Harcèlement en ligne d'Eddy de Pretto: trois à six mois de prison avec sursis pour 11 cyberharceleurs

Le chanteur Eddy de Pretto. - Loic Venance
Le chanteur Eddy de Pretto. - Loic Venance

Lors du procès en octobre dernier, Eddy de Pretto n'avait pas voulu regarder ses harceleurs pour "ne pas croiser leur regard de violence et de haine." Le tribunal correctionnel de Paris a condamné ce lundi 11 personnes à des peines de trois à six mois de prison avec sursis pour le harcèlement en ligne dont a été victime le chanteur en juin 2021 après avoir chanté à l'église Saint-Eustache, dans la capitale.

"Crève en enfer sale chien et ce n'est qu'une question de temps", "la hache pour toi", "le manque de respect de la maison de Dieu, c'est coupage de tête, autant de messages de menaces avaient été envoyés dans les jours suivant cette prestation. Des messages également à caractère homophobe lui avaient été adressés. "Gigantesque fiotte", "truc de dégénérés", "bouffeur de queue" avaient été postés via les réseaux sociaux.

Six relaxes prononcées

Six autres personnes ont été relaxés par le tribunal correctionnel de Paris. Le tribunal s'est en effet heurté à démontrer le caractère répétitif des messages adressés au chanteur, nécessaire pour caractériser l'infraction de harcèlement, et le fait que les auteurs de ces messages en avait conscience.

Par ailleurs, "l'analyse littérale des mots dont il a fait usage ne peuvent caractériser des menaces de mort, en ce que si le message est certes menaçant, il n'use pas d'un vocable mortifère", note les juges dans leur jugement que BFMTV a pu consulter au sujet de l'auteur du message "Nous seront là à chaque date, pour te rappeler que l'armée de Dieu ne laisse pas ce genre de blasphème impuni".

"Je me félicite de la décision du tribunal, qui n’a fait qu’appliquer strictement le droit, réagit auprès de BFMTV Me Ian Knafou, dont le client a été relaxé. Ces relaxes sont un soulagement mais ne sauraient réparer l’immense préjudice pour ces jeunes accusés à tort pendant plusieurs mois."

Une prestation dans une église en juin 2021

En juin 2021, Eddy de Pretto s'est produit lors d'un concert en l'église Saint-Eustache, programmé par le prêtre de la paroisse. Il y interprète trois chansons dont À quoi bon?, un titre dans lequel il évoque la difficulté de concilier religion et homosexualité et qui contient le terme "sodomite".

"M'aimeras-tu quand même si je reste toujours tout aussi libre?", y chante Eddy de Pretto. "Je crois que je n'suis pas prêt pour obéir à ta Bible. Je sais ce qui te plaît, je crois que je n'ai pas lu les bons livres."

L'artiste relaie sa prestation sur son compte Instagram dans une story, ces photos ou vidéos disponibles pendant 24 heures. Sauf si celle-ci est repartagée sur d'autres comptes. C'est par ce biais que la majorité des 17 prévenus disent avoir eu connaissance de cette vidéo. Lors de l'audience, nombreux sont ceux à avoir estimé que cette prestation avait été ressentie comme un "blasphème".

"Je me suis senti humilié, c’est la maison de Dieu, a expliqué Jérémie, 24 ans. Le fait de parler de relations sexuelles dans une église, qu'elles soient hétérosexuelle ou homosexuelle, ça n’a pas sa place dans une église."

La défense avait notamment rejeté les accusations de harcèlement, estimant que leur client n'avait pas conscience que des milliers de messages avaient été envoyés. Certains ont d'ailleurs remis en cause la véracité sur certains des 3000 messages reçus par l'artiste, la qualité de l'enquête "décevante" ou l'intelligence artificielle d'Instagram.

"J'ai eu très peur"

Le 4 octobre dernier, Eddy de Pretto était venu raconter devant le tribunal correctionnel de Paris les conséquences des milliers de messages reçus après sa prestation à l'église Saint-Eustache.

"J’ai eu très très peur, je regardais tout le temps en bas de chez moi avant de sortir pour voir s’il n’y avait pas quelqu’un qui surveillait", a-t-il expliqué.

Lors de l'audience, le chanteur avait nié avoir voulu faire de la "provocation" avec cette performance. "Le jour où une église m’invite, je suis ravi qu’on puisse me recevoir, m’entendre et me tendre une main sur cette question: comment les homosexuels sont représentés dans l’Église", s'était-il défendu. Une question qu'il juge "cruciale".

Article original publié sur BFMTV.com