Iran : Elnaz Rekabi accueillie comme une héroïne à Téhéran

Une foule nombreuse massée devant l’aéroport de Téhéran attendait l’athlète iranienne Elnaz Rekabi pour son retour à domicile, trois jours après les images d’elle sans voile lors d’une compétition d’escalade à Séoul.
Capture d’écran Twitter Une foule nombreuse massée devant l’aéroport de Téhéran attendait l’athlète iranienne Elnaz Rekabi pour son retour à domicile, trois jours après les images d’elle sans voile lors d’une compétition d’escalade à Séoul.

IRAN - De l’inquiétude à la joie. Ce mercredi 19 octobre, la sportive iranienne Elnaz Rekabi a été accueillie par une foule en liesse lors de son arrivée à l’aéroport de Téhéran, trois jours après avoir participé aux championnats d’Asie d’escalade en Corée du Sud sans porter le voile, comme l’exige pourtant la République islamique d’Iran.

Et si la portée de son geste avait laissé craindre de lourdes représailles du régime iranien à son retour au pays, c’est devant un public nombreux et acquis à sa cause que la jeune femme est finalement arrivée. Également accueillie par sa famille, Elnaz Rekabi était entourée d’une foule de supporters qui ont tous applaudi la sportive. Des « Elnaz est une héroïne » ont même résonné dans le hall de l’aéroport pour celle qui est en passe de devenir l’un des nouveaux visages de la contestation populaire en Iran, à l’instar de la jeune Mahsa Amini.

De quoi apaiser les craintes ? La veille des proches de la grimpeuse avaient expliqué à la BBC en persan ne pas avoir réussi à la joindre et craignant que son passeport et son téléphone lui aient été confisqués, laissant même craindre un emprisonnement en Iran.

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Pour autant, la grimpeuse de 33 ans n’a pas changé sa version des faits. Après son post Instagram de la veille expliquant que son voile s’était détaché « par inadvertance » et dans la précipitation durant la compétition à Séoul -ce que beaucoup ont remis en doute-, elle a réitéré cette version devant les médias lors de son arrivée à Téhéran. Ajoutant toutefois qu’elle se sentait « tendue » à l’idée de rentrer en Iran.

L’agence de presse iranienne semi-officielle Tasnm a également publié mardi une courte interview de Davoud Rekabi, présenté comme le frère de l’athlète, qui assure qu’il n’était pas question de défier le régime iranien.

Nouveau visage de la lutte

Écrit sous la contrainte ou non, le message posté sur Instagram par la sportive n’a pas changé le regard porté par ceux qui l’ont accueilli comme un symbole de la résistance face à l’oppression du pouvoir iranien.

D’autant que si comme le souligne, le rédacteur en chef de la BBC pour le Moyen-Orient, Sebastian Usher, cette apparition publique est de nature à rassurer, la destination prise par Elnaz Rekabi était inconnue.

Pour Mahmood Amiry-Moghaddam, directeur du groupe Iran Human Rights basé en Norvège et cité par NBC, il est fort possible que le message de Rekabi ait été écrit sous la contrainte : « Ils iront très loin pour donner l’exemple aux autres athlètes et aux jeunes filles en général, afin que ce genre de désobéissance ne se reproduise plus. Leur règne est basé sur la peur. Ce qu’Elnaz a fait contribue à briser la peur, et les autorités ne peuvent pas le tolérer. Il s’agit de la survie du système ».

À ce jour, Elnaz Rekabi est la deuxième Iranienne connue pour avoir participé non voilée à une compétition sportive depuis l’avènement de la République islamique en 1979, après la boxeuse Sadaf Khadem en 2019, exilée en France depuis.

Un geste historique et symbolique (peut-être malgré elle) qui s’inscrit dans un contexte très tendu en Iran. Le pays est en effet secoué par un mouvement de contestation depuis le 16 septembre, déclenché par la mort de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans décédée trois jours après son arrestation par la police des mœurs à Téhéran pour avoir, selon celle-ci, enfreint le code vestimentaire strict de la République islamique pour les femmes.

Depuis, des dizaines de personnes, principalement des manifestants mais aussi des membres des forces de sécurité, ont été tuées lors des manifestations. Des centaines d’autres, dont des femmes, ont été arrêtées pour avoir osé retirer, voire brûler leur hijab en signe de protestation pour plus de libertés, notamment pour les droits des femmes.

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