Du Festival de Cannes aux Oscars, comment Justine Triet est devenue la nouvelle icône du cinéma français

Une Palme d'Or, deux Golden Globes, six César, un Bafta et maintenant un Oscar du meilleur scénario original: avec plus de 190 nominations et 90 récompenses, Anatomie d'une chute est l'un des films français les plus primés de l'histoire du cinéma. Ces chiffres sont inédits depuis The Artist en 2012.

Grâce à ce succès, Justine Triet s'est imposée, depuis le Festival de Cannes en mai 2023, comme la nouvelle icône du cinéma français à l'international. De la même manière que Swann Arlaud est devenu une star outre-Atlantique grâce à son rôle d'avocat dans Anatomie d'une chute, Justine Triet a séduit les cinéphiles du monde entier.

Les photos où la cinéaste pose une cigarette à la main et un verre de champagne dans l'autre, sont devenues virales au cours de ces derniers mois et ont contribué en partie à la renommée du film aux États-Unis.

"Depuis la Palme d'or, Justine a été prise en photo sous toutes les coutures. Il se trouve qu'elle est très photogénique", analyse auprès de BFMTV.com David Thion, producteur d'Anatomie d'une chute.

Et d'ajouter: "Elle fume, on la voit avec un verre de champagne. Elle donne le sentiment d'une réalisatrice très talentueuse mais aussi d'une femme éprise de liberté dans une époque où tout n'est pas rose et où beaucoup de gens se sentent un peu empêchés".

Photogénie

"Tout d'un coup, elle a une image qui devient iconique pour son talent, pour sa photogénie, pour ce qu'elle incarne pour l'image de la femme qui réussit dans des proportions phénoménales et qui parle de sujets que peuvent vivre et ressentir beaucoup de femmes", poursuit le producteur." Et il se trouve que le film parle de ça. Il y a une adéquation entre l'image de Justine et ce qu'elle filme."

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A post shared by Viktorija Burakauskas (@toribur) on Jan 21, 2020 at 8:43am PST

La tenue de Justine Triet aux Oscars, un costume noir à rayures ressemblant à celui porté par Nicole Kidman dans une publicité devenue virale aux États-Unis, a ainsi été commenté plusieurs centaines de milliers de fois sur X (ex-Twitter). Des "fancams" (vidéos virales montées par des fans) mettant en scène la réalisatrice ont elles aussi rencontré un grand succès sur les réseaux sociaux.

Comme Agnès Varda ou Jacques Audiard, Justine Triet compte désormais parmi les rares cinéastes français dont le visage est connu de tous. Avec Mati Diop (Dahomey, Ours d'or à Berlin), Julia Ducournau (Titane, Palme d'or) et Audrey Diwan (L'Événement, Lion d'or à Venise), elle s'impose comme la cheffe de file d'une nouvelle génération de réalisatrices dont le succès dépasse les frontières de la France.

Son œuvre s'impose même comme la meilleure représentante du cinéma français à l'international depuis Amour, Oscar du meilleur film étranger en 2013, et The Artist, qui avait raflé cinq statuettes en 2012. "Qu'elle le veuille ou non elle incarne en effet quelque chose avec un tel succès", confirme David Thion, producteur d'Anatomie d'une chute, auprès de BFMTV.

Avec ses trésors d'ambiguïté et sa réflexion abrupte sur le coût de la vie en couple, son quatrième film lui a permis de concurrencer Christopher Nolan et Martin Scorsese pour l'Oscar de la meilleure réalisation. La cinéaste de 45 ans a partagé son Oscar avec son compagnon Arthur Harari, avec qui elle a écrit le script. "Je pense que ça m'aidera à traverser ma crise de la quarantaine", a lancé la réalisatrice en arrivant sur scène.

Pas destinée au cinéma

Au départ, le cinéma n'attirait pas particulièrement Justine Triet. Née à Fécamp (Seine-Maritime) en 1978, elle a grandi à Paris avec une mère ballotée entre plusieurs métiers et un père souvent absent. La famille passait toutes ses vacances dans une communauté bouddhiste.

Entrée aux Beaux-Arts avec l'ambition de devenir peintre, mais elle y a découvert la vidéo et le montage. C'est de là qu'elle a bifurqué vers le septième art. Elle a réalisé d'abord des documentaires à la veine sociale, notamment un court-métrage sur les manifestations étudiantes de 2007 contre le Contrat première embauche (CPE).

Son cinéma brosse le portrait de femmes dont les vies intime et professionnelle se télescopent. Un point commun que cette mère de deux enfants, en couple avec un autre cinéaste, partage avec ses personnages. Ses héroïnes ont à peu près son âge et affrontent chacune le désordre de l'existence.

Comme elle depuis qu'elle a décroché une Palme d'or et un Oscar: "C'est très émouvant", a-t-elle réagi sur BFMTV. Ce statut lui confère désormais davantage de liberté pour ses projets à venir. "Les gens identifient assez le film et moi maintenant. C'est chouette. C'est toujours aussi compliqué de faire un bon film. Je sais ce que c'est que d'écrire un film et de le réaliser. Ce n'est pas plus facile parce qu'on a un Oscar."

Article original publié sur BFMTV.com