"Un déluge de décrets": ce que peut faire Donald Trump pour son premier jour à la Maison Blanche

Donald Trump de retour aux manettes. Après avoir multiplié les annonces fracassantes depuis son élection en novembre, le républicain est investi ce lundi 20 janvier à Washington D.C. et succède à Joe Biden à la Maison Blanche.

L'ancien président, qui a opéré un retour historique au pouvoir, a promis un second mandat plus détonant encore pour "régler chacune des crises auxquelles notre pays est confronté". "J'agirai à une vitesse et avec une force sans précédent", a déclaré dimanche le tribun républicain de 78 ans devant une foule enthousiaste dans les tribunes de la Capital One Arena à Washington.

Il a promis de prendre des décisions radicales dès son premier jour dans le bureau ovale, se comparant même à un "dictateur pour un jour".

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"Le premier jour, la première semaine, les cent premiers jours seront un coup de foudre", a promis son conseiller Stephen Miller.

"Avalanche de décrets"

"Lors de sa première présidence, Donald Trump avait l'impression d'être corseté par les caciques du parti républicain", décrypte pour BFMTV.com Alexis Pichard, chercheur associé au Centre de recherches anglophones de l’université Paris Nanterre. "Cette fois, il veut agir selon ses idées et appliquer tout son programme."

Pour cela, Donald Trump entend prendre dès son arrivée à la Maison-Blanche une série de décrets présidentiels (executive orders). "Ce sont des décisions qui n'ont pas valeur de loi et qui peuvent être défaits par son successeur", rappelle le spécialiste des États-Unis.

En 2016, Donald Trump avait pris 32 décrets durant ses 100 premiers jours, bien plus que Bill Clinton (13), George Bush (11) et Barack Obama (19). Cette fois, il en aurait préparé plus de 100, selon les informations d'Associated Press et de Reuters. Une "avalanche de décrets" qui provoquera "le choc et l'effroi", prophétisait sur CBS News le sénateur républicain John Barrasso, fidèle du président.

"Le plus grand programme d'expulsions de l'histoire"

L'immigration est le premier thème sur lequel le républicain veut agir rapidement. "Dès que j'aurai prêté serment, je lancerai le plus grand programme d'expulsions de l'histoire américaine", a-t-il assuré pendant sa campagne. Pour passer à l'acte, Donald Trump veut déclarer l'état d'urgence national et faire appel aux militaires. Selon les estimations, environ 11 millions de personnes résident clandestinement aux États-Unis.

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Le président des États-Unis peut prendre d'autres décisions immédiatement par simple décret, comme supprimer une application utilisée par les demandeurs d'asile, ou un programme spécifiquement conçu pour les migrants en provenance d'Haïti, de Cuba, du Nicaragua et du Venezuela.

Le président élu souhaite aussi mettre fin au droit du sol, qu'il juge "ridicule". "Mais ce droit est protégé par le 14e amendement de la Constitution", rappelle Alexis Pichard.

Tout programme d'expulsions pourrait par ailleurs buter sur des recours en justice, ainsi que sur le refus de certains pays d'accueillir leurs ressortissants. Lors de son premier mandat, des juges avaient retoqué son "Muslim Ban" qui interdisait aux citoyens de certains pays d'Afrique et du Moyen-Orient l'entrée aux États-Unis.

Autre mesure attendue: des grâces pour les personnes condamnées pour avoir pris d'assaut du Capitole le 6 janvier 2021, afin de tenter d'empêcher la certification de l'élection de Joe Biden. Donald Trump a assuré à ses partisans qu'ils seraient "très heureux" de la décision qu'il prendra en la matière lundi.

Taxes douanières et forages

Sur le plan économique, Donald Trump devrait remettre en route sa politique protectionniste. "Le 20 janvier, pour l'un de mes nombreux premiers décrets, je signerai tous les documents nécessaires pour imposer au Mexique et au Canada des droits de douane de 25% sur TOUS les produits entrant aux États-Unis", avait-il annoncé fin novembre.

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Cette menace de guerre commerciale avec les pays voisins, liés par un accord de libre-échange, est-elle réaliste ou s'agit-il d'un coup de bluff avant de négocier, tout comme les provocations à répétition sur une annexion du Canada? Donald Trump justifie ce projet en évoquant l'entrée aux États-Unis de drogues et de migrants clandestins.

Autre pays dans le viseur, la Chine. Le président élu a menacé Pékin d'une hausse des taxes douanières de 10%, venant s'ajouter à celles, sur certains produits, déjà imposées lors de son premier mandat.

Le dirigeant climatosceptique a également promis de s'attaquer à la politique climatique de son prédécesseur démocrate. Son slogan "Drill, baby, drill!", promouvant l'extraction d'énergies fossiles, a été répété à l'envi durant ses meetings de campagne. Il a aussi assuré qu'il annulerait "immédiatement" une récente décision de Joe Biden consistant à interdire très largement l'exploitation "offshore" d'hydrocarbures.

"Délire transgenre"

Le président pourrait également prendre des décrets pour s'attaquer au "délire transgenre", l'un de ses chevaux de bataille. "D'un simple trait de plume, dès le premier jour, nous mettrons un terme au délire transgenre", a assuré le président élu, qui a promis d'"exclure les transgenres" de l'armée et des écoles.

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"La politique officielle des États-Unis sera qu'il n'y a que deux genres, homme et femme", a-t-il affirmé.

Donald Trump a aussi promis de supprimer tout financement fédéral des écoles ayant adopté la "théorie critique de la race". Ce concept, qui désigne au départ un courant de recherche, est utilisé de manière péjorative par les conservateurs pour dénoncer les enseignements de sensibilisation au racisme.

Pour le chercheur Alexis Pichard, une accumulation de décrets symboliserait tout autant le volontarisme de Donald Trump que son manque de marges au Congrès. "Il ne pourra pas faire tant de choses que ça d'un point de vue législatif. À la Chambre des représentants, il n'a que cinq voix d'avance. Au Sénat, il n'a pas la supermajorité de 60 voix nécéssaire pour faire adopter certains textes, et le chef des sénateurs républicains, John Thune, n'est pas un trumpiste", rappelle le spécialiste.

"Légiférer prend du temps et nécessite de faire des compromis. Prendre des décrets, c'est beaucoup plus simple", résume-t-il.

Article original publié sur BFMTV.com