TOUT COMPRENDRE - Pourquoi la Chine réalise-t-elle des manœuvres militaires autour de Taïwan?

Forte tension dans le détroit de Taïwan. Depuis maintenant trois jours, la Chine a lancé une série de manœuvres militaires autour de cette île voisine avec comme intention d'intimider les autorités locales et de faire étalage de sa puissance militaire.

Pékin, qui réclame encore et toujours l'île, se montre de plus en plus menaçant envers Taïwan. Ces derniers exercices militaires ont été motivés par une rencontre, la semaine passée, entre la dirigeante taïwanaise et un haut responsable américain.

• Pourquoi une telle attitude de la Chine?

De samedi à lundi, les autorités chinoises ont mené l'opération "Joint Sword", qui consiste en un exercice "d'encerclement total" et de blocage de Taïwan, des manœuvres présentées par Pékin comme un "sérieux avertissement" aux autorités de l'île après la rencontre de sa présidente avec le Speaker de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy.

Elle vise à établir les capacités chinoises à "prendre le contrôle de la mer, de l'espace aérien et de l'information (...) afin de créer une dissuasion et un encerclement total" de Taïwan, a affirmé samedi la télévision d'État chinoise.

Ce lundi, Taïwan a dit avoir détecté 12 navires de guerre et 91 aéronefs chinois autour de l'île. De son côté, le commandement chinois du théâtre d'opérations Est de l'Armée a précisé que le Shandong, l'un des deux porte-avions de la Chine, a "participé à l'exercice du jour".

Durant le weekend, des avions de chasse et des navires de guerre ont également simulé des bombardements ciblés contre l'île, dans le cadre de cette opération. L'armée chinoise a affirmé lundi avoir "achevé avec succès" ses manoeuvres militaires, elle a "testé de manière approfondie sa capacité de combat" interarmées "en conditions réelles", a ajouté le commandement chinois.

Le dernier déploiement important autour de l'île avait eu lieu en août dernier: la Chine avait engagé des manœuvres militaires sans précédent autour de Taïwan et tiré des missiles en réponse à une visite sur l'île de la démocrate Nancy Pelosi, alors présidente de la Chambre.

• Quelles sont les exigences de Pékin?

Au-delà de cet exercice, et Pékin n'en fait pas de secrets, la Chine considère Taïwan comme une province de son pays qu'elle n'a pas encore réussi à unifier au reste de son territoire depuis la guerre civile de 1949.

Ce lundi, en marge de ces exercices militaires, le gouvernement chinois a d'ailleurs rappelé que la paix dans le détroit de Taïwan et l'indépendance de l'île sont incompatibles.

"L'indépendance de Taïwan et la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan s'excluent mutuellement", a déclaré Wang Wenbin, porte-parole du ministère des Affaires étrangères lors d'un briefing régulier. "Si nous voulons protéger la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan, nous devons nous opposer fermement à toute forme de séparatisme pour l'indépendance de Taïwan", a-t-il ajouté.

De plus, Pékin voit avec mécontentement le rapprochement ces dernières années entre les autorités taïwanaises et les États-Unis qui, malgré l'absence de relations officielles, fournissent à l'île un soutien militaire substantiel.

Le ministère des Affaires étrangères de Taïwan a accusé lundi la Chine de saper "la paix et la stabilité" dans la région, après la fin des manoeuvres militaires. Il a ajouté que Taipei maintiendrait des liens étroits avec les États-Unis "pour dissuader de manière conjointe l'expansion autoritaire".

• Quelle réponse de l'Occident?

Les États-Unis, qui ont appelé Pékin à la "retenue", ont semblé eux aussi vouloir faire une démonstration de force: le destroyer américain USS Milius a mené lundi une "opération de liberté de navigation" dans un secteur de mer de Chine méridionale revendiqué par Pékin.

"Cette opération de liberté de navigation a respecté les droits, les libertés et les utilisations légales de la mer", a déclaré la marine américaine dans un communiqué, précisant que le navire était passé à proximité des îles Spratly.

Le navire est passé à moins de 12 milles nautiques (22 km) du récif Mischief, revendiqué par la Chine et d'autres pays de la région, a-t-elle ajouté. Une "intrusion", a immédiatement dénoncé la Chine.

De son côté, se refusant à "entrer dans une logique de bloc à bloc", Emmanuel Macron exhorte l'Europe à ne pas "être suiviste" des États-Unis ou de la Chine sur la question de Taïwan, dans une interview au quotidien économique français Les Echos publiée dimanche.

"La pire des choses serait de penser que nous, Européens, devrions être suivistes" sur la question de Taïwan "et nous adapter au rythme américain et à une surréaction chinoise", déclare le chef de l'État français, dans cet entretien accordé vendredi, lors de son déplacement en Chine.

Article original publié sur BFMTV.com