Eurovision: sacre de Nemo, discours de Slimane, exclusion de Joost Klein... Le récit d'une folle édition
L'édition 2024 de l'Eurovision n'aura accordé aucun répit aux eurofans. Depuis l'annonce en novembre dernier de la candidature de Slimane, jusqu'aux derniers rebondissements de la journée de samedi, marquée par une exclusion, un incident en coulisses, des tensions autour d'Israël et une victoire surprise de la Suisse, le concours de la chanson européenne aura été particulièrement mouvementé cette année.
• La surprise suisse
Les bookmakers prédisaient depuis plusieurs jours déjà la victoire du chanteur croate Baby Lasagna et de son morceau Rim Tim Tagi Dim. Ils se sont cependant trompés: l'artiste suisse Nemo, pourtant en bonne place dans le classement des bookmakers, a déjoué les pronostics en s'imposant en tête du podium, devenant le premier artiste non binaire à remporter la finale de l'Eurovision.
Sa chanson, The Code, "raconte le voyage que j'ai commencé en réalisant que je ne suis ni un homme ni une femme", a indiqué Nemo, qui avait arboré le drapeau non-binaire lors de la parade d'ouverture de la compétition. "J'ai été obligé de passer en douce mon drapeau", a déploré encore l'artiste, qui a estimé que l'"Eurovision a besoin de changer un peu" dans son mode de fonctionnement.
• Tensions autour d'Israël
La participation d'Israël au concours a été source de multiples tensions au cours des derniers mois en raison de la guerre qui oppose depuis le 7 octobre Israël et le Hamas. L'Israélienne Eden Golan est arrivée en cinquième position avec 323 points pour sa chanson Hurricane. "Chaque fois qu'Israël obtenait des points, il y a eu des huées partout", a expliqué à l'AFP Michael Kerwick, un fan irlandais.
D'appels au boycott en demandes d'exclusion, sa présence a occasionné plusieurs levées de bouclier au sein des pays participants au cours des derniers mois. La FTT, une association d'artistes islandais, a réclamé en décembre 2023 de ne pas participer à l'Eurovision à moins qu’Israël n’en soit exclu. Un mois plus tard, un collectif de 1.400 artistes finlandais a formulé la même demande.
Après plusieurs prises de parole en faveur de la participation d'Israël, les organisateurs de l'Eurovision ont finalement écarté l'idée de son exclusion à la mi-février - sans pour autant calmer les appels au boycott. La polémique a été relancée de plus belle fin février lorsque la délégation israélienne a soumis la chanson October Rain. Un titre immédiatement interprété comme une référence directe au massacre du 7 octobre.
Le diffuseur, qui a d'abord menacé de se retirer en cas de refus de la chanson, a fini par retravailler le titre avec une nouvelle version intitulée Dance Forever, qui fait référence spécifiquement à l'attaque du Hamas contre le festival Nova Music, le 7 octobre. Une nouvelle fois, la chanson a été retoquée. La troisième proposition, intitulée Hurricane, a finalement obtenu l'aval de l'UER début mars.
A l'approche du concours, Eden Golan a reçu des menaces de mort sur son compte Instagram. Pour assurer la sécurité de l'événement, la police de Malmö a mobilisé des renforts de tout le pays scandinave mais aussi du Danemark et de Norvège. Plusieurs manifestations pro-Palestine ont aussi été organisées dans la ville.
• L'exclusion des Pays-Bas
Joost Klein, le candidat néerlandais, a été exclu de la finale quelques heures avant son lancement. "La police suédoise a enquêté sur une plainte déposée par une femme membre de l'équipe de production à la suite d'un incident survenu après sa prestation lors de la demi-finale de jeudi soir", a expliqué l'UER dans un communiqué.
"Pendant que la procédure judiciaire suit son cours, il ne serait pas approprié qu'il continue à participer au concours", a indiqué l'organisation en rappelant appliquer "une politique de tolérance zéro à l'égard des comportements inappropriés". Une décision condamnée immédiatement par le diffuseur néerlandais Avrotros, pour qui cette disqualification est "disproportionnée".
Selon Avrotros, Joost Klein se serait énervé après avoir été filmé alors qu'il avait demandé "à plusieurs reprises" à ne pas l'être. Le fait que sa demande n'ait pas été "respectée" a entraîné "un mouvement menaçant" de l'artiste envers la caméra. Selon Avrotros, "Joost n'a pas touché la cadreuse". Le diffuseur explique avoir "proposé différentes solutions" aux organisateurs pour éviter une exclusion du candidat, en vain.
• Un autre incident avec Bambie Thug
L'artiste non-binaire Bambie Thug, qui représentait l'Irlande cette année, a manqué une répétition quelques heures avant la finale en raison d'un incident survenu dans les coulisses. Si l'artiste n'a pas précisé la nature de cet incident, il s'agit bien d'un événement différent de celui qui a valu à Joost Klein son exclusion du concours ce matin.
"Il s'est passé quelque chose lorsqu'on attendait pour monter sur scène lors de la répétition du défilé des drapeaux", pouvait-on lire dans une story Instagram de Bambie Thug. "Il s'est passé quelque chose qui nécessitait une intervention urgente de l'UER - et l'UER s'est emparée de cette affaire très sérieusement. Nous avons discuté des actions qu'il fallait prendre", a ajouté l'artiste.
• Aucun point pour l'Angleterre
La performance d'Olly Alexander, représentant du Royaume-Uni lors de l'Eurovision, n'a pas convaincu les Européens. Le chanteur n'a récolté aucun point auprès du public après avoir interprété son titre Dizzy. Avec un total de 46 points, le Royaume-Uni termine à la 18e place du concours. Malgré cette contre-performance, Olly Alexander fait mieux que Mae Muller, qui avait échoué à la 25e place en 2023.
• L'émotion de Slimane
Le candidat de la France, qui visait "la place de fierté", a décroché avec sa poignante chanson Mon amour la quatrième place. S'il échoue au pied du podium, il a marqué cette édition notamment grâce au passage a cappella de son morceau. Lors de l'ultime répétition, ce passage a été particulièrement applaudi. Le chanteur avait remplacé les paroles par un discours pour la paix.
"Quand j'étais enfant, je rêvais de musique, je rêvais de devenir chanteur et de chanter la paix", a déclaré le chanteur sous les applaudissements du public de Malmö, selon ses propos rapportés par 20 Minutes. Avant d'ajouter: "Nous avons besoin d’être unis par la musique, oui, mais dans l'amour et la paix." Un message qu'il n'a pas réitéré lors de la finale. Mais l'artiste, les larmes aux yeux, a chanté avec beaucoup d'émotion sa ballade.
Slimane était tout aussi "très ému" après le concours. "Je disais toujours quand on m'a demandé de faire l'Eurovision, moi je veux juste être fier de moi. Et aujourd'hui je ne suis pas juste fier de moi, je suis fier de nous parce qu'en France on a des talents dont on ne mesure pas la quantité. Je pense qu'il y aura un avant et un après dans ma vie. Pas en tant qu'artiste mais en tant qu'homme."