Caroline Darian, dont le père a soumis chimiquement sa mère : "Plus de 70 individus sont venus à notre domicile pour la violer"

Viols, agressions, deuils insurmontables, accidents de la vie : dans "Trauma", anonymes et célébrités reviennent pour Yahoo sur un traumatisme qui a bouleversé leur vie.

Caroline Darian a récemment sorti un ouvrage pour se livrer sur le phénomène de soumission chimique, un fléau trop peu connu et pourtant bien réel. Pendant des années, sa mère a été droguée à son insu par son père et livrée à des inconnus dans un but sordide, celui d’être violée. Un cauchemar qu’elle a accepté de partager pour Yahoo.

La rage au ventre, elle a trouvé le courage de raconter son histoire. Autrice de l’ouvrage "Et j’ai cessé de t’appeler papa" (ed. JC Lattès), Caroline Darian souhaite à tout prix alerter la population sur le phénomène de soumission chimique, un fléau dont sa mère a été victime. Droguée à son insu par son mari pendant des années, elle aurait été livrée et violée par des dizaines d’hommes, sans se douter de quoi que ce soit.

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Mais le 2 novembre 2020, tout s’arrête. La vérité éclate et fait l’effet d’une bombe. Ce jour-là, les policiers du commissariat de Carpentras lui apprennent, à la suite d'une longue enquête menée par leurs soins, qu’elle a été réduite à dix ans d’esclavage sexuel. Pendant cette période, plus de 70 individus seraient venus à son domicile pour abuser d’elle. Au total, plus de 20 000 vidéographies et photographies ont été extraites du matériel informatique de son époux.

"Le premier viol recensé est daté officiellement du 23 juin 2011 tout en sachant que mon père a changé son matériel informatique en 2010", explique Caroline Darian, rappelant toute son incertitude sur les prémisses de ses agissements. Victime collatérale de cette sordide affaire, elle raconte la manière dont sa mère a appris les faits. "Elle était à mille lieues d’imaginer qui était véritablement mon père, son mari avec qui elle a eu trois enfants, une vie de couple heureuse avec, bien sûr, des hauts des bas."

Un état d’ivresse

Comme elle l’explique, son mode opératoire était bien rodé. Sans qu’elle ne se doute de rien, il lui administrait, par le biais de différentes manières, un mélange de somnifères et d’anxiolytiques, un cocktail explosif dont le phénomène d’accoutumance était important. Une situation qui l’a poussé à augmenter les doses au fur et à mesure. "Lorsqu’elle se réveille après avoir été droguée puis violée par ces individus, elle n’est pas dans son état normal", un état qu’elle assimile à de l'ivresse. "Avec mes frères, nous avons plusieurs fois eu ma mère au téléphone dans un état second. Nous nous sommes énormément inquiétés, nous avons même pensé à un début de la maladie d’Alzheimer."

À son grand désarroi, sa mère n’a jamais pu se rendre compte de ce qui se passait malgré certains problèmes gynécologiques. "Elle a consulté plusieurs fois mais les gynécologues ne pouvaient pas imaginer une telle situation lorsqu’ils voyaient entrer dans leur cabinet une femme d’une soixantaine d’années, mariée, trois enfants", ajoute-t-elle tout en rappelant "l'intérêt de parler, d'alerter les professionnels de santé sur l’existence de la soumission chimique". Comme elle le rappelle, aujourd'hui en France, ce phénomène ne se réduit pas à une pilule de GHB dans un verre d'alcool. La pharmacie familiale est à la portée de tous et peut être l'arsenal parfait.

"Dans mon cas, c'est un gros point d'interrogation"

La suite de ses révélations font froid dans le dos. Bien qu’elle n’ait aucune preuve de ce qu’elle avance, Caroline reste persuadée d’avoir elle aussi été "soumise chimiquement". En effet, parmi les 20 000 vidéographies et clichés retrouvés dans le matériel informatique de son père, les enquêteurs sont tombés sur des photographies d’elle à différents moments où elle était inconsciente. "Il n’y a pas la preuve photographique d’attouchement, d’agression sexuelle ou même de viol. Dans mon cas, c'est un gros point d'interrogation et c’est difficile de vivre avec", avoue-t-elle revenant sur la façon dont elle perçoit actuellement son père.

"Pour moi, il n’existe plus. Je ne sais pas pourquoi il a entrepris ce qu’il a fait. Ce dont nous sommes sûrs, c’est qu’il n’y avait aucune contrepartie financière. C’était vraiment pour son plaisir personnel", rappelle-t-elle tout en expliquant avoir de la pitié pour cet individu et attendre avec impatience le procès afin qu’il réponde de ses actes devant la justice.

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