Iran: le footballeur phare Voria Ghafouri arrêté pour "propagande contre le système"

Le footballeur iranien Voria Ghafouri avec Esteghlal, à Djeddah (Arabie saoudite) le 27 avril 2021 - AFP
Le footballeur iranien Voria Ghafouri avec Esteghlal, à Djeddah (Arabie saoudite) le 27 avril 2021 - AFP

Les autorités iraniennes ont arrêté jeudi le footballeur international Voria Ghafouri (35 ans), accusé d'avoir "insulté et sali la réputation de l'équipe nationale et de s'être livré à de la propagande" contre l'État, a rapporté l'agence de presse iranienne Fars. Il a été arrêté après une séance d'entraînement du Foolad Khouzistan FC sur décision de l'autorité judiciaire, selon la même source.

Le footballeur originaire de Sanandadj, la capitale de la province du Kurdistan iranien, a posté une photo sur son compte Instagram portant l'habit traditionnel kurde.

Contraint de quitter l'équipe la plus célèbre du pays

Cette interpellation s'inscrit dans le contexte de la répression des manifestations en Iran qui, depuis plus de deux mois, a fait au moins 416 morts, dont 51 enfants, selon l'ONG Iran Human Rights (IHR) basée en Norvège. Cette vague de contestation - née de revendications pour les femmes après la mort de Mahsa Amini arrêtée pour avoir mal porté le voile islamique et qui se sont transformées en contestation du pouvoir - est sans précédent depuis la Révolution islamique de 1979.

Apparu à 26 reprises avec la sélection nationale d'Iran, Vouria Ghafouri a toujours évolué dans son pays, où il jouit d'une grande notoriété (3,3 millions d'abonnés sur Instagram). Sa carrière a débuté en 2007 au Pas Hamadan. En juin 2022, il a affirmé qu'Esteghlal, club où il évoluait depuis 2016, avait refusé de lui proposer un nouveau contrat en raison de ses critiques contre le pouvoir.

Les joueurs iraniens au Mondial n'ont pas chanté l'hymne

Au Qatar pour la Coupe du monde 2022, les onze joueurs iraniens se sont abstenus de chanter leur hymne national avant le coup d'envoi de leur premier match contre l'Angleterre (défaite 6-2). Le capitaine Alireza Jahanbakhsh avait expliqué que les joueurs décideraient "collectivement" de chanter ou non l'hymne national en signe de soutien aux victimes des manifestations durement réprimées.

Parmi les manifestants et les opposants au régime de la République islamique, beaucoup ont exprimé leur dépit devant ce qu'ils considèrent comme le manque d'engagement de leurs footballeurs, et leur colère quand ils avaient été reçus avant leur départ pour le Qatar par le président ultraconservateur Ebrahim Raïssi.

Pendant l'hymne, les caméras ont brièvement montré le visage d'une spectatrice d'une cinquantaine d'années, voile blanc sur la tête, visage baigné de larmes. Les joueurs, eux, ont gardé le silence, le visage totalement impassible. Diminué physiquement, la star de l'équipe Sardar Azmoun, qui avait dénoncé la répression sur les réseaux sociaux, est entré en jeu en seconde période.

Ali Karimi poursuivi pour son activisme

Les joueurs n'ont manifesté aucune joie sur leurs deux buts. Mais s'agissait-il d'un message politique ou plus sûrement du simple dépit devant une déroute sportive, la pire dans l'histoire du foot iranien depuis son premier Mondial en 1978 (4-1 face au Pérou). L'attaquant Alireza Jahanbakhsh avait déclaré mercredi que célébrer ou pas un but relèverait d'un choix "personnel".

Au-delà du terrain, de nombreux sportifs ont écrit des messages de soutien aux protestataires sur les réseaux sociaux. L'ancien joueur du Bayern Munich, Ali Karimi, qui vit à l'étranger et dont la maison a été confisquée, est l'un des plus actifs. Il a publiquement décliné l'invitation des organisateurs du Mondial à se rendre au Qatar, tout comme la légende du football iranien Ali Daei.

Article original publié sur BFMTV.com