Retraites, immigration... Ce que le gouvernement prépare pour la rentrée

Ce que l’on sait du programme politique de la rentrée (Ici Emmanuel Macron avec plusieurs ministres, le 25 juillet 2022)

Entre l’examen du budget, un grand débat sur l’immigration ou le début attendu des concertations sur la réforme des retraites, le gouvernement prévoit un menu copieux.

POLITIQUE - Comme une mise en bouche. Parlementaires et ministres partent en vacances au terme de plusieurs semaines de débats houleux à l’Assemblée nationale et au Sénat. Avant de s’éparpiller aux quatre coins du pays, le gouvernement a dévoilé quelques pistes sur le menu qu’il entend présenter au Parlement à son retour. Copieux, il promet de nouveaux échanges corsés.

« Les hostilités démarreront à la rentrée, et personne ne semble vouloir voir le mur de crise qui est devant nous », résume un responsable de la majorité à l’AFP. Après la loi pouvoir d’achat, relativement consensuelle, Élisabeth Borne et Emmanuel Macron entendent effectivement entrer dans le vif de sujets potentiellement explosifs.

Outre le budget de l’État, un texte crucial à l’automne, ou le lancement de la réforme des retraites, l’exécutif veut remettre sur la table les sujets sensibles de l’asile et de l’immigration. Le tout, sans majorité absolue à l’Assemblée, et avec la volonté de « concerter » tous azimuts. Dans ce contexte, les deux chambres du Parlement vont attendre octobre pour se réunir – un mois après la traditionnelle rentrée — et laisser du temps aux discussions pour préparer les textes en amont.

Un débat éruptif sur l’immigration

C’est pour cela que Gérald Darmanin a annoncé, mercredi 3 août, dans les colonnes du Figaro, le report de son projet de loi sur l’immigration, au profit d’un grand débat sur la question à partir d’octobre et pour deux mois. Une façon de donner des gages aux oppositions ? Les mots du ministre de l’Intérieur laissent penser qu’il va davantage se tourner vers la droite que vers la gauche de l’hémicycle pour trouver des compromis et ficeler son texte.

Son projet doit effectivement permettre « une réforme profonde de l’organisation de l’asile », « une intégration bien plus exigeante des étrangers », « une réflexion sur le rapport entre immigration et économie » et « une lutte plus intraitable que jamais contre les étrangers délinquants. » Pour cela, le patron de la Place Beauvau propose, entre autres, de conditionner les titres de séjour à « l’obtention d’un certificat prouvant la maîtrise du français et l’acceptation des valeurs de la République », de supprimer des dispositions interdisant l’expulsion des étrangers délinquants ou de passer à 3 ans (contre 1 actuellement) la possibilité de placer en rétention ou d’assigner à résidence un étranger sur le fondement de son « obligation de quitter le territoire. » Ces pistes seront la base du fameux « grand débat ».

Avec quels résultats ? Les premières mesures avancées sont promptes à séduire la droite et l’extrême droite, désireuses de durcir l’immigration régulière. L’aile gauche de la majorité pourrait, en revanche, tordre le nez face à cette offensive. En 2018, c’est sur le texte « Asile et immigration » du gouvernement d’Édouard Philippe que la Macronie, plus divisée sur le régalien que sur le reste, avait connu ses premiers soubresauts.

Le budget, attention danger

En parallèle, octobre marquera également le coup d’envoi de l’examen des projets de budget 2023, de l’État et de la Sécurité sociale. Ce premier marathon budgétaire du quinquennat constitue une épreuve de force, faute de majorité absolue pour les macronistes à l’Assemblée... Et une épreuve du feu pour Gabriel Attal. Le (nouveau) ministre des Comptes Publics va devoir convaincre les oppositions de voter son plan, à l’heure où elles viennent – fait rare — de retoquer le budget « le projet de loi de règlement du budget 2021, une étape normalement banale de validation des comptes publics ».

« Le budget, c’est risqué, l’opposition ne le vote jamais », résume un cadre socialiste, cité par l’AFP. Les députés des Républicains qui ont soutenu le gouvernement sur le paquet pouvoir d’achat ne « le voteront pas », pense également un ministre, plutôt tenté de chercher l’abstention de la droite. Pas simple.

Gabriel Attal a donné quelques pistes sur l’exercice à venir, dans les colonnes des Échos, dimanche 7 août, avant de partir en congés. Au programme : une hausse « inédite » de l’enveloppe allouée à l’Éducation nationale (3,6 milliards d’euros en tout), une progression de 6,7 milliards d’euros pour l’Emploi, et de 6,1 milliards pour la Défense, l’Intérieur, la Justice et les Affaires étrangères.

En somme, beaucoup de « priorités » affichées et peu d’économies précises… Au grand dam de la droite, habituée à critiquer le gouvernement sur ses nouvelles dépenses. La gauche, elle, ne manquera pas de remettre la taxe sur les « superprofits » de groupes comme TotalEnergies ou CMA CGM, sur la table après le refus initial des troupes d’Emmanuel Macron. Les conclusions d’une « mission flash » sur le sujet sont attendues début octobre.

Réforme des retraites

De quoi augurer une rentrée déjà chargée. Et ce, sans compter sur le déploiement des énergies renouvelables, également au menu du Parlement pour cet automne, ou les projets attendus mais dont le gouvernement n’a pas encore dévoilé le calendrier. On peut notamment évoquer le texte sur la « sobriété énergétique », la réforme du travail (et de l’assurance chômage) promise par Emmanuel Macron ou, bien sûr, celle du système des retraites.

Aux dernières nouvelles, le président de la République vise une première entrée en vigueur à l’été 2023. C’est en tout cas ce qu’il a expliqué lors de son interview du 14 juillet sur TF1 et France 2. S’il veut appliquer sa nouvelle méthode basée sur le dialogue, sans renier son calendrier, les concertations devront être lancées avant l’hiver prochain. Dans ce contexte, le gouvernement ne manquera pas de garder un œil sur les éventuelles mobilisations sociales. Pour que le combat politique ne se déplace pas dans la rue. Pas simple, non plus.

Côté syndical, la CGT et Solidaires ont déjà appelé à « une journée de grève interprofessionnelle » le 29 septembre pour réclamer des hausses de salaires. Et les centrales se préparent à monter au front contre la fameuse réforme des retraites. L’automne, aussi, sera chaud.

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