Coupe du monde féminine de football : Le cycle menstruel des femmes athlètes a-t-il vraiment un impact sur leurs risques de blessures ?

La défenseure Leah Williamson de l’équipe anglaise ne sera pas présente au Mondial car elle se remet d’une rupture d’un ligament croisé .
La défenseure Leah Williamson de l’équipe anglaise ne sera pas présente au Mondial car elle se remet d’une rupture d’un ligament croisé .

SANTÉ - Les joueuses de football sont-elles plus touchées par certaines blessures que leurs homologues masculins ? C’est ce que laisse penser la longue liste d’athlètes blessées au genou qui ne participeront pas à la Coupe du monde féminine de football, qui débute ce jeudi 20 juillet en Océanie.

Parmi elles, l’attaquante vedette Beth Mead et la défenseure Leah Williamson de l’équipe anglaise qui se remettent toutes les deux d’une rupture d’un ligament croisé. Du côté des Néerlandaises, l’attaquante Vivianne Miedema, blessée au genou depuis décembre est également absente. Tout comme les Américaines Mallory Swanson et Catarina Macario. Cette saison, c’est une cinquantaine de joueuses de championnats majeurs qui auront souffert d’une blessure à un genou.

Une liste qui s’allonge pour des raisons diverses, comme des équipements non adaptés, l’intensité accrue des matchs, mais aussi des facteurs physiologiques. Parmi ces derniers, les changements hormonaux liés au cycle menstruel peuvent jouer un rôle.

Des blessures « quatre à six fois » plus courantes chez les joueuses

« Le fait que les femmes soient sérieusement plus à risque que les hommes qui jouent au football est reconnu depuis longtemps », a déclaré à l’AFP Gordon Mackay, un chirurgien écossais du genou. Le spécialiste estime que ces blessures arrivent « au moins quatre fois, peut-être six fois » plus chez les joueuses.

Interrogée par le HuffPost, la Dr Victoria Tchaikovski, spécialisée en médecine du sport, prévient que « les études sur le sujet sont encore à prendre avec précaution », mais souligne plusieurs facteurs qui favorisent le risque de blessure chez les femmes. D’abord, des « ligaments structurellement plus souples et plus élastiques, entraînant un seuil de rupture plus bas qui favoriserait le risque de déchirure ». Mais aussi des « facteurs anatomiques, musculaires, génétiques ou bien hormonaux »

Les hormones, donc, peuvent jouer un rôle. Amel Majri, la milieu de terrain française, blessée il y a quelques mois au genou, confirmait début juillet à l’AFP : « Quand on est une femme il y a les périodes de menstruation. Selon les études, c’est plus cela qui fait qu’il y a plus de ruptures de ligaments croisés. C’est pour cela qu’on est suivies à ce niveau-là maintenant. »

Plus de risques pendant l’ovulation et les règles

En effet, selon la Dr Victoria Tchaikovski, pendant « la première phase du cycle menstruel, c’est-à-dire la phase ovulatoire, là où la concentration d’œstrogène est la plus élevée, les femmes ont plus de chances de se faire une blessure ». Ce risque accru pendant l’ovulation est dû à la quantité d’œstrogène qui « entraîne des changements au niveau des tissus et provoque les ruptures du ligament croisé antérieur », explique la médecin. À l’inverse, une fois l’ovulation passée, « les femmes se blessent moins », précise-t-elle.

Enfin, selon elle, « il faut aussi prendre en compte la période de règles des sportives ». En effet, durant cette phase du cycle, les athlètes sont davantage fatiguées que le reste du temps et donc plus à risque de se blesser.

Pour éviter les variations de quantité d’œstrogène, certaines femmes peuvent prendre la pilule. C’est en tout cas la solution évoquée dans une étude de la revue The Physician and Sportsmedicine. « C’est un moyen de diminuer le risque », confirme la médecin du sport. Mais attention, « cette solution est à appliquer au cas par cas. C’est quelque chose dont il faut discuter d’abord avec son gynéco, car il peut y avoir des contre-indications. »

Et, pour le moment, « trop peu de données sont disponibles pour généraliser la contraception comme une solution viable », souligne Victoria Tchaikovski.

Prendre en compte le cycle menstruel lors des entraînements

Prendre en compte les facteurs de risque hormonaux permet de repenser l’entraînement des joueuses pour éviter les blessures. « On sait qu’il y a des faiblesses liées au cycle menstruel donc maintenant on prépare mieux les femmes à leurs sessions sportives », indique la médecin du sport.

Les sportives doivent apprendre à « davantage travailler sur la proprioception [la perception des différentes parties du corps, ndlr] pour contrôler le genou de façon musculaire », selon Victoria Tchaikovski. Mais ce travail doit être réalisé « en tenant compte du cycle » rappelle-t-elle. « Lors de la première phase du cycle, il est important de moins charger l’entraînement en intensité, alors que pendant la deuxième phase du cycle, l’effort peur être plus rapide et important. »

« Les sportives de haut niveau ont la chance d’avoir un coach personnel, elles peuvent donc aussi réaliser un renforcement musculaire personnalisé ce qui va les aider à moins se blesser », souligne la docteure.

Interrogé sur le sujet par l’AFP, le sélectionneur français de l’équipe féminine de football, Hervé Renard, a estimé qu’il fallait « penser beaucoup plus à l’individualisation de la joueuse », c’est-à-dire faire davantage attention aux cycles hormonaux de chacune. Le préparateur physique de l’équipe de France, Thomas Pavillon se penche précisément sur le sujet, selon le sélectionneur.

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