Aux Caraïbes, les descendants d’esclaves seront-ils un jour indemnisés ?

Lorsque l’historienne jamaïcaine Verene Shepherd a commencé à plaider, au début des années 2000, pour le versement d’indemnités aux nations caribéennes en réparation des horreurs de l’esclavage, l’idée est passée largement inaperçue en Europe et aux États-Unis. En Jamaïque, certains craignaient alors que cette demande ne soit perçue comme une forme de “quémandage”, d’autres qu’elle n’offense la monarchie britannique.

Vingt ans plus tard, le sujet s’invite désormais régulièrement dans le débat politique aux Caraïbes, et se fait de plus en plus présent à l’ordre du jour des sommets diplomatiques. Un peu partout dans la région, les gouvernements ont mis en place des commissions spécifiques.

Côté européen, le roi des Pays-Bas a présenté des excuses officielles au nom de son pays, tout comme plusieurs grandes familles britanniques dont les ancêtres ont pris part à la traite négrière. Et pourtant, une question demeure : les pays européens sont-ils vraiment prêts à consacrer une partie de l’argent de leurs contribuables au dédommagement des descendants d’esclaves caribéens ?

“Tous les anciens colonisateurs sont concernés”

Plus de cinq millions d’Africains auraient été embarqués de force pour les Caraïbes, soit plus de dix fois plus que vers l’Amérique du Nord continentale ; ils représentent près de 40 % de l’ensemble des victimes du commerce transatlantique entre 1501 et 1866, d’après les données de l’université de Rice, au Texas. Selon certaines estimations, le préjudice économique et moral de l’esclavage dans les Caraïbes s’élèverait à plusieurs milliers de milliards de dollars.

Si la plupart des spécialistes doutent de voir un jour les indemnisations approcher une telle somme, ils ne désespèrent pas pour autant d’obtenir des montants dignes de ce nom pour la région, peut-être jusqu’à plusieurs milliards de dollars – notamment grâce à l’intérêt croissant suscité par le sujet ces dernières années.

Et, bien que certains pays européens continuent de se murer dans le silence ou d’opposer une certaine résistance, Verene Shepherd reste optimiste. L’historienne, qui est aussi membre de la commission nationale jamaïcaine sur les réparations et vice-présidente de la commission sur les réparations de la Communauté caribéenne (Caricom), fait son possible pour convaincre les gouvernements du Vieux Continent de rencontrer leurs homologues caribéens afin d’avancer vers des mesures concrètes :

[...] Lire la suite sur Courrier international

Sur le même sujet :