Fabien Roussel dans Président.e 2022 : "Je reverse 2000 euros par mois de mes émoluments à mon parti, chez mes enfants, ça a fait débat, ils ne comprenaient pas"

Fabien Roussel est l’invité de l’émission Président.e 2022, le rendez-vous politique de Yahoo Actualités. Tout au long de la campagne présidentielle, Géraldine Muhlmann recevra les candidates et les candidats ainsi que les personnalités de la vie politique française (Retrouvez l'intégralité de l'interview en fin d'article).

À un mois du premier tour de la présidentielle, Fabien Roussel a le sourire. Le candidat communiste a vu ses intentions de vote doubler par rapport au début de l’année, passant de 2% à près de 5%, seuil symbolique puisqu’il permet le remboursement des frais de campagne (ce qui n’était pas arrivé depuis Robert Hue en 1995).

"Imaginez un seul instant que je me retire ? Mais je serais comme les autres, un pleutre !"

Cela lui vaut d’être sollicité par Jean-Luc Mélenchon, qui aimerait renouveler l’alliance conclue en 2012 et en 2017 avec le Parti communiste (PCF). Fabien Roussel a balayé auprès de Yahoo l’appel lancé par les insoumis, alors que Jean-Luc Mélenchon est en tête à gauche (et cinquième au classement général), avec 9% à 12% des voix dans les sondages.

Fabien Roussel exclut tout retrait et toute alliance avant le premier tour. "Je peux vous dire, les yeux dans les yeux, je peux le signer et me le faire tatouer", martèle-t-il. Sinon, "je désespérerais toutes ces personnes qui m’ont dit ne se retrouver dans aucun candidat de gauche (…) Imaginez un seul instant que je leur apprenne un jour à la télévision que je me retire ? Mais je serais comme les autres, un pleutre !", lance-t-il.

"On est pas beaucoup de députés en France à ne pas s'enrichir"

Fabien Roussel est également revenu sur l’enquête de Mediapart qui qualifie de "fantôme" son emploi d’assistant parlementaire de 2009 à 2014. "Je crois que quoi que je produise, j’aurai tort (...) Je pourrai sortir toutes les preuves, ça ne suffira jamais", regrette l’élu qui a contre-attaqué en publiant des documents afin de prouver son activité effective. Le natif de Béthune assure que son travail d’assistant du député communiste du Nord Jean-Jacques Candelier était "inlassable" et essentiellement "sur le terrain".

Retrouvez l'intégralité de notre entretien avec Fabien Roussel en podcast :

"Ce genre d’attaque de Mediapart m’affecte particulièrement quand je sais les sacrifices que nous faisons quand nous avons un mandat". Car le député déclare donner une part de sa rémunération au PCF, une pratique historique du parti. "Je reverse environ 25 000 euros par an. Et je crois qu’on est pas beaucoup de députés en France à ne pas s’enrichir", affirme-t-il.

"Quand on est élu PCF, on ne gagne pas plus qu’avant"

"C’est une règle chez nous [au PCF] : quand on est élu, on ne gagne pas plus qu’avant. Comme ça, nous n’avons pas de volonté de nous accrocher à notre poste pour l’argent qu'il nous rapporte". Le candidat a déclaré 70 676 euros de revenus imposables perçus en tant que député depuis juin 2017, soit un peu plus de 1 200 euros par mois, quand le salaire net mensuel des députés est fixé à 5 715,43 euros.

Cette règle a parfois suscité des questions au sein même de sa famille. "Pour mes enfants ça a fait débat, ils ne comprenaient pas que tous les mois, je reverse 2 000 euros, quand ils voulaient que je leur achète quelque chose", confie-t-il. Mais Fabien Roussel assure que c’est pour lui "une fierté" de reverser cet argent au PCF, notamment "pour financer des journées à la mer pour les enfants et parents qui ne peuvent pas partir l’été, ou l’aide alimentaire pour les étudiants pendant la pandémie".

Sur le nucléraire, "le discours de Jadot est un discours de bisounours"

Le candidat communiste a également répondu aux questions de Yahoo sur son programme énergétique. Il tacle les positions de Yannick Jadot qui veut abandonner le nucléaire. "Le discours de Jadot est un discours de bisounours (…) C’est une erreur de penser qu’il ne faudra pas investir dans le nucléaire". Le parlementaire du Nord ne croit pas à une énergie 100% renouvelable pour alimenter la France. "Comment peut-on croire que le vent et le soleil vont nous fournir une électricité stable, régulière ? C'est de l'électricité intermittente".

Fabien Roussel loue le caractère "décarboné" de l'énergie nucléaire et assure que l'actualité le conforte dans son choix. "Les scientifiques eux-mêmes le disent : il faut investir dans le nucléaire et les énergies renouvelables pour pouvoir nous passer des énergies fossiles. Au nom du climat, mais aussi aujourd’hui au nom de cette guerre à nos portes". Et de citer l’Allemagne, qui dépend à 55% des importations d'énergie russe. "Leur choix de se priver du nucléaire les a rendus dépendants du gaz russe", conclut-il.

"Décidons ensemble d’un prix unique du gaz pour les pays de l’UE"

Fabien Roussel, drapeau ukrainien épinglé à la veste, propose d'accentuer les sanctions sur l'économie russe. Il préconise de ne plus indexer le prix du gaz sur celui du pétrole. "Décidons ensemble d’un prix unique du gaz pour les pays de l’UE". Cela permettrait selon lui de préserver le pouvoir d'achat des Européens.

En concertation avec les États-Unis, il souhaite aussi limiter l'envolée du cours du blé, fixé à la Bourse de Chicago. "Il y a une spéculation monstrueuse qui enrichit des fonds de pension qui profitent de la guerre", dénonce-t-il. Plus globalement, le communiste "approuve le choix de la fermeté et dialogue, le choix de la France" et d'Emmanuel Macron, depuis le début du conflit. Il faut selon lui "aider les Ukrainiens" tout en "dialoguant avec Poutine".

"Poutine est un dictateur, un homme dangereux"

Pour Fabien Roussel, le dirigeant russe est "un nationaliste, libéral, de droite". "C'est un dictateur", poursuit-il, et "un homme dangereux. C'est pour ça qu'il est très important de ne pas être dans un climat antirusse, car il y a des progressistes russes", insiste-t-il, saluant "le courage" des manifestants qui défilent en Russie contre la guerre en Ukraine. Le candidat communiste estime que c'est en tendant la main aux "anti-Poutine", qu'"on parviendra à l'isoler dans son propre pays".

"Si je suis élu, nous ne vendrons plus nos ports, nos gares, nos usines à la Chine"

Fabien Roussel n'a pas de mots aussi durs pour Xi Jinping, allié de la Russie. "Quand je parle aux dirigeants chinois, je leur dis que je ne partage pas manière dont ils font vivre démocratie dans leur pays. Mais je leur dis aussi que si je suis président de la République, nos ports, nos aéroports et nos gares ne seront pas à vendre", affirme-t-il.

Il dénonce l'"hypocrisie" de "ceux qui peuvent dire que Xi Jinping est un dictateur mais qui vont en coulisses négocier des contrats avec lui et vendre nos usines", citant l'exemple de Renault, dont l'État est actionnaire. "Pendant cette guerre, la France ne doit pas être antichinoise, elle doit dialoguer avec le président chinois".

"Je veux nationaliser deux banques et une compagnie d’assurances"

Le candidat communiste a également détaillé des points de son programme économique. Il prévoit de nationaliser la BNP Paribas et la Société générale, "pour avoir des banques qui soutiennent nos entreprises et ne prêtent pas qu’aux riches". Même projet pour la compagnie d’assurances, Axa, pour "garantir les risques auprès des entreprises à des coûts beaucoup moins élevés".

Fabien Roussel compte en outre augmenter le budget de l’État, pour investir dans les services publics et financer notamment le revenu étudiant (850 euros mensuels). Il passerait pour cela par l'emprunt, mais souhaite repenser le rôle de la Banque centrale européenne. "Notre dette dépend des banques, car la BCE prête aux marchés financiers qui prêtent aux États. Je veux libérer la dette française de ces taux d’intérêts de 40 milliards d'euros par an".

Retrouvez tous nos entretiens avec les candidats à l'élection dans Président.e 2022 en podcast :

"Les riches ont été tellement gâtés avec Macron !"

Pour cela, il suggère que la BCE fasse directement des prêts aux États, "à des taux négatifs". S’il ne parvient pas à réformer cette politique de la BCE, Fabien Roussel assure qu’il ne sortirait pas de l’UE pour autant.

Le communiste rétablirait aussi l'impôt sur la fortune, qu'il augmenterait, pour renflouer de 12 milliards d'euros annuels les caisses de l'Etat. "Les riches ont été tellement gâtés avec Macron !", souffle-t-il, prédisant qu'"ils ne partiront pas" du pays s'il est élu.

Retrouvez l'intégralité de l'interview de Fabien Roussel ici :