La France se retire du Traité sur la Charte de l’Énergie

Le président français Emmanuel Macron tient une conférence de presse après une réunion au deuxième jour d’un sommet des dirigeants de l’UE au bâtiment du Conseil européen à Bruxelles, le 21 octobre 2022. (Photo : Ludovic MARIN / AFP)
LUDOVIC MARIN / AFP Le président français Emmanuel Macron tient une conférence de presse après une réunion au deuxième jour d’un sommet des dirigeants de l’UE au bâtiment du Conseil européen à Bruxelles, le 21 octobre 2022. (Photo : Ludovic MARIN / AFP)

ENVIRONNEMENT - Une victoire pour les défenseurs de l’environnement. Au lendemain de l’avis du Haut Conseil pour le Climat estimant que le Traité sur la Charte de l’Énergie (TCE) était incompatible avec « les calendriers de décarbonation » prévus dans l’accord de Paris, Emmanuel Macron a annoncé ce vendredi 21 octobre le retrait de la France de ce traité vieux de 30 ans. Cette décision était « un point important demandé par beaucoup », a concédé le chef de l’État à l’issue d’un conseil européen à Bruxelles.

Le TCE est né en 1994 et a été ratifié par la France en 1999. Dans un contexte de guerre froide, les 50 États signataires souhaitent alors protéger les investissements des entreprises énergétiques pour en favoriser le déploiement. Jugé aujourd’hui obsolète et non conforme à l’Accord de Paris sur le climat signé en 2015, militants et scientifiques se battent depuis des années pour la sortie de la France de ce traité.

Il protège les entreprises pétro-gazières en leur permettant d’attaquer en justice les gouvernements si ces derniers modifient leur politique énergétique dans un sens contraire à leurs intérêts. Il permet notamment à des entreprises d’assigner devant des tribunaux d’arbitrage privés des États pour leur demander des milliards d’euros de compensations. La France a ainsi été poursuivie pour la première fois par un investisseur allemand en septembre 2022, rappelle le média en ligne Novethic.

Le Giec critique un effet pervers du TCE

« Mais le plus souvent c’est l’effet pervers du TCE qui est utilisé, explique la militante écologiste Camille Étienne sur son compte Instagram, afin d’éviter une convocation en justice et le versement de sommes faramineuses, les États peuvent préférer abandonner les lois climatiques en cause. » C’est pourquoi le Giec considère ce TCE comme un frein aux politiques climatiques internationales.

Face à ces nombreuses critiques, l’Union Européenne s’est attelée depuis 2018 à moderniser le texte. Parmi les modifications évoquées : ne plus protéger les investissements dans les énergies fossiles réalisées à partir d’août 2023. Le 22 novembre, les États devaient voter en Mongolie la nouvelle mouture du TCE, mais les différends entre les pays signataires ne présageaient pas d’un accord suffisamment ambitieux.

C’est dans ce contexte que certains pays européens ont préféré se retirer de ce Traité. Après la Pologne, l’Espagne la semaine dernière, ce sont les Pays-Bas qui ont sauté le pas mardi 18 octobre en se retirant du TCE. « Nous ne voyons pas comment le TCE a été suffisamment aligné sur l’Accord de Paris », a expliqué le ministre néerlandais du Climat et de l’Énergie Rob Jetten. Après ce retrait, la pression sur la France a encore augmenté. La Russie s’en est aussi retirée en 2009, suivie de l’Italie en 2015.

Le Haut Conseil pour le Climat a mis la pression sur la France

Ce mercredi 19 octobre, une trentaine d’organisations de la société civile a adressé une lettre au gouvernement réclamant un retrait de ce texte « climaticide ». « Comment accepter de rester membre d’un traité qui permet à des industriels de poursuivre des États pour leurs politiques de fermeture de centrales au charbon (Pays-Bas), d’interdiction de forages pétroliers (Italie), de restriction sur l’utilisation des techniques d’exploitation les plus néfastes (Slovénie), ou d’adaptation des mesures de soutien aux énergies renouvelables (Espagne, France) ? », se sont-elles insurgées.

Le Haut Conseil pour le Climat a fini par leur donner raison ce jeudi 20 octobre préconisant « un retrait coordonné du TCE de la part de la France et de l’UE, couplé à une neutralisation de clause de survie, qui protégerait encore pendant 20 ans les installations fossiles couvertes par le traité ». Cette option est « la moins risquée pour respecter les engagements nationaux, européens et internationaux sur le climat », a encore estimé le HCC.

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