« Hogwarts Legacy » : les communautés LGBT tiraillées par ce jeu vidéo dans l’univers d’Harry Potter

La sortie prochaine du jeu vidéo « Hogwarts Legacy, l’Héritage de Poudlard » provoque de vifs débats au sein de la communauté de fans du célèbre sorcier à lunettes.
Capture d’écran Youtube La sortie prochaine du jeu vidéo « Hogwarts Legacy, l’Héritage de Poudlard » provoque de vifs débats au sein de la communauté de fans du célèbre sorcier à lunettes.

JEUX VIDÉO - Plus de 15 ans après la fin du phénomène littéraire, la bataille de Poudlard fait rage à nouveau. À quelques jours de la sortie tant attendue d’un premier grand jeu vidéo Harry Potter en monde ouvert, les communautés de fans du célèbre sorcier anglais se divisent plus que jamais.

Hogwarts Legacy : L’Héritage de Poudlard sortira en France le 10 février sur PS5, Xbox Series S, Xbox Series X et PC. Ce nouveau jeu centré sur l’univers magique de J.K.. Rowling permet d’incarner un élève de Poudlard, un rêve sur lequel a fantasmé plus d’un amateur de la saga. Pourtant, une frange entière de fans semble aujourd’hui vouloir tout faire pour enrayer la sortie de ce jeu, à grand renfort d’appels au boycott et d’actions pour convaincre de ne pas l’acheter. Et ce malgré l’attachement de ces derniers à Harry Potter.

De l’écrivaine adulée à l’autrice problématique

Adulée pour sa série de livre et l’héritage que celle-ci a laissé dans l’enfance de nombreux lecteurs, l’écrivaine britannique s’est depuis mis à dos une partie de sa communauté, sensible aux questions de représentation et du respect des personnes transgenres. Depuis 2019, plusieurs sorties médiatiques transphobes de l’écrivaine de 57 ans ont conduit ses fans à tourner le dos à la créatrice du héros à la cicatrice en forme d’éclair. À l’image de féministes radicales dites « Terf » (pour « trans-exclusionary radical feminist »), l’autrice considère que les femmes trans ne sont pas de « vraies » femmes.

L’exaspération générale des fans à l’égard de ces propos qui nient les droits des personnes trans a même poussé les pratiquants du Quidditch à changer le nom de cette discipline sportive en Quadball, pour éviter tout lien avec J.K. Rowling dans le monde des moldus.

Et face aux critiques des fans sur ses prises de position clivantes, J.K. Rowling ne semble pas vouloir changer quoique ce soit, comme en atteste l’une de ses dernières déclarations polémique, en réponse à l’éloignement de nombreux fans de ses romans. « Comment dormez-vous la nuit, tout en en sachant que vous avez perdu toute une partie du public qui achetait vos livres ? », avait ainsi demandé une internaute sur Twitter. Réponse de l’intéressée : « Je lis mes chèques de droits d’auteur les plus récents et je trouve que la douleur s’en va assez rapidement. »

De quoi dégoûter plus d’un fan de Harry Potter de continuer à suivre les sorties du « Wizarding World », l’univers étendu imaginé par J.K. Rowling pour faire fructifier la franchise Harry Potter au-delà des livres originaux et de leurs adaptations sur grand écran. Cet univers étendu passe par exemple par la franchise de films Les Animaux fantastiques... mais également par le jeu vidéo Hogwarts Legacy. Une bonne partie des recettes du jeu reviendront de droit à l’autrice, avec laquelle le studio Portkey Games assure avoir « collaboré étroitement (...) sur tous les aspects du jeu ».

Appel au boycott

La sortie du jeu vidéo, où chaque amateur de l’univers Harry Potter pourra lui-même incarner un personnage personnalisable et évoluer librement dans les couloirs de Poudlard, pose donc un cruel dilemme pour les Potterheads, le nom donné à la communauté de fans de l’univers.

Et si certains sont allés jusqu’à effacer le nom de l’écrivaine de ses propres livres, blessés par ses commentaires transphobes, la sortie de Hogwarts Legacy pousse désormais une partie du public, notamment LGBT, à demander le boycott pur et simple de ce jeu vidéo pour ne pas participer, même indirectement aux combats que défend l’autrice. Son dernier ouvrage en est d’ailleurs un bon exemple.

Mais même ces appels au boycott divisent au sein du fandom Harry Potter, alors que certains cherchent à culpabiliser les joueurs qui achèteront le jeu. Le Washington Post cite notamment le témoignage d’un fan transgenre de la saga littéraire, qui a fait le choix de continuer à vivre son amour de la franchise, en dépit des déclarations de l’autrice et des probables accusations de transphobie pour avoir précommandé le jeu.

« Elle ne gouverne pas le monde sorcier ; c’était juste sa création », estime ainsi Mitchell Burdett, 23 ans. « Ce que nous, en tant que fans, lecteurs, observateurs, joueurs, décidons de faire avec ce monde est entièrement séparé d’elle ou de toute croyance qu’elle pourrait avoir ».

L’un des autres arguments avancés par les détracteurs de J.K. Rowling, par-delà les questions de transphobie : le supposé antisémitisme sous-jacent entourant les antagonistes du scénario de ce jeu. En cause ? L’emprunt à des clichés pour représenter les Gobelins, des êtres froids et cupides, au nez crochu, travaillant dans la banque Gringotts. Une étoile de David est d’ailleurs visible dès le premier film, dans la fameuse banque des gobelins. Des détails troublants récemment mis en lumière par le magazine Forbes, et qui semblent persister dans Hogwart Legacy.

Depuis de nombreuses années, les fans de Harry Potter ont remarqué des ressemblances troublantes entre les gobelins de l’univers Harry Potter et les atrributs utilisés par l’antismétisme pour décrire les Juifs. Comme dans le premier film Harry Potter, où une étoile de David se cache dans le décor de la banque Gringotts.

Une communauté tiraillée

Un malaise persiste donc avant la sortie du jeu, l’un des plus attendus de l’année 2023. Et les exemples sont encore nombreux : le site ResetEra, l’un des plus gros forums de jeu vidéo au monde – très populaire dans le monde anglophone – a par exemple fait le choix de bannir les discussions autour de Hogwarts Legacy de son site, en raison de l’activisme de l’autrice sur les questions de genre.

« Elle pousse activement, de par sa position de personne riche et célèbre, à une législation qui nuira aux personnes trans. Elle utilise l’influence et l’argent acquis grâce à son succès avec Harry Potter pour promouvoir une législation transphobe. Par conséquent, l’équipe a décidé d’étendre l’interdiction de la promotion du jeu Poudlard au jeu lui-même », indiquait lundi 23 janvier ResetEra sur son site.

Sebastian Croft, acteur dans la série LGBT Heartstopper, qui prête sa voix à un personnage dans le jeu vidéo, a été contraint de publier des excuses sur Twitter, face au tollé provoqué par l’annonce de sa participation au casting. Lui-même fan de l’univers des sorciers, il s’est excusé « pour tous ceux qui ont été blessés par cette annonce ». L’acteur s’est justifié en expliquant qu’au moment de son casting, trois ans plus tôt, il n’était pas encore « au courant des opinions de J.K. Rowling ».

« Je crois de tout cœur que les femmes trans sont des femmes et que les hommes trans sont des hommes », a-t-il clamé en référence à de précédentes déclarations de « Celle-Dont-On-Ne-Doit-Pas/Plus-Prononcer-Le-Nom », sans oublier de rappeler qu’« il n’y a pas de LGB sans le T ».

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