Charles III en France: un roi francophile en visite en terrain connu

C'est une visite diplomatique, destinée à réchauffer les relations franco-britanniques, mises à mal par le Brexit. Mais la visite d'État du roi Charles III en France, ce mercredi ne sera pas une charge pour ce roi francophile, amateur d'architecture et de gastronomie françaises. Un roi qui parle bien le français et a fait déjà 34 séjours dans le pays.

La francophilie, Charles est tombé dedans lorsqu'il était enfant. Sa mère, la reine Elizabeth II, et son père, le prince Philip, eux-mêmes très francophiles, parlaient tous les deux un excellent français.

"Je me rappelle le plaisir que j'ai eu à découvrir ce beau pays pour la première fois, et à cultiver à mon tour une grande affection pour le peuple français", expliquait en français la reine Elizabeth, lors de son discours au dîner d'État de 2014, évoquant sa première visite en France, en 1948, avant de devenir reine.

"Elle, la France et le Royaume-Uni partageaient non seulement une 'entente cordiale', mais un partenariat chaleureux, sincère et loyal", a d'ailleurs déclaré Emmanuel Macron à la mort de la souveraine, en septembre 2022.

Le futur roi a lui-même prononcé un vibrant discours sur l'amitié et la coopération franco-britannique, le 18 juin 2020, lors des commémorations de l'appel du général de Gaulle en 1940. "Je suis particulièrement fier que [la] statue du général de Gaulle se tienne non seulement ici dans notre capitale, mais mais qu'elle se trouve à quelques pas de celle de mes grands-parents bien aimés, qui admiraient tant son courage", avait-il déclaré.

Parler français "comme au Canada"

Très tôt, la reine s'est attelée à cultiver cette francophilie, mais aussi à préparer Charles à son futur rôle. L'été de ses 11 ans, elle lui prend ainsi un précepteur, chargé de ne lui parler que français, pendant ses vacances à Balmoral, comme l'évoque le journal La Presse en 2021. Les médias français, dont Le Monde, s'étonnent que la reine ait choisi un Canadien, un certain Jean Lajeunesse, pour cette tâche. Le porte-parole de la reine répond que le jeune Charles est le futur chef du Commonwealth et que "la reine estime que de pouvoir parler le français 'comme au Canada' serait pour le prince Charles d’une très grande importance".

Une dizaine d'années plus tard, en novembre 1970, le prince de 22 ans est envoyé aux obsèques du général de Gaulle, où il représente la reine. La France est malgré tout pour Charles associée à ses passions et centres d'intêret personnels. Et s'il a effectué de nombreuses visites officielles, assisté à de nombreuses commémorations de la Première et de la Deuxième Guerres mondiales, Charles y a aussi fait de nombreuses visites d'agrément.

Palourdes et bigorneaux

Cela commence en 1968, lorsque le futur roi, alors étudiant en archéologie et anthropologie, se rend en Dordogne et en Bretagne, avec son professeur et mentor Daniel Glyn, pour découvrir les monolithes de Carnac et le site préhistorique des Eyzies. En plus de découvrir le patrimoine, le jeune Charles s'initie aux spécialités locales. Des "huîtres, palourdes, langoustines, bigorneaux, étrilles, homard à l’armoricaine, sole meunière lui sont servis, arrosés de Muscadet et de Barsac", note alors le journaliste de Ouest-France.

En 1977, Charles dispute à Deauville un match de polo, une autre de ses passions. Et s'il perd, le prince ne manque pas de "sacrifier aux plaisirs de la gastronomie normande" à Honfleur et Pont-l'Evêque, relatent les archives télévisées de l'époque.

Il s'érige d'ailleurs en défenseur des fromages français en 2015, à l'Institut de France à Paris, où il reçoit le prix François Rabelais pour son engagement en faveur de l'agriculture biologique. "Dans une société bactériologiquement correcte, que deviendront le Brie de Meaux, le Crottin de Chavignol ou le Bleu d'Auvergne?", lance-t-il en français, démontrant une impeccable culture des fromages français.

Un "fanatique du patrimoine"

En 1977 toujours, le maire de Bordeaux Jacques Chaban-Delmas l'invite à l'occasion de l'exposition La peinture britannique de Gainsborough à Bacon, à la Galerie des Beaux-Arts. L'occasion pour le prince d'alimenter sa passion pour l'art et la peinture, mais aussi de visiter la ville.

En 1988, c'est sa passion pour l'architecture qui l'amène en France. Désireux de visiter les châteaux de la Loire, le roi Charles arrive à Chambord en hélicoptère, flanqué de la princesse Diana.

"C'est un fanatique du patrimoine, de la Loire bien sûr mais en général, il s'est beaucoup bagarré en Grande-Bretagne pour éviter certaines destructions, pour éviter les habitats historiques", confiait à France Bleu en mai dernier Jack Lang, qui était à l'époque maire de Blois et ministre de la Culture. "Il m'a souvent dit à quel point il avait été ébloui par ces déplacements en Val de Loire", se souvenait-il.

"Diana parut s'ennuyer ferme tout au long de la visite conduite par l'historienne Monique Chatenet, tandis que Charles se révélait incollable sur François 1er et Léonard de Vinci", raconte à l'époque La Nouvelle République.

C'est seul que le prince revient en 1990, Charles, dans l'Eure, pour taquiner le pinceau. Peintre à ses heures perdues, il se rend à Giverny dans les jardins de Monet, pour un "bain d'impressionnisme", comme l'écrit alors le journal Le Démocrate qui ajoute "en célibataire, le futur roi d'Angleterre a visité les jardins du maître avant de s'attabler pour un 'lunch' et d'installer son chevalet". Une cinquantaine de gendarmes, policiers et CRS permettent au prince de passer un après-midi en tête-à-tête avec les nymphéas.

Autant de doux souvenirs que le prince pourra se remémorer quand il foulera le sol français ce 20 septembre.

Article original publié sur BFMTV.com