maman", poursuit Selim Fourniret. Son témoignage était d'autant plus attendu qu'il était adolescent au moment du dernier meurtre du couple diabolique, celui d'Estelle Mouzin. Une ancienne co-détenue de Monique Olivier a raconté que cette dernière lui avait confié que Selim avait aperçu la petite fille de neuf ans quand elle était séquestrée à leur domicile.

"Je n'ai jamais vu la petite fille", assure-t-il. "Je ne remets pas en cause le témoignage mais je n'ai pas de souvenir."

"Je l'aime toujours"

De ce témoignage, on ressent une certaine culpabilité. "J’aimerais bien me rappeler et en même temps j’aimerais bien oublier", souffle-t-il. Selim Fourniret a bien tenté des méthodes pour "révéler des souvenirs enfouis" et donner des réponses aux familles. "Régulièrement j’essaie de repenser à cette période passée pour apporter des éléments de réponse aux proches mais rien ne me revient", explique-t-il.

Alors Selim Fourniret implore "Monique" ou la "Monique". "Dehors personne ne t’attend, qu’est-ce que tu as caché? N’essaie pas de protéger tes enfants, on est grand", lui lance-t-il. "Tu n’as pas à me faire la morale", rétorque Monique Olivier, sévèrement. Avant de se radoucir et enfin, peut-être, faire apparaître des sentiments. "Il ne m’aime plus mais moi je sais que je l’aime toujours", souffle Monique Olivier qui n'a pas quitté des yeux son fils pendant près de trois heures.

"Maman peut avoir de l’éloquence (...) c’est une mère, elle sait ce que c’est d’avoir des enfants et de les aimer", tente Selim Fourniret dans un dernier espoir d'obtenir la vérité sur les crimes commis. "Vous nous raconterez?", demande un avocat. L'accusée, qui sera entendue jeudi sur les faits concernant l'enlèvement d'Estelle Mouzin, répond par l'affirmative.

Article original publié sur BFMTV.com