Bassine de Sainte-Soline : des heurts entre les manifestants et les gendarmes

Les manifestants contre le projet de bassine à Sainte-Soline démarrent leur marche pour rejoindre les grilles du chantier ce samedi 29 octobre.
Pierre Tremblay/Le HuffPost Les manifestants contre le projet de bassine à Sainte-Soline démarrent leur marche pour rejoindre les grilles du chantier ce samedi 29 octobre.

ENVIRONNEMENT - Qu’on les appelle « réserves », « bassines » ou « super-bassines », ce sont les cibles des écologistes. Les milliers de manifestants venus, ce samedi 29 octobre à Sainte-Soline (Deux-Sèvres), pour essayer de bloquer le chantier d’une réserve d’eau se sont heurtés à un imposant dispositif de gendarmerie.

Entre les nuages de lacrymogènes dans les plaines céréalières, quelque 4 000 manifestants, répartis en trois cortèges pour essayer de contourner les forces de l’ordre, ont très vite été bloqués par les 1 500 gendarmes déployés pour protéger le chantier, mais certains d’entre eux ont réussi à forcer un premier barrage.

Des grilles du chantier de la réserve d’eau ont également été forcées par les manifestants en milieu d’après-midi. Ce qui est une partie de leur objectif durant cette manifestation : « Réussir à atteindre la bassine, à enlever toutes les grilles qui protègent le chantier, à reboucher le début du trou, empêcher la reprise des travaux », selon un tract diffusé sur place.

Gaz lacrymogènes et élus molestés

Avec une surface à couvrir de plusieurs hectares, les forces de l’ordre avaient en effet du mal à contenir la foule, dans laquelle des centaines de militants masqués ou cagoulés côtoyaient des familles et de nombreux retraités. Deux fourgons de gendarmerie sont même entrés en collision lors d’une manœuvre d’urgence.

Des gaz lacrymogènes ont par ailleurs été lancés et des élus arborant leur écharpe tricolore molestés, notamment la députée écologiste de la Vienne, Lisa Belluco, selon un photographe de l’AFP.

La préfète des Deux-Sèvres Emmanuelle Dubée avait dit, samedi matin, redouter « une manifestation violente », comme vous pouvez le voir dans vidéo ci-dessous. Elle entendait également « faire respecter » l’interdiction de manifester après des heurts lors d’un rassemblement en mars, refusant de tolérer « qu’un cortège revendicatif ou que des groupes se constituent pour s’approcher du chantier de la réserve de substitution ».

« Sainte-Soline, c’est 720 000 mètres cubes d’eau sur plus de 10 hectares, 18 kilomètres de tuyaux pour des agriculteurs, dont pas un n’a renoncé aux pesticides. On ne veut pas que ça se fasse ici, on ne veut pas que ça se fasse ailleurs », a toutefois lancé samedi matin Melissa Gingreau, porte-parole du collectif « Bassines Non Merci », qui rassemble des associations environnementales, organisations syndicales et groupes anticapitalistes.

Avant de s’élancer, les manifestants s’étaient rassemblés dans un champ prêté par un paysan, constellé de barnums et d’un chapiteau jaune portant l’inscription « Maïs pour tous, justice nulle part ».

Le projet de la discorde

Les réserves de substitution sont des cratères à ciel ouvert, recouverts d’une bâche en plastique et remplis grâce au pompage de l’eau des nappes phréatiques superficielles l’hiver. Elles peuvent stocker jusqu’à 650 000 m3 (soit 260 piscines olympiques) d’eau pour irriguer l’été.

La réserve de Sainte-Soline est la deuxième d’un projet de 16 élaboré par un groupement de 400 agriculteurs réunis dans la Coop de l’eau, pour « baisser de 70 % les prélèvements en été », dans cette région encore soumise à des restrictions d’irrigation après une sécheresse estivale hors norme.

« On est le 29 octobre, c’est sec partout, c’est aberrant d’accaparer toute l’eau disponible pour quelques cultivateurs de maïs », a dénoncé l’eurodéputé Yannick Jadot, présent sur place comme d’autres élus écologistes, dont la députée Sandrine Rousseau.

Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a souligné sur France inter que le « projet n’avait pas de conséquences négatives pour les nappes » phréatiques, selon un rapport récent.

Selon cette étude du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), le projet pourrait, par rapport à la période 2000-2011, augmenter « de 5 % à 6 % » le débit des cours d’eau l’été, contre une baisse de 1 % l’hiver, sans prendre en compte l’évaporation potentielle des futures réserves, ni la menace de sécheresses récurrentes liée au réchauffement climatique.

Christophe Béchu a également rappelé que le « plan signé par tout le monde il y a quatre ans » après une longue concertation entre agriculteurs, élus, autorités et associations, conditionnait l’accès à l’eau à des changements de pratiques (réduction des pesticides, plantation de haies, conversion à l’agroécologie). Mais aucun des dix agriculteurs utilisant la première retenue « n’a souscrit de réduction de pesticides », selon Vincent Bretagnolle, membre du comité scientifique et technique de suivi (CST) du projet, et depuis la signature, plusieurs associations se sont retirées du protocole.

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