Israël : les appels au boycott contre Carrefour, McDo et TPMP sont-ils légaux ?

Les appels au boycott sur fond de guerre entre Israël et le Hamas se multiplient. Mais sont-ils légaux ?

En 2021, Puma avait déjà été ciblée par un appel au boycott à Londres. (Photo by Thomas Krych/SOPA Images/LightRocket via Getty Images)

Liberté d'expression ou provocation à la discrimination ? Des appels au boycott circulent sur les réseaux sociaux depuis l'offensive menée par le Hamas le 7 octobre contre Israël. Des marques, comme Carrefour ou McDonald's, ont été ciblées pour leur soutien à l'armée israélienne ou pour leur rôle dans la colonisation. Plus récemment, plusieurs internautes ont appelé à ne plus regarder TPMP, l'émission de Cyril Hanouna, dont ils regrettent la prise de position sur le conflit entre Israël et le Hamas. Ces appels au boycott qui sont de plus en plus nombreux sont-ils légaux ? Explications.

Que dit la loi ?

En France, l'appel au boycott est considéré comme illégal s'il est basé sur la nationalité, l'ethnie, la religion ou d'autres critères discriminatoires. Mais la frontière entre la liberté d'expression et la provocation à la discrimination semble plus indécise que jamais. En 2015, la cour d’appel de Colmar a condamné 14 militants du mouvement "Boycott, désinvestissement, sanctions" (BDS) pour avoir participé à des manifestations dans un magasin Carrefour "appelant au boycott des produits en provenance d’Israël ".

Cet appel au boycott des produits israéliens avait été jugé illégal en vertu de la loi sur la liberté de la presse de 1881, qui interdit l'incitation à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.

La France condamnée par la CEDH

Retournement de situation en juin 2020. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a estimé que cette condamnation violait la liberté d’expression des militants. "Par nature, le discours politique est souvent virulent et source de polémiques. Il n’en demeure pas moins d’intérêt public, sauf s’il dégénère en un appel à la violence, à la haine ou à l’intolérance", soulignait la CEDH dans un communiqué.

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"Les actions et les propos reprochés aux requérants relevaient de l’expression politique et militante et concernaient un sujet d’intérêt général et leur condamnation ne reposait pas sur des motifs pertinents et suffisants", argumentait la CEDH. Selon la décision de la Cour européenne des droits de l'homme, la France a dû verser 7 500 euros à chacun des militants.

"Cette décision de la Cour européenne marque un tournant dans une période où, en France, un certain nombre de restrictions à la liberté d’expression ont été apportées, déclarait Antoine Comte, l’avocat du BDS, au journal Le Monde. Cela restitue aux citoyens la possibilité de débattre de questions nationales ou internationales et d’en tirer si besoin des appels au boycott", poursuivait-il. Cette décision de la CEDH pourrait encourager une réévaluation de la légalité des appels au boycott car des zones d'ombre persistent encore aujourd'hui à ce sujet.

VIDÉO - Nouvelle journée de manifestation en soutien à Israël et la Palestine en Europe