David Chalmers, le philosophe pour qui le virtuel est bien réel

“Est-ce que vous me voyez ?” À l’ère de la visioconférence, la question est devenue banale. Mais dès lors que vous la posez au philosophe David Chalmers, elle acquiert une tout autre profondeur. Chalmers pense que dans la version élémentaire de réalité virtuelle (RV) où se déroule notre conversation, “certains philosophes très conservateurs répondraient : ‘Non, ce n’est pas vous que je vois, mais simplement un ensemble de pixels sur un écran’.” Lui a une vision très différente des choses : “Oui, je vous vois parfaitement.” La simplicité apparente de cette réponse induit en fait un certain nombre de choses, non seulement sur les possibilités de la réalité virtuelle, mais également sur la nature de la réalité.

Chalmers [né en 1966] est l’un des philosophes les plus célèbres du XXIe siècle. Bien que son nouveau livre, Reality + [sorti en janvier 2022 et pour l’instant inédit en français], soit le premier ouvertement destiné au grand public, il a déjà réussi à dépasser le champ universitaire, en grande partie grâce à son article “The Matrix as Metaphysics” [non traduit en français], écrit en 2003 pour le site officiel du film. Sa décontraction, son allure débraillée et ses longs cheveux qui n’ont pas vu un peigne depuis des années lui ont légitimement valu d’être qualifié de “philosophe rock star”.

La réalité virtuelle est-elle réelle ?

Il doit moins sa réputation à ses propres théories qu’à sa façon incisive de cerner ce qui est sans doute aujourd’hui le problème philosophique majeur. Chalmers a établi une distinction entre les problèmes “facile” et “difficile” de la conscience. Le problème “facile” consiste à décrire les mécanismes et identifier les zones du cerveau qui suscitent tel ou tel état mental. S’il est dit “facile”, c’est qu’il ne soulève aucune question conceptuelle profonde. Le problème “difficile” de la conscience consiste, en revanche, à comprendre comment une masse de matière organique, si complexe que soit son organisation, peut engendrer l’expérience subjective de la conscience. C’est désormais ce que l’on appelle “le problème difficile de Chalmers” – même s’il existait avant que le philosophe lui ait donné son nom.

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