« Se dire que la pression sur le poids peut gâcher son mariage, c’est horrible » - Témoignage

« La boutique de robe de mariées était pleine de modèles incroyables, mais j’ai dû choisir entre quatre pièces à ma taille »
« La boutique de robe de mariées était pleine de modèles incroyables, mais j’ai dû choisir entre quatre pièces à ma taille »

TÉMOIGNAGE - J’ai longtemps eu un rapport compliqué avec mon poids et avec la nourriture. J’ai fait mon premier régime à 14 ans et dans les années qui ont suivi, j’ai complexé. Mal dans mon corps, j’avais du mal à trouver des vêtements à ma taille et la plupart du temps, j’alternais entre des périodes où je m’affamais et d’autres où je mangeais beaucoup trop - je ne savais pas encore qu’on appelait ça des troubles du comportement alimentaire. J’étais obsédée par la perte de poids.

Mes fiançailles, un jour de fête gâché

Le jour de mes fiançailles, l’année de mes 22 ans, aurait dû être un moment de joie. Pourtant, il s’est transformé en moment de panique. La famille de mon partenaire devait venir chez la mienne pour la célébration, et je me souviens que je détestais tout ce que je pouvais porter à ce moment-là. Je faisais une taille 46 et à l’époque, il était encore plus difficile qu’aujourd’hui de trouver des vêtements à cette taille qui soient beaux et agréables à porter. Dans les moments qui ont précédé l’arrivée de mon futur mari et de sa famille, j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps, au point que ma mère est sortie me chercher quelque chose à mettre à la dernière minute, un pull informe dans lequel je me sentais très mal.

Je me disais que la famille de mon partenaire allait juger mon apparence, se dire qu’il méritait mieux, que je ressemblais à un sac… Le rapport que j’entretenais à mon poids, à ce moment de ma vie, a gâché cette journée unique. Avec le recul, j’ai de la peine pour moi. Si je pouvais parler à celle que j’étais à cette époque, je me dirais « Ne t’inquiète pas, même si tu n’es pas à l’aise dans tes vêtements, soit fière ! Ta valeur ne réside pas dans ton apparence, mais dans celle que tu es. » Et pourtant, sur le moment, je me suis faite petite parce que je me sentais gênée par mon poids et par les vêtements que j’avais dû porter par dépit.

Dans les boutiques de robes de mariée, il n’y avait pas ma taille

Cette question du poids est restée présente tout au long des préparatifs de mon mariage, pendant lesquels j’étais au régime et encore obsédée par l’idée de maigrir. J’ai repoussé jusqu’à la dernière minute l’achat de ma robe de mariée, stressée par ce moment, et je suis allée la choisir seule. Je ne voulais pas que ma mère et mes sœurs me voient essayer des robes trop petites, c’était à mon sens encore trop humiliant.

Dans ma ville, les boutiques de robes de mariée n’avaient rien à ma taille, rien ne m’allait et j’étais épuisée et frustrée par cette situation. Je rêvais d’une robe bleue à la Cendrillon, un dessin animé que ma mère et moi adorions quand j’étais petite. Quand j’en ai essayé une que je trouvais superbe, elle ne m’allait pas et au lieu de me dire ce n’était pas le bon vêtement, je me suis dit que c’était moi qui n’étais pas assez bien pour la porter.

Pour pouvoir trouver ma tenue, j’ai dû aller à Paris, à quatre heures de chez moi, dans une boutique qui offrait des modèles à ma taille - ou du moins, quelques-uns. Le magasin était rempli de robes incroyables, et je me suis retrouvée à avoir le choix entre seulement quatre pièces. J’ai essayé de me convaincre que je ne faisais pas ce choix par dépit et même si j’ai aimé mon look le jour de mon mariage, j’avais envie d’autre chose. Car quand on est grosse, les vendeuses nous font intégrer qu’une robe qui nous va bien, c’est une robe qui nous donne « l’air plus mince ». « Tu ne peux pas mettre une coupe sirène parce que tu as un gros ventre », « Les robes bouffantes, ça alourdit la silhouette ». Et pourtant, la forme qui nous fait rayonner, c’est justement celle dont on rêve, pas celle qu’on choisit pour cacher notre corps !

Je suis partie avec un modèle que je n’avais même pas porté, terrifiée à l’idée d’un essayage raté de plus. Je perdais du poids, mais ce n’était jamais assez. Je ne me trouvais jamais belle en passant devant un miroir, je ne portais pas les vêtements que j’aimais en me disant que j’étais trop grosse pour ça. Ce stress n’a heureusement pas duré le jour de mon mariage - que j’ai adoré, et qui est un souvenir merveilleux - mais il a refait surface le jour où nous avons reçu le film du mariage et les photos. J’avais en tête le souvenir des photos de mariage d’une amie sur lesquelles je m’étais trouvée horrible. M’habiller ce jour-là avait été une source de souffrance, et j’avais encore une fois fini par porter une tenue que je détestais.

C’est horrible de se dire que la pression sur le poids peut gâcher un mariage

Pourtant, quand j’ai regardé les photos et les vidéos du jour de mon mariage, je me suis trouvée belle et rayonnante. C’était un choc : c’était la première fois que ça m’arrivait !

Aujourd’hui, mon rapport à mon poids n’a plus rien à voir. En quatre ans, j’ai beaucoup évolué, notamment grâce aux réseaux sociaux. Quelque temps après mon mariage, j’ai commencé à documenter mes troubles alimentaires sur un compte Instagram anonyme. Ma communauté s’est agrandie progressivement, et moi, j’ai découvert le body positive. Je suis désormais loin de toutes ces considérations : je me sens bien dans ma peau et j’ai pris conscience que mon problème avec la nourriture venait d’ailleurs, que c’est à la source que je devais travailler sur mes TCA. Le tout à des millénaires de ces régimes draconiens qui me faisaient tomber dans les pommes quand j’étais adolescente !

Maintenant, j’ai mes astuces : je sais où trouver des robes qui me vont, et dans lesquelles je me sens belle. J’échange beaucoup avec mes abonnées, et je sais que cette pression du poids au moment des mariages est très forte pour elles aussi. Je reçois souvent des messages pour me dire que leurs fiançailles les angoissent à cause de leur poids, qu’elles ont peur que la famille de leur partenaire les juge, et même qu’elles appréhendent le jour de leur mariage à cause de ça. C’est horrible de se dire que la pression sur le poids peut gâcher un mariage, qui est censé être un moment précieux, et que la honte de soi peut empêcher d’en profiter. Mais on n’est pas aimée pour une question de silhouette, et surtout, on ne doit pas s’aimer soi-même en fonction de ça !

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