En Iran, incendie et violences dans la prison d’Evine, à Téhéran

IRAN - Un incendie et des affrontements ont éclaté ce samedi 15 octobre au soir, à la prison d’Evine, à Téhéran, au terme d’une nouvelle journée de manifestations contre le pouvoir en place en Iran, alors que le mouvement de contestation déclenché par la mort de Mahsa Amini se poursuit. Selon l’Autorité judiciaire, au moins quatre détenus sont décédés à la suite de ces débordements, du fait de l’inhalation de fumée.

Toujours selon le site internet de l’Autorité judiciaire Mizan Online, 61 autres ont été blessés, parmi lesquels quatre se trouvent dans un « état grave ».

Comme vous pouvez le voir dans notre vidéo en tête d’article, des coups de feu et le bruit d’explosions pouvaient aussi être entendus durant cet incendie survenu dans un vaste complexe pénitentiaire du nord de Téhéran, d’où une grosse fumée se dégageait. Dans un premier bilan dressé par un pompier sur place et cité par l’agence officielle Irna, « huit personnes ont été blessées dans cet incendie ».

Le feu, maîtrisé selon les autorités, s’est produit alors que les manifestations antigouvernementales sont entrées dans leur cinquième semaine. À Téhéran, les autorités ont notamment accusé des « voyous d’avoir incendié un entrepôt de vêtements », a indiqué Irna. Par ailleurs, les troubles à la prison « n’ont rien à voir » avec les manifestations dans le pays, selon elle.

Inquiétudes autour de la sécurité des détenus

Cependant, la prison d’Evine est connue pour ses mauvais traitements des prisonniers politiques. Des centaines des personnes arrêtées lors des protestations y auraient été envoyées, et des personnalités étrangères y sont également gardées captives. Aussi, selon des ONG, les manifestations ont eu lieu en solidarité avec les détenus d’Evine, après une journée de protestations sous le slogan « Le début de la fin ! » du pouvoir. Des cris de « Mort au dictateur » étaient également audibles en arrière-plan d’une vidéo postée par le média en ligne 1500tasvir, qui recense les violations des droits humains.

« Des prisonniers, y compris des détenus politiques, sont complètement sans défense » à Evine, a déclaré Hadi Ghaemi, directeur du Centre pour les droits de l’Homme en Iran (CHRI) basé à New York. De son coté, Article 19, une ONG qui lutte pour la liberté d’expression a souligné être « extrêmement inquiète pour la sécurité des prisonniers ».

L’universitaire franco-iranienne Fariba Adelkhah, arrêtée en juin 2019, et l’Américain Siamak Namazi sont notamment détenus à Evine. Le groupe de soutien de Fariba Adelkhah a affirmé avoir eu des nouvelles « rassurantes ». L’avocat américain de Siamak Namazi a déclaré que ce dernier avait parlé à sa famille et qu’il avait « été transféré dans une zone sécurisée de la prison ». « L’Iran est pleinement responsable de la sûreté de nos citoyens détenus à tort, qui doivent être libérés immédiatement », a tweeté Ned Price, porte-parole de la diplomatie des États-Unis.

Une centaine de morts

Depuis la mort de Mahsa Amini le 16 septembre, trois jours après son arrestation pour avoir, selon la police des mœurs à Téhéran, enfreint le strict code vestimentaire de la République islamique, les Iraniennes ont été le fer de lance des manifestations. Criant des slogans anti-pouvoir, enlevant et brûlant leur foulard, elles tiennent tête aux forces de sécurité dans les rues.

Des commerçants se sont mis en grève à Saghez, la ville natale de Mahsa Amini dans la province du Kurdistan, au nord-ouest du pays, ainsi qu’à Mahabad, plus au nord, selon 1500tasvir. « Des écolières dans le village de Ney à Marivan (ouest) ont provoqué des feux dans la rue et crié des chants antigouvernementaux », a indiqué Hengaw, un groupe de défense des droits des Kurdes d’Iran basé en Norvège.

Depuis le début de la répression, au moins 108 personnes ont été tuées, selon l’ONG Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo. Amnesty International a affirmé qu’au moins 23 enfants de 11 à 17 ans avaient été « tués par les forces de sécurité ». Et des centaines de personnes ont été arrêtées. Les manifestations en Iran sont les plus importantes depuis celles de 2019 contre la hausse du prix de l’essence dans ce pays riche en pétrole. À l’époque, plus de 300 manifestants avaient été tués.

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