Doit-on autoriser le changement rétroactif de nom ?

Dans sa chronique, le Pr Jean-Gabriel Ganascia évoque la question du changement rétroactif de nom, en particulier pour les artistes et les scientifiques.

Cet article est extrait du mensuel Sciences et Avenir - La Recherche n°917-918, daté juillet-août 2023.

Dans la Genèse, Saraï prit pour nom Sarah à l'âge respectable de 90 ans, ce qui mit fin à la malédiction qui la frappait de stérilité. Et, elle enfanta Isaac qui eut une longue descendance… Que l'on s'exile, que l'on divorce, que l'on adopte une autre religion ou que l'on assume un genre différent, en se choisissant un nom nouveau, on rompt avec sa vie antérieure et on parachève ainsi la rupture avec un passé que l'on juge odieux ; on l'entérine ; on s'en dégage pour l'oublier et se consacrer tout entier à la vie qu'on s'est donnée.

Changer de nom à condition d'avoir un "motif légitime"

La loi l'autorise à condition de justifier d'un "motif légitime", notion très floue et relativement souple qui repose sur l'usage et l'appréciation du magistrat chargé de trancher. Aujourd'hui, en France, on dépose chaque année environ 2800 demandes de modification de l'acte de naissance afin d'y faire mention d'une nouvelle identité, et 90 % d'entre elles sont acceptées. Au regard des promesses qui s'ouvrent, toute évocation du passé honni dont on souhaite se détacher peut paraître insupportable. Afin de ne pas se retourner dessus, certains désirent abolir toute mention de l'état d'avant. Lorsqu'on envisage le futur, cela ne pose pas de problème.

La réécriture du passé laisse redouter le pire

Mais, comment procéder si l'on a une œuvre d'artiste ou de scientifique ? D'où la demande de certains chercheurs, lorsqu'ils changent de nom ou de genre, de modifier rétrospectivement la mention de leur identité sur leurs travaux antérieurs.

En effet, lorsqu'ils souhaitent reconstituer leur carrière en établissant leur bibliographie, ressurgit la personne ancienne avec laquelle ils veulent rompre. Il s'ensuit une grande souffrance et un préjudice possible, au cas où les publications antérieures ne seraient pas comptabilisées. La compassion devrait conduire à accéder à leur demande, à savoir m[...]

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