« French Bukkake » : le procès retentissant sur la question des violences sexuelles dans le porno va bien avoir lieu

Les hommes, âgés de 29 à 61 ans, sont accusés de viols en réunion, traite d’êtres humains en bande organisée ou encore proxénétisme aggravé.

VIOLENCES SEXUELLES - Un procès de grande ampleur et qui marquera un précédent remarquable. Dix-sept hommes soupçonnés d’avoir pris part à un « système » de tournages pornographiques ayant servi de théâtre à des viols aggravés sur des dizaines de femmes seront prochainement jugés, a appris ce jeudi 31 août l’AFP, de source proche du dossier. Tous auraient commis des actes sexuels violents qui « s’enchaînaient par surprise » sur des actrices recrutées par ruse pour la plateforme « French Bukkake ».

Ces hommes, âgés de 29 à 61 ans, et qui sont dirigeant de la plateforme, associé, recruteur d’actrices ou acteurs seront jugés par la cour criminelle départementale de Paris pour plusieurs crimes et délits dont viols en réunion, traite d’êtres humains en bande organisée ou encore proxénétisme aggravé.

Actuellement, quatre des mis en cause sont déjà placés en détention provisoire. L’enquête évoque une cinquantaine de femmes identifiées, des victimes qui sont en moyenne âgées d’une vingtaine d’années et ciblées pour leur précarité. Une quarantaine d’entre elles et quatre associations, Les Effrontées, le Mouvement du Nid, Osez le féminisme et la Ligue des droits de l’Homme, sont parties civiles dans cette affaire.

Des personnages virtuels successifs

Ouverte en octobre 2020, l’information judiciaire s’est focalisée sur le « système » orchestré par Julien D., un Rémois de 42 ans qui sera jugé notamment pour avoir violé une trentaine de femmes. Il est accusé d’avoir incarné, entre 2013 et 2019, trois personnages virtuels successifs visant à appâter des jeunes femmes : une amie rassurante nommée Axelle Vercoutre, qui les persuadait de débuter dans l’escorting ; un dirigeant d’une agence soi-disant de luxe centrée sur cette activité qui les recrutait ; un prétendu client de cette agence qu’elles rencontraient ensuite pour un rapport tarifé.

Avec son personnage d’Axelle Vercoutre, il aurait notamment orienté les femmes vers des tournages où elles ont subi de nouveaux faits de viols aggravés. Le dirigeant du site « French Bukkake », le réalisateur surnommé Pascal OP, ainsi que son associé connu comme Mat Hadix sont accusés d’avoir bénéficié de ce système de recrutement. Ils auraient promis aux femmes une bonne rémunération, un bon traitement ainsi qu’une certaine discrétion avec une diffusion hors de France. Les films étaient ensuite diffusés via « French Bukkake ».

Pascal OP est aussi soupçonné de proxénétisme aggravé pour avoir permis à des clients, qui payaient un abonnement à sa plateforme ou qui proposaient leur appartement comme lieu de tournage, de participer à des vidéos.

Torture et barbarie

Dans l’enquête, nombre de plaignantes ont évoqué des tournages sous alcool et stupéfiants. « Nous avons été torturées », avait assuré à l’AFP l’une d’entre elles. « J’ai besoin aujourd’hui pour revivre, que la barbarie, la haine sexiste et raciste dont j’ai été victime, soit reconnues et punies. »

De nombreuses parties civiles ont en effet demandé à la justice de retenir les actes de torture, de barbarie et de racisme qui ont accompagné les viols sur les tournages. Mais les deux juges ont refusé. Les circonstances aggravantes de torture et de barbarie auraient pu mener le dossier à la cour d’assises et permis, selon maître Lorraine Questiaux, qui représente une victime, « un vrai débat, avec des jurés, pour le premier procès de crime contre l’humanité des femmes », ou selon maître Seydi Ba, également représentante d’une victime, « une audience d’intérêt public pour débattre sur les notions de viol et de consentement ».

De leur côté, la plupart des mis en cause ont contesté avoir eu connaissance du système Axelle Vercoutre et assuré que les femmes étaient consentantes. Maître Dylan Slama, avocat d’un acteur, espère avec ce futur procès pouvoir « enfin expliquer la réalité du parcours de (son) client, qui n’est pas celui d’un agresseur sexuel ». « C’est une ordonnance sans surprise » après une enquête « exclusivement à charge », ont aussi réagi les avocats Mourad Battikh et Antoine Ory, qui défendent un producteur et acteur à la « réputation irréprochable ». Ils font appel « dès aujourd’hui ».

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