Boson de Higgs : un jour de gloire suivi de dix années de mystères

Le 4 juillet 2012, l'insaisissable particule prédite depuis 1964 était enfin observée dans le grand collisionneur de hadrons (LHC) du Cern, à Genève. Ce boson serait indispensable pour donner leur masse aux particules composant la matière. Mais dix ans plus tard, force est de constater que sa découverte n'a pas permis de percer tous les mystères du modèle standard de la physique.

Cet article est extrait du mensuel Sciences et Avenir - La Recherche n°905-906, daté juillet-août 2022.

"Je crois que nous l'avons". Le directeur général du Cern, à Genève, Rolf-Dieter Heuer, officialise ainsi le 4 juillet 2012 la nouvelle qui bruissait depuis des mois. Le fameux boson de Higgs, "la particule de Dieu " comme l'avait surnommée avec emphase le prix Nobel de physique américain Leon Lederman, a finalement été piégé par deux détecteurs du LHC, Atlas et CMS. Dans l'amphithéâtre comble, les regards se tournent vers un homme de 83 ans en chemise blanche qui essuie ses lunettes embuées de larmes. Il s'agit du physicien britannique Peter Higgs. Avec ses collègues l'Américain Robert Brout (décédé en 2011) et le Belge François Englert, il avait imaginé l'existence de cette particule… en 1964 ! Elle était, selon eux, indispensable pour donner leur masse aux particules composant la matière (lire l'encadré ci-dessous).

Pour le modèle standard de la physique des particules, qui décrit l'ensemble des particules, c'est un triomphe… Et le début d'un nouveau chapitre. Cédric Delaunay, physicien au Laboratoire d'Annecy-le-Vieux de physique théorique (LAPTh, Haute-Savoie), était alors post-doctorant au Cern. Il se souvient. "Il était impossible d'entrer dans l'amphi, alors j'avais suivi l'annonce en ligne. Ensuite, nous nous sommes retrouvés dans les couloirs pour encaisser le choc. Les sentiments étaient mêlés. Pour les expérimentateurs, c'était la fin d'une quête, un aboutissement. Nous autres théoriciens étions plutôt dans une certaine stupeur. Car les caractéristiques du boson collaient très bien aux prévisions du modèle standard. Trop bien même. Ce qui fait qu'il héritait aussi de tous ses problèmes." Nicolas Berger, physicien au LAPTh et qui travaillait alors sur l'expérience Atlas, a effectivement vécu l'événement différemment. "Adolescent, je me passionnais déjà pour le boson de Higgs. Alors participer à sa découverte a été un moment de joie intense. Nous savion[...]

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