Carrefour se redresse grâce au Brésil et accélère les baisses de coûts

par Pascale Denis

PARIS (Reuters) - Carrefour a redressé la barre en 2018 grâce à ses performances au Brésil et a affiché jeudi sa confiance dans la pertinence de son plan stratégique lancé il y a un an.

Le groupe, qui a simplifié son organisation, réduit drastiquement ses coûts, investi dans le numérique et enclenché une refonte de son offre et de ses formats, a vu son résultat opérationnel courant (ROC) progresser de 4,6% à taux de changes constants, après une chute de 17% en 2017.

Cette performance a été portée par de solides résultats au Brésil, qui ont compensé une nouvelle forte baisse en France où les hypermarchés restent à la peine.

"Carrefour a engagé une profonde dynamique de transformation et commence à en voir les premiers effets", a déclaré son PDG Alexandre Bompard, pour qui l'année 2019 sera celle de l'approfondissement des initiatives lancées en 2018.

Le distributeur a stabilisé sa rentabilité opérationnelle à 2,5% grâce à des baisses de coûts qui ont atteint 1,05 milliard d'euros. Il a annoncé porter son objectif d'économies à 2,8 milliards d'ici 2020, contre 2,0 milliard auparavant.

Après les économies liées aux suppressions d'effectifs en France, en Argentine et en Belgique, à la cession des ex-magasins Dia déficitaires ou à la rationalisation de ses achats non marchands, Carrefour mise maintenant sur les effets de son alliance dans les achats avec Système U et Tesco, attendus à partir de cette année.

Très surveillées par les investisseurs, les économies doivent permettre de baisser les prix, notamment en France où la concurrence reste féroce, tout en préservant ses marges.

Carrefour a également musclé ses objectifs de réduction de surfaces de ses hypermarchés (à 400.000 m2), de simplification de ses assortiments (à 15% contre 10% auparavant) et d'ouvertures de formats de proximité (à 3.000 contre 2.000).

LA MARGE CHUTE A 1,3% EN FRANCE

Les prévisions concernant le e-commerce, le bio, les cessions d'actifs non stratégiques et les ventes de produits de marque propre ont en revanche été confirmées.

Carrefour doit impérativement redresser ses hypermarchés français, qui comptent pour près de 25% de son chiffre d'affaires et dont les contre-performances plombent sa rentabilité.

Alexandre Bompard s'est refusé à toute indication sur le calendrier d'un retour à une croissance durable dans ces très grands formats, comme sur celui des baisses de prix, ces dernières ayant jusqu'ici davantage concerné les supermarchés.

Face à la concurrence de Leclerc et Amazon, Carrefour va accélérer les réductions des surfaces non alimentaires de ses hypers, doper la livraison à domicile, offrir davantage de produits bio et de marque propre et poursuivre les ouvertures de Drive et Drive piétons, essentiels à l'infrastructure du e-commerce.

Des "corners" Darty seront aussi installés dans les magasins - une offre susceptible de doper le trafic - tandis que certains rayons comme la bijouterie seront supprimés.

Au total, le résultat opérationnel de Carrefour en France a chuté de 33% à 466 millions d'euros, pour une marge en retrait de 60 points de base à 1,3%.

A l'inverse, la marge a grimpé de 120 points de base à 5,7% en Amérique latine grâce au Brésil, où Carrefour profite d'un retour de l'inflation sur les produits alimentaires et du succès de ses formats de semi-gros Atacadao.

En Asie, les réductions de coûts ont permis de dégager un résultat positif grâce à Taiwan, la Chine restant déficitaire, alors que le groupe redouble d'efforts pour s'adapter à la digitalisation massive du marché local.

Ces chiffres jugés encourageants ont été bien accueillis par le marché, le titre Carrefour progressant de 2,76% à 18,04 euros vers 13h15, signant une hausse de plus de 22% depuis le début de l'année, après une chute de 18% en 2018.

Il cède encore environ 18% depuis l'arrivée d'Alexandre Bompard à la tête du groupe, le 18 juillet 2017.

Le ROC a atteint 1,94 milliard d'euros (avant normes IAS 29), un chiffre légèrement supérieur à la prévision de 1,93 milliard fournie par le groupe en janvier, ce qui donne un recul de 3,4% en données publiées pour cause de baisse du real brésilien.

Le résultat net part du groupe repasse dans le vert, à 802 millions d'euros (consensus de 757 millions d'euros établi par Infront Data pour Reuters), après une perte de 531 millions un an auparavant liée à des charges exceptionnelles massives.

Le dividende proposé est stable à 0,46 euro.

Le cash-flow libre, hors éléments exceptionnels, progresse de 14% à 1,088 milliard et la dette nette s'établit à 3,7 milliards, contre 3,74 milliards.

(Pascale Denis, édité par Bertrand Boucey)